Partie 6

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L'esprit encore embrumé par le sommeil, la première pensée d'Alister fut d'abord « où suis-je ? ».

La réponse s'imposa lorsqu'il ouvrit les yeux : sur le toit, évidemment. Emmitouflé dans les draps qu'il avait rapporté de sa chambre la veille, pour éviter d'attraper froid, il s'était endormi assis, près de son hôte. Et il était apparemment le premier à s'être réveillé.

Sans faire un bruit, il s'extirpa du duvet chaud pour se confronter à la fraîcheur de ce début de matinée. Le soleil s'était à peine levé. Alister se dirigea à nouveau vers le bord du toit, où ils avaient passé la soirée de la veille.

La brise froide qui lui caressait les joues emmenait avec elle les rires et les conversations échangées, déroulait le fil des évènements avant de l'emporter loin de lui. Une douce nostalgie traça un sourire fin sur son visage. Il aurait aimé retenir ce temps passé et le garder contre lui, empêcher cet air frai de frapper sa poitrine et d'en extraire chaque moment de joie qu'il avait pu éprouver. Les faits étaient là : une fois de plus, il ne faisait que se lancer dans une course perdue d'avance contre ce temps qui ne ralentit jamais. Ce temps qui ne laisse rien derrière lui. Pas une seconde, pas un instant, pas un sourire, pas une larme. Pas une chance.


Une fois habitué à la luminosité du début de matiné, le rouquin entre-ouvrit les yeux pour apercevoir la silhouette d'Alister, de dos, près du bord du toit. La place près de Spirou était encore chaude, et il en déduit que le garçon venait juste de se réveiller.

Il s'extirpa à son tour de la couette et le rejoint.

« Bonjour. » lança-t-il doucement afin de signaler sa présence.

Alister eut un léger sursaut avant de se tourner vers lui. Le groom semblait l'avoir tiré brusquement de ses pensées.

« Oh ! Vous êtes réveillé. »

Le rouquin eut un sourire gêné et détourna le regard.

« Ce n'est pas un peu... étrange ? De continuer à se vouvoyer ? »

Relevant la tête, il constata que le garçon face à lui semblait lui aussi gêné, et peut-être quelque peu étonné.

« C'est que... commença Alister. J'avais peur que ce soit un peu trop brusque pour v... enfin, pour... toi ? »

Le jeune homme eut un rire doux en entendant son interlocuteur bégayer. Durant un instant, il détailla le visage du garçon à la mèche blonde, sans même prendre conscience du sourire tendre qui s'étirait sur ses lèvres. Celui-ci semblait inquiet, encore. Comme si chacun de ses gestes impliquait le risque immense de le perdre. Comme s'il pouvait le perdre. L'idée paraissait absurde lorsqu'il y pensais. Comment pouvait-il seulement se l'imaginer ?

Le rouquin osa un pas vers lui, et l'entoura de ses bras.

« Je viens de passer une soirée entière à te parler de ce que j'ai vécu, et tu te demandes encore si me tutoyer serait trop... brusque ? » lui répondit-il avec un sourire taquin.


Le visage d'Alister prit à son tour une expression amusée alors qu'il détournait le regard tout en rendant son étreinte à Spirou.

« Vu comme ça... »

Tous deux eurent un léger rire, avant que le garçon ne se souvienne d'un détail qui ranima la nostalgie sur son visage.

« Je ne sais pas si c'est une bonne idée... souffla-t-il.

- Quoi ? De se tutoyer ? Je ne pense pas que Lambert puisse me faire un procès pour ça. » lui répondit le rouquin, d'un ton amusé.

Je vous trouve un charme fouOù les histoires vivent. Découvrez maintenant