CHAPITRE V : LES RIVAUX

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 L'idée de rester toute la journée seule dans son lit déprimait Cadine

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L'idée de rester toute la journée seule dans son lit déprimait Cadine. Maho l'avait donc installée sur un fauteuil, dans la salle du restaurant, avec un tabouret pour y délasser ses jambes. Il avait descendu de leur chambre une table de chevet, sur laquelle il lui avait déposé une pile de livres qu'elle avait empruntés à la bibliothèque ainsi que son précieux cahier de compte.

La jeune aubergiste se plongea dans le dernier ouvrage d'un de ses auteurs préférés : Meurig Pembroke, le secrétaire personnel de la reine. Il publiait des manuels de droits, de comptabilité et de gestions, destinés aux étudiants d'Edenfort. Pour Cadine, ces livres se révélaient aussi passionnants que le plus palpitant des romans.

Discrètement, Maho lui apporta une tasse de jus de pomme qu'il avait chauffé avec un mélange d'épices et de plantes aromatiques. Il s'apprêta à retourner dans la cuisine quand sa femme l'interpella :

— Quelque chose me chiffonne depuis que je me suis levée.

Elle posa l'ouvrage sur ses genoux.

— Ce n'est pas ton genre d'être autant agacé à cause d'un morceau de viande...

Maho pensait naïvement être parvenu à clore brillamment leur conversation de la veille, quand il lui avait raconté comment Briac lui avait soufflé le cochon de lait. Bien évidemment, il avait pris soin d'omettre la discussion qui en avait suivi autour du concours. Peut-être s'était-elle encore sentie perturbée par les événements de la journée, ou était-elle trop pressée de se réconcilier sur l'oreiller, mais la jeune femme avait paru satisfaite par cette justification. Maho aurait dû se douter que son épouse était du genre à se repasser en boucle leurs échanges jusqu'à mettre le doigt sur l'élément qui la chagrinait. Malgré le frisson désagréable qui lui parcourut l'échine, le cuisinier retrouva de la contenance et répondit avec aplomb :

— Oui, mais c'était vraiment un très beau porcelet.

— Je le confirme, s'exclama une voix derrière eux. En plus, ce n'est pas pour me vanter, mais il était délicieux !

Maho et Cadine se retournèrent, interloqués. Adossé à l'entrée de l'auberge, Briac se tenait là, avec son sourire charmeur habituel et une bouteille à la main.

— Ne me dis pas que tu es venu pour nous narguer ? s'irrita Maho.

— Moi ? Narguer mon rival pour lui avoir escamoté une viande d'une qualité supérieure, avec classe et talent ? se vexa faussement le bellâtre. Tu as absolument raison, ce serait bien mon genre, mais ensuite, j'arrive toujours avec une bonne bouteille pour me faire pardonner.

— Ce n'est pas très gentil pour moi qui ne peux pas boire d'alcool... fit semblant de s'indigner Cadine.

— Pour qui me prenez-vous, madame Branne ?

À ces mots, il réalisa une révérence et sortit de son sac un pétillant de pomme.

— Je n'oublie jamais une jolie dame...

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