Chapitre 6.

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Cela faisait maintenant cinq jours que je n'avais pas adressé un mot à Baji. Je l'évitais du mieux que je pouvais. Malgré mon envie de lui parler, je ne pouvais pas me le permettre.

Nous étions donc le lundi matin. J'entamais ma deuxième semaine de cours. Nous n'avions pas encore eu d'évaluation, et tant mieux. Je n'aimais pas les notes dès le début. J'avais toujours l'impression d'avoir du mal à démarrer en début d'année, comme si les vacances m'avaient privée de toutes les connaissances que j'avais acquises l'année précédente.

Ma journée de cours s'était passée encore parfaitement normalement. J'avais bien noté mes leçons, et écouté les cours de A à Z. Je ne m'étais pas retournée une seule fois vers Baji. Après plusieurs jours, je commençais à me faire à l'idée, je ne devais pas faire attention à lui, même pas y penser, même si c'était assez dur, je devais l'avouer.
En fin de journée, le bruit de la sonnerie m'annonçait que je pouvais enfin rentrer chez moi. C'était alors après quelques minutes de rangement que je m'apprêtais à sortir de la salle, pour ensuite partir d'ici. C'est ce que j'avais compté faire, mais les choses se sont passées autrement.
Alors que je ne regardais pas devant moi, comme à mon habitude, les yeux rivés sur le sol, je me heurtai à quelqu'un. Je prenais une petite inspiration pour pouvoir m'excuser, mais en relevant machinalement la tête pour voir de qui il s'agissait, mes yeux se plantaient dans ces orbes dorées qui lui étaient si caractéristiques.

Baji.

Il ne souriait pas, ça me faisait bizarre, lui qui habituellement avait l'air si joyeux... il avait l'air perturbé, ou énervé, je n'arrivais pas trop à déceler. Je m'inclinai alors doucement pour m'excuser, avant de tenter de le contourner pour m'en aller, mais je sentis sa main se poser sur mon épaule, avant qu'il ne dise simplement.

-Tu veux pas qu'on parle, vite fait ? T'es bizarre Rym, pourquoi tu m'évites comme ça ?
Je détournais le regard. Je ne pouvais pas lui parler, je devais écouter mon père, sinon il serait énervé. Alors je ne répondais pas, ce qui semblait le tendre un peu plus. Rym, sérieusement ! Réponds-moi, tu fais flipper à te comporter comme ça! Tu es triste ? Malade ? Tu veux en parler, je suis là. Mais arrête de m'ignorer ou donne moi une bonne raison de le faire. Je te jure que c'est angoissant comme truc. Avait-il renchéri en posant sa deuxième main sur mon autre épaule, me remettant bien en face de lui. Regarde-moi et dis-moi ce qu'il se passe, mais fais pas de trucs sans raison comme ça. 

J'avais doucement relevé le regard vers lui en lâchant un petit soupir. Je scrutai autour de moi pour vérifier qu'il n'y avait personne qui pourrait en parler à mon père, puis je prenais la parole après avoir soufflé un grand coup.

-Baji, je peux plus te parler... mon père m'interdit. Je te jure que c'est pas l'envie qui me manque, j'aime bien aller t'aider à réviser et tout... mais je peux pas. Il m'a dit que s'il me reprenait à parler avec toi, il me changerait de collège. Je parlais sur le même ton tout le long, pas de larmes, encore moins de stress. Tant qu'à faire, autant qu'il comprenne.
-C'est à cause de ton père alors...eh bah. Quand on est au collège, on peut parler, non ? Il te surveille pas, si ?
-Il en serait capable...
-Mais il le fait pas encore. Alors parlons ici. J'aime pas ça, t'es cool comme fille, ça serait bête de pas se parler a cause des limites d'un parent strict. Me disait-il en me lançant un léger sourire, avant de reprendre. Et puis...je sais pas s'il surveille ton téléphone, mais je pourrais te donner mon numéro si tu veux, on pourrait parler en dehors des cours comme ça. Avait-il dit en sortant son téléphone, me le tendant doucement après avoir commencé la création d'un nouveau contact.

C'était intelligent. Mon père ne surveillait pas mon téléphone, car j'avais demandé à avoir un minimum de vie privée quand même, alors pour une fois, il avait accepté, persuadé que je ne parlais qu'avec ma mère et quelques autres membres de ma famille. J'avais hoché la tête, et avais entré mon numéro dans son téléphone. Puis je m'étais envoyé un message à moi même, avant de sortir mon téléphone et de lui montrer que c'était bel et bien le bon numéro, et pas un faux pour jouer la ruse. Puis j'avais fini par accepter pour qu'on parle lorsque nous étions au collège.
Nous étions ensuite rentrés chacun de notre côté, faisant comme si nous ne nous connaissions pas une fois les grilles passées. On aurait dit deux inconnus, mais pourtant, en marchant, nous étions l'un et l'autre sur notre téléphone en train de parler, jusqu'à ce qu'il me laisse car il prenait la route.

Les jours suivants se passaient parfaitement bien, je n'avais plus à ignorer mon camarade lorsque nous étions en cours et c'était bien mieux comme ça. J'avais même fait la connaissance du fameux Chifuyu qui traînait avec lui. Il était sympathique, on s'entendait plutôt bien les trois. Nous mangions ensemble les midis et passions nos pauses ensemble. Puis lorsque les grilles du collège étaient franchies et que nous nous retrouvions à jouer les inconnus, nos téléphones prenaient le relais. Une discussion de groupe, deux discussions privées, tout allait pour le mieux.

Par message, je parlais tout de même beaucoup plus avec Baji. Nous échangions sur divers sujets : les cours, la moto, et même un peu sur la musique. Mon père ne se doutait absolument pas de ce qu'il se passait bien qu'il trouvait que j'étais un peu plus sur mon téléphone. Mais tant qu'il ne surveillait pas, j'étais tranquille.

Après quasiment deux semaines, notre petit trio allait parfaitement bien. J'en apprenais un peu plus tous les jours sur mes deux amis, et de même de leur côté. Je me sentais bien, comme si le fait d'avoir des amis m'apportait du baume au cœur. C'était le cas, tout ce qui m'entourait était différent maintenant. Je comprenais qu'il y avait des gens intéressants, et surtout des gens qui pouvaient s'intéresser à moi. C'est comme ça que je me sentais avec Baji et Chifuyu.

Un soir, alors que nous sortions de cours, je marchais un peu à leurs côtés avant de franchir les grilles, et je les vis recevoir un message chacun au même moment. Ils se regardèrent, hochant la tête, avant de tourner leur tête vers moi.

-Rym! Ce soir, trouve une excuse pour rentrer tard, on t'emmène avec nous ! Me dit simplement Baji, avec un grand sourire aux lèvres. Chifuyu souriait aussi. Sur le coup, je me demandais où est-ce qu'ils comptaient m'emmener. Mais je leur faisais confiance, je n'avais pas peur. Et puis pour l'excuse à mon père... je trouverai. Je ne me voyais pas refuser une telle invitation, surtout qu'ils avaient l'air d'être impatients quand au fait de m'emmener.

Angels can't fly down hell. (BAJI KEISUKE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant