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Pendant que les minutes défilaient, j'en profitai pour ne rien faire, car je dois avouer que hormis mes heures de sommeil, je n'ai pas eu un moment à moi. Je patientai donc indifféremment l'arrivée de Yeonjun. Lorsque j'entendis sonner à la porte, je ne fis même pas l'effort de sortir de ma couette. Après une bonne minute d'attente, mon colocataire s'en chargea à ma place puis m'appela afin de leur tenir compagnie. Je sortis alors de ma chambre en grognant, ma couverture sur le dos. Beomgyu ne se retint pas de soupirer à haute voix en étant témoin de mon comportement immature.

« Désolé, il a visiblement décidé de jouer un prépubère en pleine crise d'ado, s'excusa mon colocataire auprès de Yeonjun.

- Je suis simplement fatigué, rétorquai-je sèchement, trop fatigué pour développer la raison de mon attitude.

- Je peux repasser demain si vous préférez, proposa le plus âgé, confus d'arriver à l'improviste. »

Beomgyu refusa immédiatement et lui assura que sa présence ne dérangeait personne. À condition que j'y mette du mien en faisant preuve de sympathie. En comprenant que la situation risquait de stagner s'il ne réagissait pas, mon collègue décida de me prendre à part un moment pendant que Beomgyu, lui, préparait à manger (une première, soit dit en passant). Je lui proposai alors de nous rendre sur mon fameux balcon afin de ne pas être écouté par une certaine énergumène dont je ne citerai pas le nom.

« Je tenais à m'excuser pour tout à l'heure, commença-t-il, après avoir laissé un long blanc durant lequel il cherchait mon regard que j'évitais à tout prix.

- C'est rien, le rassurai-je d'une voix toujours aussi froide.

- Si au contraire, me contredit-il instantanément. J'ai réagi de la façon la plus stupide qui soit et le pire, c'est que je ne le pensais même pas. »

Jusqu'ici, je n'étais pas franchement intéressé et encore moins enjoué d'entretenir cette conversation, mais cette entrée en matière me donna déjà plus envie de poursuivre celle-ci et de voir où cela pourrait nous mener. Je n'ajoutai pas quoi que ce soit mais lui montrai que j'étais toutefois plus ouvert à l'idée de l'écouter. Au fond, je me sentais mal de devoir le pousser à s'excuser, tout ça parce que j'étais vexé. J'avais l'impression de replonger en maternel. J'essayais donc de me dédouaner en me persuadant que je ne réagissais pas ainsi sans raison, et qu'il devait sûrement être important pour que ça me touche négativement.

« J'ai dit ça parce que je voulais pas paraître trop niais. Du coup, j'ai sorti ce qui m'est venu mais ça n'était pas vraiment ce que je voulais dire, m'avoua-t-il tout en plongeant son regard sur la rue mouvementée face à nous. Ma mère m'a dit une fois : « C'est plutôt rare de rencontrer quelqu'un, et de sentir que tout change. » Je n'avais jamais compris le sens de cette phrase, avant de te rencontrer. Voilà ce que j'aurais dû dire au moment où tu m'as demandé la raison pour laquelle je ne me suis jamais éloigné de toi. C'est vrai que le boulot a aidé à ce qu'on ne se perde pas de vue mais je pense que quand tu vas devoir partir, je serai perdu. »

Vous assistez à l'instant de ma vie où je me suis senti le plus con. Je ne savais même pas quoi répondre, tellement touché d'entendre que j'étais important pour lui. Mais le plus surprenant, c'était d'apprendre que j'ai eu cet effet aussi intense à son égard en le rencontrant. Comment lui dire que c'était réciproque ? Ma gorge se noua rien qu'à l'idée d'imaginer ce que je lui dirais. Pourtant, je voyais bien que notre amitié avait atteint un stade plus profond que la plupart des gens que je rencontrais habituellement. La veille, il m'avait confié avoir obtenu le rôle principal dans une pièce et la nouvelle me combla évidemment de joie pour lui, à tel point que je l'avais serré dans mes bras en guise de félicitations.

all too (un)well ♡ yeonbinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant