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Il faisait encore nuit. Julia se décida à se lever du lit enfin. Elle n'avait presque pas fermé l'oeil.

À sa grande déception, le docteur Figaro ne lui avait pas donné son feu vert quant à son intention de prendre des somnifères, comme quoi l'insomnie pendant la grossesse se manifestait principalement durant le premier et le troisième trimestre. Il n'y avait pas moyen de trop s'inquiéter. Il lui avait fait des recommandations et lui a ordonné de prendre des tisanes avec tempérance. Ce qu'elle n'avait pas encore fait.

Julia avait cru entendre Anthony parler à ses oreilles. Ses paroles ne cessaient de s'entrechoquer dans sa tête en une sarabande folle. Celle-ci luttait contre les émotions qui menaçaient de l'engloutir.

Il faisait cinq minutes après six heures quand elle entendit frapper à la barrière. Sanie s'empressa d'aller ouvrir quand Dimitri débarqua dans le salon.

- Bonjour, Julia.

- Bonjour, Dimitri. Tu es très matinal. En quoi puis-je t'aider ?

- Je suis passé prendre Nathan pour l'emmener à l'école.

- Il est en train de se préparer. Il ne va pas tarder.

- Je vais attendre.

Julia ne dit rien. Elle se contenta de déguster ses tartines devant le téléviseur.

- Toi, ça va ? Demanda Dimitri.

- Oui. Pourquoi ça n'aurait pas aller ?

- Je l'ignore. Tu as les traits tirés. Il semblerait que tu n'as pas assez dormi.

- Tu t'inquiètes pour moi à présent. Où est passé le Dimitri qui m'insultait à chaque occasion ?

- Tout le monde peut à n'importe quel moment avoir un autre regard sur le monde.

- C'est très beau tout ça mais tu vas m'arrêter cette mascarade tout de suite. Je n'ai pas envie de m'énerver de si bon matin. Nathan est presque prêt. Encore quelques minutes et tu pourras disparaître de ma vue.

- Comme tu veux. Sinon ça a donné quoi son rendez-vous médical d'hier ?

- Tu voulais vraiment le savoir et tu ne t'es pas présenté ?

- Est-ce si compliqué pour toi de m'en parler ? J'avais une affaire urgente à régler.

- Mais bien sûr ! Comment pouvais-je être aussi idiote pour espérer un changement de ta part. Ton fils est parfaitement en santé mais il va falloir être vigilant afin d'éviter quelque chose de plus grave que la fois dernière.

- Quelle bonne nouvelle ! Je ne veux plus qu'il retourne à la campagne.

- Vraiment ? Et depuis quand est-ce tu pouvais exiger quoi que ce soit ? Je suis la seule à être présente quotidiennement pour lui alors je prendrai les bonnes décisions en ce qui le concerne.

- Être présent pour lui tous les jours ne fait pas de toi son unique parent. D'ailleurs tu commences à faiblir et je ne souhaite aucunement que cela impacte la vie de mon fils. Je veux être présent pour lui tous les jours.

- Qu'est-ce qui t'en empêche ? Tu as enfin compris qu'il n'y a pas que les billets qui peuvent combler un enfant.

- Est-ce que ça veut dire que...

- Ça ne veut rien dire. Ne te fais pas d'idées. Tu veux passer du temps avec ton fils ? Alors je ne vais nullement t'en empêcher. Je ne le fais pas pour toi mais pour lui.

Leur fils fit son entrée au salon à l'instant.

- Maman, je suis prêt. Bonjour, papa.

- Bonjour fiston. Tu vas bien ?

- Oui. Maman, où est passé oncle Jérémy ? Je vais être en retard.

- C'est ton père qui t'emmène à l'école aujourd'hui mon chéri. Tu n'as rien oublié ? Ton agenda scolaire, tes effets géométriques, ton..

- J'ai oublié un truc. J'arrive tout de suite, dit Nathan en coupant la parole à sa mère.

Julia leva les yeux au ciel. Elle doit tout lui rappeler dans les moindres détails sinon il oublie un cahier ou quelque chose de ce genre. Elle éteignit le téléviseur afin d'aller se préparer.
Elle avait des difficultés à se relever quand Dimitri lui tendit son bras.

- Merci. Je peux me débrouiller seule.

Il n'en était vraiment pas question qu'elle accepte l'aide de cet homme en ce qui concerne sa fille. Elle lisait de la pitié dans ses yeux. Car oui, Dimitri François ne pouvait en aucun cas l'aimer après l'avoir abandonné.

- Ce n'est vraiment pas ce que je vois.

- Je n'ai nul besoin de ta pitié, crois-moi. Je sais me débrouiller seule et tu le sais mieux que personne.

Elle se leva précautionneusement et prit congé de lui.

- Bonne journée maman. Je t'aime ! Lui lança son fils au passage.

- Bonne journée mon bébé. Je t'aime encore plus !

* *

- Hôpital Les Frères Richardson, je vous écoute !

- Bonjour madame. J'ai un grand malaise. Pourriez-vous m'aider ?

- Indiquez-moi où vous êtes et j'enverrai l'ambulance vous cherchez tout de suite.

- À la rue l'amour n° dépression à gauche du manque d'affection.

- C'est quoi cette plaisanterie ? S'énerva Julia.

Elle examina un moment ce qui venait de se passer. Non, ça ne pouvait vraiment pas être lui. Est-ce Anthony ? Elle en donnerait sa main à couper que c'est lui.

- Julia, c'est moi. C'est moi Anthony, déclara-t-il pour confirmer ses doutes.

- Comment as-tu osé dis-moi ?

- Tu n'as pas voulu décrocher mes appels alors il fallait bien que je te parle.

- Et pourquoi donc devrais-je le faire ? On a rien à nous dire tous les deux.

- Tu ne le penses pas et je le sais. Comment tu vas ? Et Nathan, et notre bébé ?

- Notre bébé ? Je n'ai en pas la moindre idée.

- Si tu le dis. Tu me manques tellement. Permets moi d'avoir de tes nouvelles au moins.

- J'ai mieux à faire Anthony. Comme tu peux le comprendre, je suis en train de travailler là maintenant. Tu bloques la ligne tandis qu'il peut y avoir des personnes en difficulté qui téléphonent l'hôpital.

- Et moi, ne suis-je pas en difficulté ?

- À qui la faute ? Je dois raccrocher. Bye.

Leur premier affrontement depuis le départ d'Anthony. Julia avait l'impression de revenir de très loin. Elle alla prendre un verre d'eau pour se calmer un peu. Décidément cette journée n'était pas prête de terminer. Dimitri qui débarquait chez elle avec sa soi-disant grande gentillesse et Anthony qui téléphonait au Secrétariat pour prendre de ses nouvelles. Elle les fuyait tous. Ses deux hommes lui avaient fait du mal. Et ceci au même niveau car quand il y a une séparation, il y a toujours des cœurs qui se brisent.

Au moins pour le cas de son ex mari, il avait pris ses distances pour ensuite l'abandonner mais Anthony l'a plaqué au moment il avait le plus besoin de lui.

Amour ou Pitié ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant