Chapitre 11.

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Baji et moi avions commencé à manger avec appétit, alors que je n'arrivais pas à cesser de contempler le magnifique paysage qui s'offrait à mes yeux. Tout était si...parfait. C'était si idéal que cela ne me semblait même pas réel. Et pourtant j'étais bien là, installée aux côtés de ce grand brun aux yeux d'ambre. J'avais sorti mon téléphone pour le poser entre nous deux, le laissant diffuser un peu de musique pour donner un fond à nos conversations. Je sentais mon cœur tambouriner furieusement dans ma poitrine, comme s'il allait littéralement s'en échapper. Non, je n'arriverai définitivement jamais à voir cette soirée comme une simple sortie entre amis. L'atmosphère qui régnait ici était bien plus intense. Je ne savais pas s'il ressentait la même chose, ou bien si j'étais la seule à percevoir cette tension entre nous deux.

Puis après avoir mangé, nous nous sommes allongés, les yeux relevés vers le ciel qui était complètement dégagé. C'était l'une des raisons pour lesquelles j'aimais le moment où nous étions quasiment en été. Les nuits étaient plus douces, et le ciel était clair, nous pouvions y voir les étoiles sans problème, et ça me plaisait beaucoup.
J'avais tourné le regard vers Baji, lui qui avait ses orbes d'ambre rivées sur la voie lactée. Il tendit doucement son index vers le haut, avant de prendre la parole.

- Rym... Elle est où, la grande ourse ?

Sa question me fit sourire, voilà qu'il s'intéressait au ciel. Je rattrapai alors mon téléphone pour le glisser dans la poche ventrale de mon sweat, avant de me rapprocher un peu de lui, nos têtes se retrouvant vraiment l'une à côté de l'autre. Je regardai le ciel quelques instants, avant de me permettre de prendre son poignet pour l'orienter vers la célèbre constellation, en dessinant le contour avec son bras.

- Elle est là. Il y a aussi la Petite Ourse ici, là, il y a Céphée, et là bas... Le Dragon.
- T'es douée pour repérer les étoiles, Rym. En fait, t'es un peu douée en tout. Me disait-il en observant les constellation que j'avais désignées.
- Dis pas n'importe quoi. Avais-je répondu en riant, finissant par lâcher son poignet, pour qu'il évite de le tenir levé trop longtemps. Y'a plein de trucs que je sais pas faire, et que tu fais bien mieux que moi. Regarde, je ne me battrai jamais aussi bien, et je ne pourrai jamais rouler en moto comme ça. Enfin, ça c'est faute de droit, mais quand même.
- C'est vrai, mais je ne sais faire que des choses de brute, tout de ce qui est intellectuel ou dans la minutie, c'est pas pour moi.
- Et alors? Ça ne fait pas de toi quelqu'un de mauvais. Tu es une bonne personne, Baji. Disais-je en détournant mon regard vers lui.

Il s'était automatiquement retourné vers moi, ses grands yeux s'encrant dans les miens. Il me regardait comme s'il était choqué, et j'avouais ne pas comprendre sur le coup.

- Rym, je ne suis pas une bonne personne. Il y a beaucoup trop de choses que tu ne sais pas pour dire ça. Est-ce que les bonnes personnes brulent des voitures?
- Je ne te parle pas de ton comportement, là. Je te parle juste de ton caractère. Certes, brûler des voitures et se battre, c'est pas le modèle de la sagesse, mais au fond, dans ton cœur, tu es bon. Regarde, tu es gentil, avec moi, avec Chifuyu, avec tout le monde. Tu portes secours à des chats et tu souris tout le temps. Je commence à bien te connaître maintenant, je sais que tu es quelqu'un de bien.

Baji fronça légèrement les sourcils, avant de lâcher un long soupir en fermant les yeux.

- Rym, tu comprends pas. Y'a des choses que je ne t'ai pas dites.
- Alors dis-les moi ! Je veux savoir ce qui fait que tu n'es pas quelqu'un de bien. Je suis sure que ce n'est pas grave.

Il échappa un nouveau soupir, avant de replonger ses yeux dans les miens après les avoir de nouveau ouverts. Il semblait si troublé, comme si ce qu'il me cachait était d'une horreur sans nom.
Il prit une grande inspiration, et se mettait à parler, sans me lâcher une seule seconde du regard.

Ses mots glissaient de ses lèvres à une vitesse folle, si bien que j'avais un peu de mal à comprendre certaines tournures de phrases. Mais je captais le principal et c'était le plus important.
J'entendais parler du fameux Mikey, de son frère, et d'un garçon nommé Kazutora. Il me parlait d'anniversaire, de moto et de cambriolage, pour finir sur la notion d'un meurtre. Bien que tout était un incroyable fouillis lorsqu'il parlait, j'arrivais à remettre les choses en ordre. Je comprenais alors qu'il était auteur du meurtre du frère de Mikey, complice de ce mystérieux Kazutora. Je notais aussi qu'il avait répété plusieurs fois que ce n'était pas ce qu'il voulait, que ce n'était pas lui qui avait frappé.

J'avais tout compris, mais il continuait son discours, toujours à cette vitesse fulgurante. Sa voix se brisait un peu plus à chaque mot qu'il prononçait, alors que je voyais ses yeux se border de larmes.
Je glissais doucement l'une de mes mains vers son visage, et j'osais la poser sur l'une de ses joues pour caresser lentement le dessous de son œil. Je ne disais rien sur le coup, je ne savais pas trop quoi dire, mais je voyais qu'il se retenait, qu'il tentait de ne pas craquer alors qu'il était à deux doigts de le faire. C'est alors que je prenais la parole, le coupant dans son triste monologue.

- Baji... si tu veux pleurer, tu peux. Disais-je en lui adressant un regard qui se voulait attentif et préoccupé.

Et il ne se faisait pas prier. Je sentis ses bras s'enrouler autour de ma taille, alors qu'il me tirait un peu plus vers lui. Il enfouissait par la suite sa tête dans mon cou, avant que je ne l'entende fondre en larmes.
Je virai une énième fois au rouge, comme il était coutume de faire lorsque Baji agissait de façon à ce que nous nous retrouvions plus proches.

Je me contentai donc de passer mes bras autour de son cou pour glisser mes doigts dans ses cheveux sombres. Je ne disais rien, et caressais juste ses mèches noires. Je sentais les secousses de son corps, causées par ses pleurs, et ça ne pouvait que me rendre triste à mon tour. Non, voir Baji dans cet état, ce n'était pas quelque chose de commun.

C'est ici que je voyais une nouvelle facette de Baji m'être dévoilée. Il était aussi sensible, il avait un lourd passé et avait sans doute besoin d'en parler. J'étais là maintenant, bien décidée a pouvoir être l'épaule sur laquelle il pourrait s'appuyer et pleurer. Je voulais être présente pour lui, je ne comptais pas le lâcher, jamais je ne comptais le faire, d'ailleurs.

- Allez, sèche tes larmes... Tu vas avoir mal aux yeux après, et tu n'arriveras plus à voir les étoiles. Murmurai-je avant de me faire silencieuse, le seul son se faisant maintenant entendre étant celui de la douce musique qui s'échappait de mon téléphone. Tout était si calme, le monde s'était mis en pause. Il n'y avait plus que nous, et nous seuls. Je ne pensais a rien d'autre qu'à nous deux, nous enlaçant sous ce ciel étoilé après s'être confiés l'un à l'autre.

Et ici, j'en étais bien sure et certaine : Je l'aimais.

Angels can't fly down hell. (BAJI KEISUKE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant