𝑃𝑟𝑜𝑙𝑜𝑔𝑢𝑒

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Saut dans le futur


Amérique du Nord, États-Unis



Heure indéterminée



Je me réveille tout doucement avec des douleurs dont je ne saurais définir l'origine, la route est déserte du moins du côté de mon champ de vision. Les douleurs sont encore trop présentes pour que je ne puisse bouger ou même tourner la tête, je suis immobile comme si j'étais paralysée. La nuit est tombée, m'obligeant à ouvrir davantage mes yeux pour bien vérifier si je suis seule. Ce qui est le cas après vérification.

Allongée sur ce bitume froid, humide et enneigé, j'observe les flocons de neiges tomber peu à peu sur mon visage sans pouvoir les éviter. New-York a déjà enfilé son grand manteau blanc. L'hiver new-yorkais, c'est quelque chose. Je mourrais pour avoir un manteau en fourrure à cet instant présent.

Je crois percevoir les sirènes de police et de pompier, quand mes doigts effleurent les morceaux de verre de la vitre de la voiture. M'entaillant la peau d'un doigt et enclenchant une coulée de sang, qui se verse à flot sur la neige, se mélangeant à celui provenant des autres parties de mon corps.

Je ne sais pas si c'est le froid qui m'empêche de ressentir la moindre douleur, ou si c'est parce que je suis en train de perdre connaissance. Je vais probablement mourir d'hypothermie, et même si je ne ressens aucune douleur, je sens les bouts de verres qui se sont incrustés sur mon visage. Je tente de me lever, mais la seule chose que je réussis à faire, c'est de percevoir un instant le pare-brise par lequel je suis passée, être imbibé de mon sang là où se trouve un grand trou.

Les phares de ma voiture ont beau être allumé, je ne saurais dire si le capot est d'origine rouge ou si c'est juste mon sang qui le recouvre. À quelques mètres, j'aperçois ce qu'il semble être une de mes chaussures.

Je sens la mort m'envelopper, je vois cette lumière au loin. Celle qu'on voit dans les films lorsque que l'on meurt et que l'on est prêt à quitter ce bas monde. Je ne saurai dire si je le suis. Cependant, mon corps paraît l'être, je me sens partir.

J'ai une sensation de légèreté. Comme si j'étais une plume qui pouvait voler. J'ai l'impression de voler tellement haut que je me vois étendue sur le sol enneigé devenu rouge. Pour la première fois, je me vois autrement qu'à travers un miroir ou une photo. Je n'arrive pas à me reconnaître, tous les débris de verres et le sang m'empêche de distinguer chaque partie de mon visage.

Au pied, je n'ai qu'une chaussure, l'autre pied n'ayant comme protection qu'une chaussette blanche comme tous mes autres vêtements. Enfin, ils l'étaient avant que mon sang ne se déverse. Quelle idée de ma part aussi de m'être habillée en blanc. Si j'avais su en me réveillant et en m'habillant ce matin, j'aurais mis du rouge. À mon enterrement, dans le cas où j'en aurais un, j'aimerais que les gens portent cette couleur. Pas de noir, c'est trop triste, ça évoque la mort. Alors que le rouge ça évoque l'amour, la vengeance, la passion et le pouvoir.

Certains disent que quand on meurt, on voit des membres de notre famille décédée. J'espère que c'est vrai, ça expliquerait pourquoi je vois ma défunte grand-mère. Elle ressemble à un ange, si j'étais une sainte et une grande croyante, je dirais que c'est mon ange gardien prête à m'accueillir au paradis. Mais je suis loin d'être un ange, je sais que je n'irai pas. Vous pouvez garder vos jugements pour vous, que celui qui n'a jamais pêché jette la première pierre comme on dit.

Je sens mon âme revenir peu à peu dans mon enveloppe charnelle et rouvre avec difficulté mes yeux, que j'avais auparavant fermés. Une femme se trouve au-dessus de moi, elle est entourée d'autres gens, suivis des ambulanciers. Ils gesticulent dans tous les sens, leurs bouches suivent leurs mouvements, toutefois, je n'arrive pas à les entendre parler.

La rencontre de ma tête avec le sol a dû provoquer un choc, ce qui a endommagé mon ouïe, même parler, je ne saurais pas comment le faire. Dans un geste maladroit, l'un des ambulanciers cogne ma tête contre la portière de l'ambulance, ce qui m'arrache un cri à peine audible. Puis comme si ce n'était pas assez, il me dépose brutalement sur le brancard. Il me parle tout en refermant les portières, j'arrive à lire sur ses lèvres un « Vous m'entendez ? » Et comme si ses mots commandités automatiquement mon cerveau, j'arrive à entendre peu à peu sa voix.

— Mademoiselle, restez avec moi, je vous en prie, dans quelques minutes, vous serez prise en charge par l'hôpital le plus proche. Il faut que vous restiez consciente, vous venez de faire un accident. Votre voiture a été vue percutée par une autre voiture qui a pris la fuite. Tandis que vous, vous avez foncé dans un arbre.

Il vérifie mes pupilles que je devine dilatée, à l'aide d'une lampe torche.

— Ross, arrête ton monologue, tu vois bien qu'elle n'est pas en état de comprendre quoi que ce soit, dit la femme qui part s'installer au volant.

Elle ressemble étrangement à la femme que j'ai vue il y a quelques minutes au-dessus de moi.

— Merci Rachel, je suis au courant, mais on ne sait jamais si elle peut m'entendre. Et le......, dit-il avant que je ne l'entende de loin. Merde son pouls descend, on va la perdre. Accélère, je ne pense pas qu'elle tiendra jusqu'à l'hôpital !! hurle-t-il en sortant un défibrillateur.

Je ne me souviens pas avoir été percutée par une voiture, ni d'avoir fini dans un arbre. La seule chose dont je me souviens, c'est l'horrible douleur que j'ai ressentie quand mon corps a été propulsé en avant de la voiture. Je comprends mieux l'intérêt de mettre une ceinture, je regretterais presque de ne pas l'avoir mise.

Pour la première fois de ma vie, j'ai cette sensation de liberté, je me sens libre d'avoir enfin le choix de me laisser mourir ou de me battre pour survivre. Je ne veux pas revenir, je vois ma vie défiler devant mes yeux. Je revois tous les moments forts de ma vie et le bilan est catastrophique, quelle triste vie, j'ai eu. Aveuglé par la vengeance, on m'a fait du mal et aveuglé par la mienne, j'ai fait du mal en retour.

J'ai plein de regret, le plus grand. C'est de n'avoir jamais pu être moi-même. Au moment de mourir, on remet tout en question, nos actions et nous-même.

Le bonheur est dans les choses simples, il n'est pas dans le passé, ni dans demain, mais dans aujourd'hui, maintenant. L'Homme ne peut dire s'il a été heureux qu'au moment de sa mort, alors si on me demande. Je dirais que oui, en un sens, je l'étais, sauf que je m'en rends compte seulement à présent.

J'ai causé ma propre perte et creusé ma propre tombe, à être autant avide de pouvoir. Trop de pouvoir tue le pouvoir. Ma mort est la conséquence de mes choix et des leurs.

On m'a tué pour ça, mon accident n'en était peut-être pas un ou peut-être que si. Mais peu importe, s'il y a bien un moment où il faut que j'apprenne à passer à autre chose. C'est bien maintenant. Néanmoins, même au seuil de la mort, je n'arrive pas à faire table rase.

« La vie sur cette terre est souvent synonyme de douleur et de vacuité... Tant qu'il existera des vainqueurs, il existera des vaincus, c'est donc au nom de l'amour que l'on engendre la haine. Ces concepts semblent si opposés, mais ils sont intrinsèquement liés qu'on ne peut les séparer... On est persuadé d'agir pour la bonne cause, mais toutes les lumières comportent une part d'ombre. Il n'y a pas d'exception à la règle. » (- Madara Uchiwa)

Naruto, c'est plus qu'un animé, c'est une leçon de vie. Passion ou Pouvoir, tel est mon Nindô. Ma devise, ou plutôt était. Parce qu'au final tout ce qui reste ce ni de la passion, ni du pouvoir. Mais une immense souffrance et un sentiment de vide.

Et un jour, on se rend compte que la vie n'est pas celle que l'on croit et que ce en quoi on aspire n'est peut-être pas fait pour nous.

Avant, je ne comprenais pas les méchants. Jusqu'à en devenir une.

— * I put my trust in you my Lord * (Je place ma confiance en toi mon seigneur), dis-je faiblement dans un dernier soupir.

Ce sont là mes dernières paroles.

— Heure du décès : 19 h 12, annonce Ross en me fermant les yeux.

In my end is my beginning - Mary Queen of Scots (*En ma fin gît mon commencement - Marie Reine d'Écosse).

Bien sûr, l'histoire ne s'arrête pas là. Elle ne fait que commencer. 

Ma vie se stoppe ici, en revanche pas mon histoire. Découvrez là et jugez si j'étais la gentille ou la méchante de ma propre histoire.

|| PASSION OU POUVOIR || [T1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant