51. Aux armes

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Après avoir repéré les nouveautés disponibles en un rapide coup d'œil, Sanji s'accroupit devant un cageot de bottes de carottes pour les examiner, son mégot coincé entre les lèvres. L'été allait bientôt arriver et il s'agissait de sélectionner les fruits et légumes de la prochaine saison.

"Hum, à propos de nos échanges, faut que j'vous dise..."

Le blond releva les yeux vers son fournisseur habituel pour l'interroger du regard, intrigué par son ton.

"Un problème ?

- On peut dire ça."

Sanji se releva, les sourcils froncés, et face à lui, l'homme soupira.

"C'est pas contre vous mais j'vais pas pouvoir continuer à vous approvisionner."

Le cuisinier le dévisagea en retour.

"Pourquoi ? J'ai toujours payé en temps et en heure, lui rappela-t-il.

- Je sais bien, c'est pas le problème...

- Alors quoi ? s'agaça le blond. Il va m'être difficile de ne pas le prendre pour moi si je ne sais même pas ce qui motive votre décision !"

L'homme soupira à nouveau.

"Croyez-moi, vous êtes mon meilleur client et les gens rappliquent de toutes parts dès qu'ils savent que le All Blue se fournit ici alors si ça tenait qu'à moi, on changerait rien. Mais il s'avère que le maire a été très clair à ce sujet."

A ces mots, Sanji sentit sa mâchoire se tendre. Que venait faire le maire dans cette affaire ?

"Qu'est-ce qui se passe ?"

Le marchand hésita une seconde à lui répondre et vérifia que personne ne les écoutait, méfiant.

"J'vous avais dit de demander la protection du Gouvernement Mondial mais comme vous avez refusé, les officiels en profitent et ils veulent plus qu'on vous vende quoi que ce soit. Ils projettent de vous racheter pour une bouchée de pain quand vous aurez mis la clé sous la porte.

- Charmant."

Sanji reposa sa botte de carottes et le marchand secoua la tête.

"Pourquoi avoir refusé, c'était une offre intéressante, insista-t-il. Tout le monde y trouvait son compte : Vorgo, vous et nous..."

Le blond braqua son regard dans le sien.

"All Blue est un territoire libre et il le restera. Il est hors de question qu'une organisation corrompue vienne s'approprier ses richesses pour engraisser encore un peu plus les puissants de ce monde.

- Si vous le prenez comme ça...

- Il y a d'autres manières de le prendre ?" ironisa le cuisinier.

Il contempla ensuite son interlocuteur d'un air dédaigneux.

"Et vous, vous vous alignez sans discuter ? Tant pis pour vos affaires, tant pis pour vos principes, c'est ça ?

- Hé, vous êtes marrants mais c'est pas aussi simple, grimaça le commerçant. Je comprends votre position et quelque part, j'vous admire, vous avez du cran. Mais le truc, c'est que si je fais pas ce qu'ils me disent, j'peux dire adieu à cette boutique et à tout ce que je possède ! C'est bien beau les principes mais quand il s'agit d'avoir à manger à la fin du mois, l'éthique, ça nourrit pas sa famille ! Alors je fais ce qu'il faut et vous pouvez pas me juger pour ça. On doit déjà leur payer une taxe exorbitante rien que pour ouvrir..."

Sanji fouilla dans ses poches pour s'allumer une cigarette avant de planter à nouveau son regard dans le sien.

"Vous êtes plus nombreux qu'eux et si tous les marchands se réunissaient et décidaient de ne plus payer cette taxe ou de leur tenir tête, ils n'y pourraient rien, lui fit-il remarquer.

Par-delà nos rêvesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant