Il avait murmuré ses dernières paroles, comme pour lui-même. Étrangement, personne n'entendit sa dernière remarque. À croire que mes oreilles pouvaient capter tous les petits bruits inutiles et blessants de la vie. Je fis comme si je n'avais pas entendu pendant que le cours continuait.
-Donc, tu peux aller t'asseoir où tu veux entre les 4 places restantes. Soit à côté de Laury, de William, de Maxime ou de... de l'autre, dit-il en me pointant.
J'entendis ses pas résonner, de plus en plus fort, puis j'entendis un bruit de chaise à côté de moi. Surprise, je me retournai et vis qu'il s'était assis au bureau à ma droite. La classe se mit à murmurer de partout, mais le prof les arrêta pour commencer la matière, même s'il était aussi étonné du choix de Jonathan que les autres. Le cours commença, comme de coutume. À la moitié du cours, je sentis quelqu'un me toucher le bras. Surprise, je me retournai vivement pour y découvrir Jonathan qui me donnait un morceau de papier. Je penchai ma tête sur le côté, ne comprenant rien à ce qu'il voulait. Il sourit et mima quelqu'un qui ouvrait le morceau de papier. Ce que je fis avec un peu de méfiance. À l'intérieur était écrit quelque chose. J'eus beau me forcer à décoder, j'en fus incapable. On ne m'avait jamais appris à lire. Jonathan le remarqua et regarda de droite à gauche pour vérifier que personne ne regardait.
-Quel est ton nom ? murmura-t-il.
Je secouai la tête.
-Je n'ai pas de nom, murmurai-je à mon tour.
Il parut surpris par ma réponse.
-Comment peux-tu ne pas avoir de nom ? m'interrogea-t-il. Comment les gens t'appellent-ils ?
Je baissai la tête.
-Monstre et démon sont mes noms les plus courant alors, lui répondis-je avant de lui faire signe de se taire, parce que nous commencions à attirer l'attention. Jonathan comprit le message, même si je vis qu'il brûlait d'envie de me poser d'autres questions. Le cours continua sans embûche jusqu'à 10h. Alors que nous nous dirigions vers l'autre salle, celle d'entrainement, Jonathan s'approcha de moi pour me parler, mais Vincent le devança. Il me frappa à l'épaule puis me regarda méchamment.
-Je serai ton adversaire aujourd'hui, pour venger le commentaire que tu as sorti à ma petite copine !
Je ne savais pas si j'étais gonflée à bloc pour lui mettre la raclée de sa vie ou si j'avais juste envie de me mettre en boule et pleurer. Vincent ne retenait pas ses coups, et comparé à moi, il était très fort. Évidemment, il avait pratiquement le double de mon âge, ce qui ne m'aidait en rien. Mais en plus, il était le plus fort physiquement de l'école, même plus fort que le professeur. Je m'y étais cependant un peu habitué, puisque je me battais tous les jours contre les Grands. Ils se donnaient des défis pour savoir qui serait capable de me battre. D'un certain côté, je ne pouvais pas m'en plaindre, puisque si je ne les combattais pas, je me battrais probablement contre le prof qui ne m'aimait guère davantage. Donc, dans le pire des cas, je ne ferais rien de mes journées. Le côté positif de tout cela, c'était qu'à force de combattre plus fort que soi, j'avais développé des stratégies et avais amélioré mon agilité. Pendant que je me plaçai en position de combat, je réalisai que de tous les Grands, je n'avais jamais combattu contre Léo, 14 ans. Il était toujours neutre et ne se dépassait que très rarement. En regardant autour de moi, je remarquai qu'il faisait partie des personnes absentes ce jour-là. Jonathan s'était mis avec Dave, 11 ans, et était tous deux en position de combat. Je plissai les yeux. Je ne savais pas qu'il y avait des écoles de combat en ville. La position de combat de Jonathan était parfaite. Le professeur s'apprêtait à donner le signal, alors je me focalisai sur Vincent pour le découvrir à moins de 30 centimètres de moi. Je l'évitai de justesse et je levai les yeux au ciel. C'était une autre chose que j'appréciais plus ou moins chez Vincent. Il partait toujours avec son signal imaginaire. Je parai son attaque et fis tournoyer mon épée pour contre-attaquer, chose qu'il bloqua à son tour. Il fonça sur moi, l'épée utilisée de la même manière qu'une lance, comme s'il voulait m'embrocher. En fait, ce n'était pas vraiment une impression, c'était la réalité. Son côté « grosse brute » le rendait parfois un peu trop prévisible. Je fis un léger saut en arrière puis j'esquivai son attaque pour ensuite le frapper du plat de ma lame derrière la tête. Choqué, il se retourna et comprit que ses méthodes grossières ne fonctionneraient pas sur moi. Il fit alors tournoyer son épée comme une hélice, de sorte que je ne puisse aucunement l'attaquer sans le regretter amèrement. Je croisai le regard du professeur, curieux de savoir comment j'allais choisir de réagir vis-à-vis de la judicieuse stratégie de Vincent. J'analysai donc en vitesse. Si je répliquais son attaque, ce serait le plus faible qui prendrait le coup, moi dans le cas présent. Si je lui fais une jambette, alors Vincent pourrait descendre son attaque et je risquais de me faire frapper la jambe par son épée, ce qui reviendrait à perdre ma jambe dans un vrai combat. Puis soudain, une idée me vint à l'esprit, même si elle me parut farfelue. Je commençai à courir en direction de Vincent à la grande surprise du professeur et de celui-ci, même si ce dernier ne parut pas s'en plaindre. Dans son excitement, Vincent arrêta le tournoiement de son épée pour la positionner en lance. Je souris face aux actions prévisibles de Vincent et alors qu'il s'apprêtait à m'embrocher, je sautai par-dessus lui avec tout l'élan que j'avais accumulé puis je le frappai encore une fois derrière la tête. Énervé de s'être ainsi fait duper, le reste de ses attaques fut facile à éviter et à contrer. Le professeur annonça enfin la pause du dîner. Je partis sans demander mon reste, voyant à quel point j'avais mis Vincent en rogne. Comme à l'habitude, les élèves prirent leur sac et partir en direction de la salle à manger pour le dîner. De mon côté, je partis à l'extérieur pour rejoindre ma cachette habituelle. Je grimpai dans un arbre situé juste à côté de l'école, y montai le plus haut possible puis sautai sur le toit de l'édifice. J'allai par la suite ouvrir une petite trappe qui menait à un grenier, et je me glissai à l'intérieur. J'avais un peu aménagé l'endroit et l'avais nettoyé du mieux que je pouvais. C'était ma cachette à moi, mon lieu secret. Personne ne l'avait découvert ou ne savait que je venais ici sur l'heure du dîner. Je me dirigeai tranquillement vers une seconde trappe située au milieu de la pièce qui donnait sur la cafeteria et l'entrouvris. D'ici, j'observais tout le monde manger et discuter. Je les enviais tellement !!! D'après ce que j'entendais de leurs discussions, ils déjeunaient, dînaient et soupaient ! Et il ne se faisait pas gronder parce qu'ils mangeaient, même qu'au contraire, certains parents grondaient leur enfant lorsque ceux-ci ne voulaient pas s'alimenter avant de se rendre à l'école. Certains parents préparaient des lunchs à leur enfant pour l'heure du dîner, d'autres avaient le droit de se faire eux-mêmes leur lunch. Et puis, même sans parler nourriture, ils étaient chanceux. Ils avaient pour certain des frères et sœurs, et même s'ils n'arrêtaient pas de les insulter en les traitant de petits monstres parce qu'ils les trouvaient agaçants, j'étais persuadé qu'ils les appréciaient. Je n'ai malheureusement pas eu la chance d'avoir un grand frère ou une grande sœur. Je regardai la table des Grands par réflexe. De toute évidence, Vincent ne s'était pas encore remis de la petite humiliation que je lui avais infligée en le battant à plate couture. Il ruminait et m'attribuait toute sorte de noms, disant que j'avais triché. Personnellement, je m'étais toujours demandé comment l'on pouvait tricher dans un combat, puisque le but recherché était de survive. Il n'y a pas de règle pour survive, seuls les plus forts et les plus rusés gagnent, mais bon. Isabelle essayait de le consoler en lui disant qu'il n'avait qu'à se reprendre. Elle se pencha vers lui et lui chuchota quelque chose que je ne pus comprendre. Le visage de Vincent s'illumina et il se pencha sur la table pour faire part de l'idée de sa copine à tout le groupe. N'entendant rien, j'enlevai mon foulard, ce qui n'aida guère. Soudain, un petit rassemblement attira mon attention. Tous les Petits et les Moyens s'étaient réunis autour de Jonathan. Intriguée, je tendis l'oreille. Ce Jonathan m'intriguait de plus en plus.
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Lounata et la confrérie du Phénix
FantasyUne jeune fille de 8 ans est rejeté par le monde entier à cause d'une certaine particularité: elle a des oreilles de loup. Enfin, elle croit que c'est la raison puisqu'elle découvrira bientôt qu'un secret impitoyable l'entour... secret qui changera...