Chapitre X

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Point de vue : Xavier.

« Ton monde est bien triste alors... ». Cette réflexion tournait en boucle dans ma tête. Elle n'avait pas eu tort en me disant cela mais elle m'avait regardé avec une telle pitié dans les yeux que cela m'avait touché plus que je ne l'aurais cru. « Ton monde est bien triste alors... ». Oui ce monde était triste mais que pouvions-nous faire pour le changer ?

En réfléchissant, je n'avais pas remarqué que mes pas m'avaient emmenés machinalement vers la porte. Ce fût Estrella qui me tira de cet état second :

« - Xavier ? Que fais-tu ? »

Je repris mes esprits et la regardai sans comprendre, puis un besoin d'espace me tirailla et je lui répondis :

« - Je vais aller prendre l'air. Je reviendrai dans une ou deux heures. »

Elle hocha la tête me faisant signe qu'elle comprenait mais je remarquai un mélange d'inquiétude et d'étonnement sur son visage. Elle reprit toutefois contenance et quitta la pièce. Une fois seul, je pris mon long manteau bleu foncé usé jusqu'à la corde, l'enfilai et sortis.

Arrivé à l'extérieur, je pris une grande bouffée d'air. Plusieurs odeurs arrivèrent à mon nez simultanément : certaines me donnaient envie de continuer mon chemin tandis que d'autres, au contraire semblaient me conseiller d'elles-même de décamper... C'est impressionnant de voir combien quelques petits détails infimes peuvent nous renseigner sur notre environnement.

Je quittai donc la dalle surélevée qui servait de pas à la porte, et continuai mon chemin vers la ville et son bourdonnement bruyant incessant.

Cette ville, je l'aimais bien, quoi que l'on puisse en dire. Pour beaucoup, elle était synonyme de progrès, mais pour d'autres, au contraire, elle était le signe d'un retour en arrière flagrant par rapport aux technologies que pouvaient posséder les Anciens. 

J'étais partagé entre ces deux visions de la cité. Ses tours qui semblaient d'or face au Soleil, reflet de l'incroyable savoir-faire (ou vanité) des hommes, ainsi que ces engins des plus fantastiques (regroupant humanoïdes ou bien moyens de transport) se pavanants dans les rues et sans oublier cette impressionnante variété d'êtres de chairs, bien que certains ne ressemblent pas vraiment à des humains, tant leur apparence fût modifiée. Tout cela montrait très concrètement l'essor dont cet endroit profitait, mais malgré tout, plusieurs ombres jouaient sur ce tableau "idyllique".

Et ces ombres, la Fille me les avaient jetées en plein visage avec son regard mi-accusateur, mi-peiné. Depuis cet entrevue, cela ne cessait de me tourmenter.

Je relevai la tête, essayant de prendre conscience de jusqu'où ma déambulation m'avait mené : un reflet éclatant attira immédiatement mes pupilles. Thaddeus. Ou plutôt une immense statue de Thaddeus me faisait face.

Je pris quelques instants pour la regarder, regarder l'homme qu'elle était censé représenter. Je devais bien avouer que le sculpteur avait fait un beau travail : on aurait pu croire que notre "cher" Empereur était présent face de nous, si seulement l'oeuvre ne faisait pas 3m50 de haut. Sinon tous les détails y étaient : allant de son regard imposant, jusqu'à son indéniable prestance.

Je soupirai : je détestais cet homme et pourtant, quelque part, je ne pouvais m'empêcher de l'admirer, et c'était extrêmement frustrant... 

Soudain des bruits que j'avais appris à craindre et à fuir me sortirent brusquement de mes réflexions. Ces pas cadencés que des armures d'acier mettaient en évidence, le claquement sec de leurs longs manteaux dans le vent, ces respirations rendues rauques et inégales par de lourds masques protégeant du sable mais aussi des gaz (gaz lancés par ces hommes en question le plus souvent), ainsi que le bruit caractéristique de leurs armes à canons énergétiques. Pas de doutes, il s'agissait de la Garde.

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