La perspective de la fête me remplissait maintenant de terreur. Comme je l'avais si bien dit à mon père, tout le monde allait être là. Et tout le monde savait à présent que j'étais enceinte. Tout le monde allait me regarder avec des yeux bizarres, observer mon ventre en douce, chuchoter derrière mon dos. J'aurais tout donné pour ne pas y aller. Mais Alyzée comptait sur moi. Elle avait insisté pour que je vienne car c'était une question d'honneur selon elle. Ne pas baisser le front. Ne pas fuir.
Ce samedi soir, je le préparai dans ma chambre le plus lentement possible. J'enfilai la robe achetée trois jours avant et qui avait déclenché le scandale. Je la détestais à présent. Mais c'est vrai qu'elle masquait bien mon ventre. Il fallait s'y reprendre à deux fois pour dire que j'avais peut-être pris un peu de poids. Je coiffai mes cheveux, les laissant dégouliner sur mes épaules et dans mon dos. Je me maquillai plus que de coutume, posant des paillettes violettes sur mes paupières. Enfin, je jetai un foulard mauve, transparent, sur mes épaules nues. Et même un petit diadème en faux diamant (un cadeau d'Alyzée) au sommet de ma tête. Je m'étais parée comme une jeune mariée. Mais la mariée était triste. Elle voulait juste ne pas perdre la face devant les autres.
Quand je descendis les escaliers, ma mère m'attendait déjà en bas. Lorsqu'elle me vit apparaître, elle poussa un cri d'admiration.
- Oh comme tu es jolie, ma chérie !
- Pffffhh... maman ! soupirai-je pour la faire taire.
- Mais je te jure... Tiens, viens te voir dans la glace. Elle m'entraîna vers le grand miroir, installé dans l'entrée.
- Regarde ça... je gémis, en plaquant ma robe sur mon ventre.
- Tu es belle comme le jour ! Ça te va bien, tu sais, le vert et le violet.
J'allais soupirer encore, mais le bruit d'un Klaxon dans la rue m'interrompit.
- Il y a Alyzée qui t'attend ! reprit ma mère d'une voix décidée.
Elle me jeta un manteau sur les épaules et me poussa vers la porte. Elle l'ouvrit en grand et s'inclina cérémonieusement :
- Si mademoiselle veut bien se donner la peine de passer !
Je levai les yeux au ciel.
- Bon ciné ! je murmurai.
Elle m'avait dit un peu plus tôt qu'elle irait se faire une toile ce soir-là ; mon père était censé garder Salomé.
- Merci ma chérie. Allez, amuse-toi bien. Passe une bonne soirée !
Je descendis les quelques marches du perron. Le klaxon de la voiture d'Alyzée, stationnée devant le portail, retentit à nouveau.
- Tu viens Clem ? me lança Alyzée, impatiente, debout derrière la voiture.
Mais je n'arrivais plus à avancer. Plantée dans le jardin, j'avais l'impression que mes jambes étaient en coton. Je tremblais de partout.
- Qu'est-ce qui se passe ? me demanda ma mère, en accourant vers moi.
- J'ai pas envie d'aller à cette fête, maman. Je sais ce qui va se passer. J'ai honte...
Ma mère fixa d'un air grave.
- D'abord, tu n'as pas à avoir honte. Et puis chez nous, on porte le menton haut, dit-elle en me soulevant le menton avec son doigt. Et de conclure : Et puis, les cons,tu les emmerdes !
J'esquissai un simulacre de sourire.
- Bisou ! me dit maman en me serrant entre ses bras.
- Bisou !
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Clem maman trop tôt
Teen FictionD'abord, je n'entendis rien. Puis à nouveau, un battement cardiaque. Mais il était différent du premier, plus sourd, et plus rapide aussi, venant des profondeurs. - Oh, putain, c'est quoi ça ? je lâchai, d'une toute petite voix. Le docteur Bertin me...