Chapitre 19 - Au plus bas

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Le soleil qui brillait sur la ville de Milan n'arrangeait rien à mon mal à la tête, et c'était la même chose depuis plusieurs jours déjà. Alors une fois de plus, je me dirigeais vers les volets de l'appartement pour les refermer. Je me sentais mieux quand il faisait sombre autour de moi, mais le noir n'avait pas atténué mon mal de tête pour autant.

Il m'arrivait parfois d'ouvrir les volets la nuit, pour observer la lune et les étoiles, attendant désespérément un signe, ou quelque chose, n'importe quoi, qui me donnerait envie de me relever. Je priais parfois, espérant une réponse. Mais rien. Jamais rien.

Je rejoignais la cuisine pour prendre une aspirine et un grand verre d'eau. C'était une nouvelle journée qui commençait, une autre journée enfermé, seul dans mon appartement, sans le droit d'en sortir, mais sans la moindre envie surtout.

Je m'étais enfermé dans une routine malsaine.

Comment pourrais-je avoir envie de vivre et de m'amuser à l'extérieur, alors que j'étais privé de la personne qui comptait le plus à mes yeux, et que rien ne semblait vouloir changer ? Combien de temps est-ce que ça allait encore durer ? Allait-elle se réveiller un jour ? Allais-je survivre si elle ne se réveillait jamais ? Étais-je prêt à vivre sans elle ?

Je n'y croyais plus. J'avais perdu espoir depuis bien longtemps déjà. Et même la compétition ne me donnait plus envie, ni ne me motivait à garder la tête hors de l'eau. À quoi bon se battre, quand rien n'a de goût.

Après une semaine enfermé, j'avais pleuré pour la première fois depuis l'annonce de l'interdiction des visites, je devais désormais me tenir loin d'elle, comme si j'étais un danger. D'une certaine manière pour la protéger, mais ça me tuait moi à la place.

Après un mois enfermé, j'avais arrêté de parler avec qui que ce soit. Depuis, j'avais parfois l'impression d'avoir perdu ma voix, il n'y avait que mes sanglots qui résonnaient encore dans l'appartement. J'avais éloigné tout le monde, pour ne pas les voir sombrer à cause de moi. Je devais les protéger eux aussi. Les protéger de celui que je devenais.

Après deux mois enfermé, je n'avais plus le goût à rien. Alors je me laissais porter par le silence autour de moi. Je quittais à peine la chambre, juste assez pour me maintenir en vie. Mais je ne voulais pas d'une vie sans elle. A quoi bon vivre quand la personne que vous aimez, n'est plus là.

Chaque fois que je dormais, je revoyais son sourire, entendais son rire. Alors quelques nuits, je me privais de dormir. Ses magnifiques souvenirs me faisaient atrocement, mal, et j'avais l'impression qu'ils apparaissaient pour me dire de ne pas l'oublier.

Pour que je n'oublie jamais son regard, son énergie, parce que je n'allais jamais avoir la chance de les revoir. Après presque neuf mois dans le coma, de combien sont les chances pour qu'elle s'en sorte. Très faibles. Bien trop faibles.

Je m'asseyais sur le canapé du salon, observant l'appartement autour de moi plongé dans le noir quasi-total. Mon monde s'était effondré le 31 août 2019, j'avais perdu mon meilleur ami, et j'étais à deux doigts de perdre ma meilleure amie, et la femme dont j'étais amoureux depuis longtemps déjà.

Je ne saurais quand exactement mon cœur avait commencé à battre pour elle, mais je pouvais passer des heures à la regarder travailler sur mes karts, ou sur nos voitures. Elle adorait ça, et même si elle se retrouvait souvent avec des traces de cambouis sur le visage, elle restait la plus belle femme au monde.

J'avais d'abord cru que mon monde s'effondrait quand j'avais appris qu'elle sortait avec Tonio, je l'aimais, et elle non, elle était amoureuse d'un autre. La voir si heureuse aux côtés de mon meilleur ami me tuait, et j'avais fini par m'enfuir, pour ne plus souffrir.

Winter Practice - Pierre Gasly 🤍Où les histoires vivent. Découvrez maintenant