17. Le foyer

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Trois heures plus tard, je quittais silencieusement la maison, mon sac sur le dos.

J'avais entendu que ma mère soit couchée et endormie avant d'agir. Sur la brochure du planning (encore lui !), j'avais trouvé une adresse. Celle d'un centre social qui accueillait les mineures enceintes. Pour souffler un peu. Faire le point. Je serais logée, nourrie. Je pourrais y rencontrer d'autres filles dans mon cas, sans subir les moqueries permanentes d'une Léna ou d'autres petites garces qui n'ont rien vécu dans leur vie. C'était le bon choix.

En plus, c'était tout à fait légal. Mes parents n'auraient rien à y redire. Ce n'était pas une fugue. Je serais en sécurité. Ils ne se feraient pas de souci.

Je voulais juste me retirer, sans faire plus de mal que je n'en avais déjà fait.

Je commençai par appeler le centre sur mon portable pour vérifier qu'ils étaient ouverts cette nuit - sur la brochure, c'était marqué qu'il y avait une permanence 24 heures sur 24, mais on ne sait jamais. Oui, c'était ouvert et une dame, au téléphone, me confirma qu'ils pouvaient m'accueillir tout de suite, si je le souhaitais. Elle m'expliqua où c'était et comment venir. Il y avait un bus de nuit que je pouvais prendre, pas loin de la maison.

Je raccrochai, soulagée. vite, je fourrai des affaires dans mon sac. Quelques fringues, mon iPod, mon portable, un peu de fric, un bouquin. Je n'avais pas besoin de plus. Je faisais le moins de bruit possible pour ne pas réveiller maman et surtout Salomé, qui dormait dans la chambre d'à côté.

Puis je m'installai à mon bureau. Je ne pouvais pas partir comme ça, sans rien dire. Il fallait que je laisse une lettre pour expliquer. Ma mère la trouverait le lendemain matin et ne se ferait pas de souci. Je pris une feuille blanche, un stylo. J'hésitai quelques secondes, puis je me lançai :

Chers parents,

Je préfère partir de la maison pendant quelque temps pour retrouver une certaine tranquillité. Ne m'en voulez pas. Je vais aller dans un foyer pour jeunes filles enceintes dont j'ai trouvé l'adresse sur la brochure du planning familial.

Je ne risque rien et je ne ferai rien de mal. Ne vous faites pas de souci.

Je veux juste me retrouver un peu toute seule, le temps de faire le point.

Je suis désolée. Je vous embrasse fort. Je vous aime.

Clem

Voilà, ça irait très bien comme ça. Les mots étaient sortis tout seuls, à croire que je les retenais depuis longtemps. Je ne pliai pas la lettre. Je la déposai bien en vue sur mon lit, calée dans l'oreiller. Je me mis à la porte et je regardai vers le lit. Ouais, le lendemain matin, quand ma mère viendrait voir dans la chambre, elle ne pouvait pas la rater.

Maintenant, il fallait partir. J'éteignis la lampe de mon bureau. Je vérifiai que tout était en ordre (j'étais pas trop le genre bordélique). Puis je calai mon sac sur mon dos et je marchai vers la porte. Je l'ouvris lentement, en faisant très attention à ne pas la faire grincer. Je tendis l'oreille. Pas un bruit dans la maison. La voie était libre. Je me retournai. Jetai un dernier regard sur ma chambre... Puis je je fermai la lumière et descendis les escaliers sur la pointe des pieds.

Dans l'entrée, je répétai le même manège avec la porte d'entrée. Je la rabattis très doucement, pour la faire claquer le moins possible. J'attendis une minute sur le perron pour voir si je n'avais réveillé personne. Non. Alors vite, je courus à travers le jardin, ouvris et refermai le portail délicatement, puis me retrouvai dans la rue. Je marchai d'un pas rapide vers la station de bus. Il n'y avait pas un chat, dehors. Il devait être 2 heures du matin, un truc comme ça. À vrai dire, je ne me sentais pas trop rassurée.

Clem maman trop tôtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant