CHAPITRE VII : TORTOISE

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 Le bruit de la mer et l'odeur humide de moisissure contraignit Maho à émerger de son sommeil

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Le bruit de la mer et l'odeur humide de moisissure contraignit Maho à émerger de son sommeil. Il se recroquevilla en frissonnant au contact des relents glacials et serra encore plus fort ses paupières. En se concentrant bien, il finirait par se réveiller auprès de Cadine. Elle se blottirait contre lui pour lui signifier que tout irait bien. Il devait porter toute son attention sur la chaleur de ses bras merveilleusement potelés et sur la petite boule qui se promenait sous la peau de son ventre.

Des pattes d'insecte se déplacèrent sur sa joue. Horrifié, il se la frotta frénétiquement et ouvrit les yeux. La vision d'une paroi de pierres fissurées le ramena à la réalité. Le cuisinier s'assit sur son lit. Il se trouvait face à un autre couchage vide. Un grand portail de barreaux donnait sur une salle simplement meublée d'une table sur laquelle trônait un étalage d'outils et de bric-à-brac. Aucun doute n'était permis sur le lieu où il résidait désormais.

Il se souvint vaguement de la voix d'un chevalier expliquer qu'il resterait dans cette cellule isolée en attendant son procès. Cela ne serait qu'une affaire d'un ou deux jours.

Quelqu'un avait-il prévenu Cadine ? L'angoisse l'étreignit : l'édivre avait bien insisté pour qu'elle se préservât de toutes formes de stress.

Puis les récents événements se bousculèrent dans son crâne dans une boucle infernale : le cadavre de Prevel qui le fixait de ses yeux vides, les hurlements de rage et de douleur de Rohan, ainsi que son arrivée à Tortoise. Jamais il n'aurait imaginé se retrouver un jour sur cette île carcérale, au large du Draluire, un bras de mer qui séparait le royaume du Valême avec celui de l'Estraria. Des tressautements incontrôlables le saisirent et un torrent de larmes mouilla ses joues.

Le cliquetis d'une serrure le sortit de ses sombres pensées. Quelqu'un venait de pénétrer dans la pièce face à sa cellule. Ce qu'il aperçut à travers les barreaux lui provoqua un haut-le-cœur. Cette fois, ses tremblements ne furent pas dus aux pleurs, mais à la terreur qui le submergea.

Son geôlier ne devait pas dépasser le mètre trente. Sa peau mate, sa barbe noire broussailleuse et ses oreilles en pointes ne laissaient aucun doute sur sa nature : un gnome. Il entra en sifflotant et transportait un plateau sur lequel était disposé un bol de porridge. Il s'arrêta un instant lorsqu'il remarqua que Maho était réveillé. Le jeune homme se recroquevilla un peu plus.

— Alors, p'tit gars, t'as enfin fini de roupiller ? s'exclama la créature.

Le cuisinier ne répondit rien. Même s'il l'avait voulu, sa gorge se serrait tellement qu'aucun son n'en serait sorti. Le gnome resta un instant à l'observer, puis poursuivit :

— Oui, oui, je sais : se réveiller dans un endroit pareil, c'est assez déprimant.

Il lui glissa le repas à travers une ouverture prévue à cet effet.

— Allez, encore une journée à tenir. En attendant, tu dois prendre des forces pour ton procès. Essaie de manger un peu.

Mais le geôlier ne reçut aucune réponse.

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