Chapitre 4. 2/3

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Impossible de m'arrêter là, je poursuivais en cherchant Ovide et ses Métamorphoses ; « L'enfant devient d'une taille énorme ; Diane le prend avec elle ; il est le gardien, il est le satellite de la déesse. Mais c'est assez d'une parole irréfléchie pour éveiller le courroux des dieux : Il n'est aucune bête, dit un jour Orion, dont je ne puisse triompher. Tellus fait paraître un scorpion qui soudain ose dresser ses dards recourbés contre la mère des deux jumeaux immortels. Orion la protège de son corps ; Latone le place au milieu des astres éclatants, Que ton dévouement, lui dit-elle, reçoive de moi cette récompense ! »

    Quelle tristesse m'avait assaillie après cette lecture. Je me sentais pale. La pauvre Diane s'était retrouvée seule et avait perdu l'amour qu'elle lui portait. Les paroles d'Orion les avaient entrainé tous les deux vers une chute fatale. La spontanéité et les actes d'ovidé avait eu raison de lui, et de Diane dans son sillage. Comment avait-il pu ?

    Je me rendais alors compte que mon jugement n'était pas objectif mais que mes accusation n'étaient orientées que vers Orion, seul. Avait-il été seul coupable de ce défi ? Et Diane ne l'avait pas fondamentalement perdu, elle pourrait toujours l'admirer dans le ciel, lorsque qu'il brillerait pour elle. Elle le suivrait pour ne jamais se perdre comme je suivais un chemin aveugle en ignorant encore pourquoi.

    J'avais les informations dont j'avais besoin pour le moment et je me résignais à quitter la bibliothèque, sans même un regard vers l'allée de la littérature française, dont l'approche du partiel aurait dû me rappeler à l'ordre.

    Il était encore tôt et je n'avais rien d'autre de prévu de la matinée. Je décidais alors de me rendre au Starbucks dans lequel je travaillais, qui n'était que quelques rues plus loin, sur Ashon Avenue. J'avais traversé le parc de Merrion Square pour y gouter les senteurs printanières et avais poussé les portes du Starbucks.

    Je saluais mes collègues, que je retrouverai dès le lendemain en passant derrière le comptoir pour me servir un café moka, avec deux sachets de sucre roux. Je m'installais sur l'un des fauteuils de cuir qui trônaient devant à la vitrine du commerce, et m'installais confortablement. Mon carnet de notes spiralé placé sur la table à côté de mon stylo, attendaient paisiblement que mon café refroidisse un peu pour me mettre à écrire. Je commençais à distinguer un personnage dans cette romance que j'entretenais avec le ciel. Une jeune femme, elle était douce, comme le lait et le miel. En quête d'un amour impossible, elle ouvrait son coeur et offrait ses sentiments par une nuit étoilée. Voilà ce qu'elle attendait, tout comme Diane, elle cherchait son astre.

    Après quelques gorgées appréciables, je saisissais mon carnet et actionnais mon stylo, il me fallait une trame narrative afin de donner une véritable forme à ce que j'avais entrepris d'écrire. Il me fallait commencer par énumérer les chapitres et parties de mon livre. Ce que je voulais dire, montrer, voir à travers cette femme qui venait d'immerger dans mon esprit. Le champ des possibles était ouvert, je n'avais plus qu'à m'élancer.

    La difficulté m'assaillie bien trop rapidement. Je me retrouvais face à un mur, celui de mes sentiments et doutes. Autrefois, il me suffisait de tenir un stylo, un simple crayon de bois au dessus d'une feuille de papier, pour que mon imagination s'embrase. Désormais, tout me semblait différent. Sans expliquer ce phénomène, je subissais avec effroi la montagne que semblait être la recherche d'une trame, ou d'une simple suite logique. Je n'en voyais aucune. Pourquoi était-il si difficile d'organiser une pensée cohérente. C'était mon histoire, pourquoi devait-il être si dur de la maitriser et de la cadrer avant de l'exprimer ? Un pressentiment me serrait à la gorge. Celui d'une histoire venue de bien plus loin que je ne l'eut imaginé, de bien plus profondément en moi. Cette histoire là ne pouvait pas être prédite. Trop particulière et instable pour être domptée, elle ne donnerait sans doute rien. J'était au bord du découragement, ne sachant qui écouter, ma passion, ou ma raison. Mon seul rôle consistait à regarder naître cette romance, page après page.

    TOC ! TOC ! TOC !

    On venait de frapper à la vitrine du Starbucks, je sursautais, effrayée. J'avais été violemment projetée hors du récit par un individu mal élevé. Qui pouvait être assez puéril pour effrayer ainsi les gens ? Le garçon me fit un signe de la main. Je ne reconnu pas immédiatement le garçon qui était dans la voiture avec nous, le soir du festival. Je n'avais pas prêté attention à son apparence depuis l'avant du véhicule. Il me semble qu'il s'agissait de celui qui était éveillé, comment s'appelait-il déjà ? Alex ? Non... l'autre, ah oui, Olivier !

    Sans son accoutrement coloré du festival, j'avais eu un peu plus de mal à le reconnaître. Son jean bleu et sa veste décontractée verte à pressions, ne laissaient pas imaginer qu'il puisse arborer un pantalon sarouel et des colliers de perles en bois le weekend. Cela dit ce jugement était tout sauf constructif, j'étais vêtue d'un pantalon carotte noir maintenu par une fine ceinture à boucle dorée, qui donnait le ton à mon chemisier vert bouteille au col Claudine. Personne ne me connaissant n'aurait pu croire que je fus capable d'enfiler une robe aux tâches pastel.
     À ma grande surprise, Olivier venait de pousser la porte du Starbuks tout en se dirigeait vers moi. Que me voulait-il ? Soudain, alors qu'il s'invitait sur le fauteuil libre en face du mien, les récents évènements se bousculèrent dans ma tête. Il venait de créer un lien entre Cassandra et moi, il était le garçon de la voiture. Comment m'avait-il reconnue ? Est-ce que Cassandra, cette folle inconsidérée était dans le coin à espionner ?!
     Je prenais une grande respiration. Il n'y avait aucune raison de donner du crédit à mes délires. Aucune raison pour que Cassandra ait été un être diabolique m'envoyant son sbire pour je ne sais quelle raison. Mais la question me sondait toujours, que faisait-il ici en dehors du fait que nous habitions la même ville ? Seconde grande respiration, j'avais réellement besoin de me calmer et d'envisager les choses sous un autre angle.

*FR* Les étoiles de CassandraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant