Blackheart

Chapitre XXXVII

Point de vue : Alys.

Un fin et chaud rayon de soleil me tira en douceur du sommeil. Je clignais des yeux plusieurs fois, éblouie, mais je n'avais aucune envie de bouger. La raison de cette langueur : j'étais confortablement installée contre Will, mon visage enfoui dans son cou pour échapper à la luminosité ambiante, le front calé contre sa clavicule. Emprisonnée entre ses bras, je n'avais aucune envie de m'enfuir. Son souffle fin et régulier se perdait dans mes cheveux, me faisant frissonner, et sa chaleur corporelle me réchauffait d'une façon des plus agréables. Je reculai lentement ma tête, mes yeux étant à présent habitués à la clarté amenée par le soleil. Je pus ainsi observer à ma guise celui qui avait volé mon cœur. Son visage endormi était détendu, le faisant presque paraître plus jeune. Ses joues semblaient s'être légèrement creusées depuis la dernière fois où je l'avais vu et cela m'inquiéta malgré moi. Ses cheveux sombres étaient détachés, lui créant comme un oreiller sous sa joue gauche. Mais soudain, un léger courant d'air fit voleter l'une de ses mèches blanches, venant troubler ma contemplation. Avec la plus grande des délicatesse, ce qui n'était pourtant pas ma qualité première, je repoussai ladite mèche rebelle, ce qui me fit effleurer inéluctablement sa joue.

Les yeux de Will papillonnèrent avant de finalement se planter dans mes prunelles bicolores. Je me figeai, perdue dans son regard de jade. Un sourire franc étira ses lèvres, faisant ressortir ses fossettes. Je ne pus que l'imiter.

- Bonjour mi'ach. soufflai-je.

L'incompréhension se dessina sur son visage et ses sourcils se haussèrent.

- Mi'ach ? répéta-t-il, d'une voix rendue plus rauque qu'à l'accoutumée.

Je rougis avant de m'expliquer, balbutiant rapidement :

- C'est un terme du langage des Anciens, il s'agit d'une appellation que l'on ne donne qu'à celui ou celle que...

J'hésitai, ayant une soudaine et incompréhensible difficulté à achever ma phrase.

- A celui ou celle que ?... releva Will, taquin.

Je compris alors qu'il avait globalement deviné la signification de ce mot et qu'il voulait juste me l'entendre dire.

- Ah t'es vraiment pas possible ! bougonnai-je sous ses rires, en me détournant légèrement de lui. 

Mais, saisissant mon menton de ses doigts élancés, il me demanda d'un ton délibérément enjôleur :

- Me pardonneras-tu Milady ?

- Il en faudra beaucoup pour que je t'épargne vil maraud ! répliquai-je, tout en luttant pour ne pas rougir.

- Est-ce que ceci sera suffisant ?

Et il m'embrassa, avec tant de tendresse que je crus fondre, mettant ainsi fin à notre joute verbale. Je répondis au baiser avec passion, passant mes mains dans sa nuque puis dans ses cheveux d'ébène. Ce fut à regret que je quittai ses lèvres par manque de souffle. Je collai mon front contre le sien, la respiration haletante. Nous restâmes ainsi sans bouger un long moment, chacun profitant de la présence de l'autre.

- T'es un tricheur... murmurai-je, un sourire idiot plaqué sur le visage.

- C'est pas de ma faute si tu es folle de moi !...

- Malotru !

- Dévergondée !

- Rustre !

Nous restâmes quelques secondes à nous défier du regard avant que l'hilarité ne nous gagne à nouveau. Une fois notre sérieux à peu près retrouvé, je posai ma main sur sa joue et approchai mes lèvres des siennes. Je sentis son souffle se couper et vis ses pupilles se dilater légèrement.