Blackheart

Chapitre XXIII

Point de vue : Alys.

- Aller ! Plus vite Madame Alys ! s'écriait Miles juché sur mes épaules.

Comment en étais-je arrivée à une situation aussi désespérante ? La réponse est très simple : même la force d'esprit de plusieurs dieux ne suffirait pas pour résister à la bouille si charmante et attendrissante que ce petit m'avait servie pour avoir le privilège, que dis-je, l'honneur de monter sur mes épaules.

Je m'y étais résignée et avait fini par le porter pour son plus grand plaisir.

- Aha ! Qui c'est le capitaine maintenant ?!? me nargua-t-il.

Je pouffai et s'en qu'il ne s'y attende, je le fis dégringoler de son perchoir, m'assurant toutefois que sa chute ne soit pas douloureuse.

- C'est une mutinerie, c'est pas du jeu ! dit-il un air boudeur sur le visage.

N'y tenant plus, j'éclatai de rire. Miles me fixa quelques instants sans rien dire, puis sa moue se transforma rapidement en un grand sourire. Et c'est en continuant de se chamailler que l'on arriva à l'entrée de la simple bâtisse qui servait de logis au petit garçon et à sa mère. Devant cette façade ne payant pas de mine, je ne pus m'empêcher de remettre en cause les dires du garçon que Miles fuyait. Comment diable Amber pouvait-elle cacher de l'argent chez elle ? Cette réflexion ne me quitta pas lorsque je vis Mme Eade sortir de la maison, un air fatigué peint sur le visage, camouflant l'étincelle qui aurait dû rendre ses yeux plus brillants. Ces derniers passèrent toutefois du gris terne à un presque reflet argenté en voyant son fils. Elle se rapprocha de nous doucement, un léger sourire sur les lèvres.

- Bonjour Alys ! Que fais-tu là ? Très joli chapeau. finit-elle de me saluer.

- Votre fils m'a percuté pour finalement se servir de moi comme bouclier contre un bande de gamins. expliquai-je, une fine note d'ironie dans la voix.

- Hey ! C'est même pas vrai ! L'écoute pas Maman ! C'est moi qu'a volé à son secours !

- Je n'en doute pas mon grand....

A ces mots, Amber tapota gentiment la tête de son fils, qui sourit à ce compliment voilé.

- Viens donc te réchauffer à la maison, je te dois bien ça. me lança Amber.

Je la suivis après quelques hésitations, entrant dans la modeste demeure. Une forte odeur de thé assaillit presque immédiatement mes narines tandis je franchissais le pas de la porte.

- Tu tombes au point nommé, je préparais justement une infusion. me confia la mère de Miles, l'air fort heureuse que je partage ladite boisson avec elle.

Je pris finalement place dans l'un des grands fauteuils orangés placés autour d'une sommaire table de bois. Mon regard dériva sur l'entièreté de la pièce. Celle-ci, bien qu'exiguë, était très accueillante grâce au maigre feu ronflant dans l'âtre et par sa décoration si simple et pourtant que l'on pourrait presque qualifier de raffinée en s'attardant sur certains bibelots la composant. Je retirais doucement mon couvre-chef lorsque je me sentie épiée. Je tournai la tête, croisant le regard interrogatif de Miles.

- Qu'y a-t-il ? lui demandai-je suite à son regard insistant.

Le petit garçon prit quelques minutes avant de me répondre, moment de silence interrompu seulement par le sifflement continu de la bouilloire dont Amber s'occupait.

- Pourquoi t'as une cicatrice là ?

Il pointa ensuite du doigt l'entaille défigurant mon oeil.

La première réflexion qui me vint à l'esprit fut que ce petit posait toujours les bonnes questions. En effet, pourquoi diable avais-je cette empreinte d'une blessure ancienne. Je fermais les yeux, m'évertuant à me remémorer mon passé confus mais rien.