Chap. 13 : Loin du front près du coeur

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Chan sortit immédiatement de la tente, dans la nuit noire. Le comportement alarmant du grisé l'avait réveillé en un éclair. Changbin était clairement dans un état de panique extrême, comme si il venait de voir le diable en personne.

Il courut jusqu'à l'endroit où c'était déroulée l'agression et fit l'état des lieux. Ses trois soldats étaient au sol, gémissants de douleur, incapables de se relever, ce qui ne fut pas un souci bien longtemps car à la vue du général ils essayèrent de s'enfuir.

Le blondinet les attrapa tout les trois par le col de leurs uniformes et regarda leurs visages.

« - Vous me décevez ! Terriblement ! C'est ainsi que l'on traite un nouvel allié ? En le tabassant ? »

Deux des trois jeunes hommes se confondaient en excuses, sauf un. Jeongin.

Il était dans un état d'inconscience et de conscience assez vague et ses yeux suivaient mal, il n'était clairement pas dans un état normal. Changbin commençait à s'inquiéter et il courut chercher une infirmière.

Cette dernière prit en charge les garçons blessés et le verdict fut clair, énoncé plus tard dans la matinée suite à leur auscultations et aux aveux des garçons. Jeongin avait été drogué à son insu et convaincu que c'était une bonne chose d'éliminer « le rival ».

Cela rassura Changbin, qui croyait avoir à nouveau perdu son ami avant même de l'avoir retrouvé. Jeongin n'aurait jamais fait ça de son plein gré, enfin, le Jeongin que le grisé connaissait. Le soldat-capitaine n'avait pas eu de nouvelles de ce dernier depuis la fin de l'entraînement auquel ils avaient participé, exceptée une simple lettre dans laquelle le plus jeune lui racontait ses quelques missions et à quel point son métier était comme il l'imaginait.

Changbin n'avait pas prit la peine de répondre, trop occupé et surtout désintéressé de cette fraîchement ancienne amitié, qu'il savait impossible à entretenir. Mais ce visage avait fait remonter des souvenirs. Des souvenirs pleins de vie, douloureux, heureux, quand il était encore Changbin humain, Changbin d'avant.

Le grisé était complètement angoissé, assit en boule dans le lit de Chan. Il ne savait pas quoi faire, ni quoi penser, tous les souvenirs remontaient par centaines et revenaient réchauffer ou meurtrir son cœur.

Il pensait cette période de sa vie complètement effacée, terminée, mais sa réaction face au plus jeune lui prouvait le contraire. Cette période il la redoutait mais elle lui manquait.

***

Une semaine plus tard, Jeongin s'était remit. Malgré son état peu opérationnel, il était à présent bien conscient de ce qu'il avait fait et passait régulièrement voir Changbin, s'excusant un millier de fois avec des paroles on ne peut plus sincères.

Changbin lui assurait que c'était fini, qu'il n'était pas en mauvais terme avec lui et que ça n'était pas sa faute au vu de son état le soir de l'incident. Il lui pardonnait volontiers mais Jeongin ne parvenait pas à se pardonner à lui-même.

Les deux anciens amis commençaient à passer à nouveau du temps ensemble, s'apprendre des choses que l'autre ne savait p as, tout cela au campement car Chan était formel ; il ne voulait pas emmener Changbin sur le front, pas encore et sûrement plus jamais.

Loin du front près du cœur.

Bien qu'un atout majeur maintenant sous leur aile, le général Australien ne souhaitait pas faire revivre des traumatismes, faire à nouveau du plus jeune une machine de guerre et l'utiliser a son insu. Le blondinet cassait peu à peu la coquille du soldat et n'allait pas réduire ses efforts à néant.

Tant que Jeongin restait, Chan n'avait pas à garder un œil constant sur le grisé, il lui faisait d'ailleurs maintenant confiance. Le général ne pensait sincèrement pas que Changbin s'en irait, du moins sans lui.

Par ailleurs, on ne savait d'où ni par quel accord, mais les assauts se faisaient moins fréquents, les armées ne fatiguant pas pour autant. C'était plus rare d'entendre des bruits de bombes, des déflagrations de fusils ou même des hurlements de soldats blessés.

L'ambiance d'ordinaire lourde et cancérigène était devenue un poil plus légère, pas pour autant agréable mais déjà plus surmontable.

Les troupes se lassaient au fur et à mesure des fusillades dans le vide, des intimidations même plus convaincantes auxquelles les soldats ne croyaient plus.

Le nombre d'hommes dans les tranchées avaient diminué de moitié dans les deux camps et cependant aucun pays ne prenait l'avantage.

Une nouvelle ère de la guerre commençait en ce début d'année 1952, tout le monde sentait que les choses allaient changer.

Stone Heart [ChanBin]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant