19. La décision

1K 26 13
                                    

Je me réveillai le lendemain matin de très bonne heure. Il faisait encore noir dehors, mais des oiseaux chantaient dans les arbres à côté de la fenêtre. Un camion poubelle était en train de passer dans la rue.

J'étais encore dans le lit de Mélusine, une main posée sur son ventre. Elle dormait, ses boucles brunes masquant son visage et soulevant régulièrement, au rythme de sa respiration. Je restai comme ça un petit moment. Je me souvenais de la conversation de la veille, c'était comme si en dormant j'y avais réfléchi toute la nuit. Mes idées étaient claires, je trouvais ça scandaleux. Cette fille ne pouvait pas garder son bébé, alors qu'elle le voulait, parce que ses parents n'étaient pas d'accord et qu'elle n'avait pas le choix. C'était horrible. C'était juste... scandaleux, il n'y avait que ce mot qui me venait en tête. Elle l'aurait eu quelques années plus tard, après avoir fini ses études, peut-être avec un mec stable, elle aurait pu le garder. C'était pas le bon timing. Mais parfois, le timing, on n'en a rien à foutre. On s'adapte, c'est tout. C'est la vie, c'est comme ça. On n'a pas tout bien calculé à l'avance et tant mieux, parce que sinon peut-être qu'on s"emmerderait sec. Des parents étaient drôlement cons, à Mélusine. Finalement, c'est vrai, il y a des parents cons. Tout ne ressemblaient pas... à mes parents.

Mais d'ailleurs, pourquoi elle tenait tant à garder son bébé, Mélusine ? La question s'imposa soudain dans mon esprit. Je la regardai encore, avec ses petites jours rondes, son côté poupin. Ce n'était qu'une gamine. Elle avait quinze ans et demi. C'était de la folie. À ce moment-là, le ventre de Mélusine, sur lequel ma main était toujours posée, bougea. Je me figeai. Son bébé était entrain de bouger, de vivre là, à l'intérieur d'elle, c'était un 《p'tit gars》comme elle m'avait dit. Un p'tit gars... J'avais envie de pleurer d'un coup. Son p'tit gars, elle le verrait jamais Mélusine. Il lui serait retiré à la naissance. J'avais lu des trucs sur l'accouchement sous X, ça se passait comme ça. Son p'tit gars, il était là maintenant, en elle, et d'un seul coup, pouf, plus rien. Fini la maman, fini le bébé. Plus rien. Je me mis à chialer. Si elle n'en avait pas voulu de ce bébé, si elle n'en avait rien eu à foutre, ça aurait été différent bien sûr. Mais là, c'était juste horrible. Horrible.

Je me légal discrètement et j'allai me recoucher dans mon lit. Je restai sur le dos, les yeux grands ouverts, regardant devant moi. Regardant rien. Et moi, qu'est-ce que je voulais ? Qu'est-ce que je ressentais au fond ? Je posai la main sur mon ventre. Mon bébé, il ne bougeait pas à ce moment-là. Il dormait, bien tranquille. Il était bien. Et moi aussi, je me sentais pas si mal finalement. Je commençais à m'habituer à tout ça. C'était pas au programme, mais bon. Non, ce n'était pas du tout au programme ! Je fronçai les sourcils. Est-ce que je serais capable de l'aimer, ce bébé ? De m'en occuper ? Ça allait pas mal me perturber ma vie. Les cours, comment j'allais les suivre ? Et les sorties, les virées shopping avec Alyzée ? Est-ce que j'allais en être capable...

J'avais dû m'endormir car, lorsque je rouvris les yeux, il faisait grand jour. Mélusine n'était plus dans la chambre. Je me levai en vitesse, consultai l'heure sur la pendule. 9 h 15 ! J'avais raté lheurr du petit déjeuner. Je me laissai retomber sur le lit avec un soupir de dépit. J'étais affamée ! Dans mon ventre, mon bébé bougea.
Et je m'entendis dire à voix haute, toute seule dans la chambre :《Bah oui, on a faim ! 》

Qu'est-ce qui m'arrivait ? Je le faisais de plus en plus, parler toute seule aux murs. Comme s'il y avait quelqu'un d'autre avec moi dans la pièce.

Oui, il y avait quelqu'un d'autre. Il y avait mon bébé.

C'était à lui que je parlais.

Je lui parlais.

Je fondis en larmes. En fait, je l'aimais.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Dec 25, 2015 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Clem maman trop tôtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant