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Namjoon n'avait pas imaginé ça pour sa vie. Ce n'est pas le chemin qu'il croyait tracé pour lui. Et pourtant le voilà employé permanent de l'Éden, boîte de nuit où les prostitués s'abandonnent au bonheur des clients. Et Park Jimin semble le trouve...
« Il y a des images qui vous tracassent. On croit devenir insensible à toute violence, jusqu'à celle qui devient subitement criarde, insupportable, à vous arracher les yeux. Au choix vous devenez fou, au choix vous vous résigner. Votre conscience coule au fond de votre corps, dans un endroit sombre et épais, inaccessible, dont on s'extirpe difficilement. »
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Namjoon caresse sa peau. L'appartement est calme, à son habitude. L'eau dans l'évier goutte, le murmure de la rue gronde jusqu'à eux, les rideaux ondulent, ombres fantomatiques et rafraichissantes de leur blanc immaculé. Il contemple le plafond.
Non loin Hoseok et Yoongi dorment entrelacer, un même corps pour un sommeil de plomb. D'ici Namjoon ne peut discerner que leurs cheveux sous la couette d'hiver. Lui reste presque nu, une main sur le ventre, dessine quelques formes abstraites. Peut-être de celles qu'il a pu observer au musée d'Art Moderne en compagnie de Jimin. Depuis ce soir, les images de leur premier rendez-vous tournent en boucle dans son esprit.
Ses colocataires croient au bien fait d'avoir revu sa mère. Seul Yoongi, sous ses airs torves, assommé par la drogue censée lui faire oublier la douleur, ne paraît pas si naïf. Dans ces moments où son œil noir et mi-clos se pose sur son visage cadavérique, Namjoon l'esquive. Le non-dit ne cache rien mais il leur permet de fuir encore un peu.
Namjoon ressasse et fantasme les grandes salles blanches, leurs œuvres colorés, immenses et ses statues étirées, des figures décharnées et arrachées de terres, toutes de nickel. Jimin, dans son costume, ne jurait pas. Il avait posé négligemment sa veste sur son bras et ses poses hanchées devant les statues exacerbaient la finesse de sa taille et la générosité de ses fesses. Namjoon avait dû plus d'une fois se flageller mentalement pour ne penser qu'aux œuvres, celles figées, et non pas cet homme désinvolte. Le silence aurait pu être le maitre mot de leur visite, ils déambulaient et seules leurs chaussures couinaient sur le revêtement plastique. Seulement Namjoon n'aimait pas le silence. Il avait allumé son téléphone et tendu l'oreillette de ses écouteurs à Jimin. L'objet n'avait fait qu'accentuer leur proximité et s'était à touche-touche qu'ils avaient poursuivi leur déambulation lyrique.
Namjoon s'était longuement arrêté devant un tableau étrange, à la limite de l'abstrait où d'épaisses méduses remontaient à la surface. Malgré sa musique, le vide des fonds océaniques l'avait englouti. Il ne sait plus ce qu'a fait Jimin ces dix minutes où il restait là, absorbé par ses formes molles et défaites. Elles avaient l'air de toutes chercher à remonter à la surface, éclairées d'un bleu néon artificiel qu'il reconnaissait. Le noir autour s'étirait, opaque et gluant et Namjoon s'était senti à son tour méduse.
