Chapitre 11

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— Eh bien...

Depuis le temps qu'Ilios consultait le Dr Melwis, c'était la première fois qu'elle se retrouvait bouche bée. Il venait de lui raconter ses aventures du weekend, sans interruption de sa part.

— Vous pourriez au moins faire semblant que toute cette histoire ne vous amuse pas.

— Elle ne m'amuse pas, Solal. Je suis très heureuse de l'entendre.

Sans surprise. Il faillit lever les yeux au ciel, mais s'arrêta juste à temps.

— Parlez-moi de votre nuit. Comment avez-vous dormi ?

— Six heures. J'ai dormi six heures.

La femme avait pris l'habitude de ne pas montrer ses émotions, ou très peu. Il n'avait jamais su si c'était son caractère naturel ou un masque qu'elle affichait. Pourtant, à cet instant, elle haussa les sourcils de surprise. Ilios non plus n'en revenait pas, lui qui dépassait rarement les trois heures.

— Pas d'affilée, précisa-t-il. Je me suis réveillé à cause d'un cauchemar, mais j'ai réussi à me rendormir.

Il était content. Fier même. Il avait réussi quelque chose, après tous ces mois à échouer. Peut-être qu'il voyait enfin la lumière au fond du tunnel. Il se refusait cependant à montrer sa bonne humeur. Le Dr Melwis avait été trop pénible pour qu'il lui donne cette satisfaction.

Elle nota quelques mots sur son carnet.

— Toujours les mêmes ?

La bonne humeur d'Ilios s'évapora. Il regrettait presque qu'elle ne parle pas de Sacha.

— Pas tout à fait. La nuit dernière... la seconde fois où je me suis réveillé...

Il se mordit la lèvre. Le Dr Melwis le regardait avec intensité pour l'encourager à continuer.

— L'histoire était aussi sanglante que les habituelles. La différence étant que cette fois, ma victime... c'était Sacha.

Sa jambe se mit à remuer. Bordel, ce qu'il détestait son corps à réagir de la sorte.

— Qu'avez-vous ressenti à votre réveil ?

Il serra la mâchoire. C'était une question débile, sa réponse était toujours la même. Il n'aimait pas s'exprimer sur ses émotions, d'autant qu'il ne les comprenait pas toujours lui-même. Il avait tant intériorisé à travers les années sans jamais se poser de questions que parfois son corps réagissait sans qu'il ne comprenne pourquoi.

— De la colère, de la culpabilité.

— C'est tout ?

Il marqua une pause.

— De la peur, avoua-t-il à demi-mot.

— De quoi avez-vous peur ?

Il réfléchit. Il n'en avait aucune idée. Il ne ressentait de la peur que lorsque ses songes l'emmenaient vers son enfance, pas lorsqu'ils relataient les horreurs qu'il avait commises. Il repassa à contrecœur le scénario de son rêve dans sa tête, et la réponse vint comme une évidence.

— Je déteste l'idée que je pourrais lui faire du mal.

Sa gorge se serra et il déglutit avec difficulté.

— Le soldat 2511 est parti, il ne reviendra jamais. Solal Epizon n'a aucune raison de s'en prendre à son amie.

« Son amie »... ces mots résonnèrent dans sa tête. Étaient-ils amis ? Son ventre se tordit en un mélange de stress et de joie à cette idée.

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