Chapitre 11

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Tout en écoutant d'une oreille somme toute assez distraite le concert – ce qui traduisait chez lui un certain trouble, sachant qu'habituellement il disséquait les interprétations comme on dissèque des rats de laboratoire –, Draco commençait à se demander sérieusement ce qui lui arrivait.

D'abord, pourquoi n'avait-il pas rejeté Harry quand celui-ci lui avait pris la main, ensuite, pourquoi avait-il trouvé cela plutôt agréable ; enfin et surtout pourquoi il éprouvait un tel bien-être à être ainsi tout contre lui. Il essayait de se persuader de se tenir bien droit dans son siège, de façon à faire cesser cette adorable – non, attendez – détestable proximité. Mais cela ne marchait pas, car il est bien connu que tout corps renâcle à quitter un coin chaud, sympathique et incitant à la paresse pour un endroit froid où il faut se tenir droit. C'est pourquoi plus d'une heure après le début du concert, Draco était toujours appuyé sur Harry, mais de plus en plus inquiet quant à sa propre santé mentale.

Quand les lumières se rallumèrent, à l'entracte, Draco garda par sécurité les yeux fixés vers la scène. Il redoutait particulièrement cette demi-heure à passer avec Harry. Il était partagé entre l'envie de s'éclipser (avant ou après lui avoir révélé la vérité) et l'envie de ne rien faire et de profiter de ses attentions.

Comment cela, profiter de ses attentions ?’ se dit Draco juste après avoir osé avoir cette pensée absolument déplacée et stupide.

Enervé après lui même, il s'apprêtait à opter pour la première solution, quand il sentit la main de Harry sur son bras. Se retournant par réflexe, il se trouva en face d'un Harry qui l'observait avec un regard énamouré des plus ridicules.

Bon, ça simplifiait les choses : ne surtout pas prendre le temps de remarquer combien il était attendrissant, il fallait fuir.

Il se leva donc aussi rapidement que lui permettait les dix kilos de tissu qu'il portait sur le dos, bien décidé à disparaître sans donner la moindre explication.

Seulement, son mouvement fut plutôt mal interprété par Harry. Voyant sa chère Borrélia s'approcher furtivement de lui, Harry prit cela comme une invitation et n'hésita plus à l'entourer de ses deux bras pour la presser sur son coeur, et, alors que Draco, effaré et étouffé, ouvrait la bouche pour protester, Harry posa sur ses lèvres un rapide baiser.

Cette fois-ci, plus d'atermoiement. Partir ! Partir au plus vite et essayer d'oublier cette soirée surréaliste ! Partir !

... Hmm.. Ou bien rester.

Harry avait repris ses lèvres et il se sentait fondre de secondes en secondes.

Minute ! Essaya-t-il encore une fois de se dire.

Harry, lui, pense que je suis Borrélia : son comportement est normal. Mais moi, je SAIS que je ne suis pas Borrélia, alors que fais-je donc dans les bras de Harry ?

Oui, ce n'était vraiment pas normal, mais Harry l'embrassait avec tant de fièvre et pourtant tant de tendresse que Draco se dit qu'après tout, ça n'avait aucun sens de se poser autant de questions. Il s'abîma donc complètement dans le baiser sans velléité de faire remarcher son cerveau avant un certain temps.

Puis Harry le repoussa doucement, rompant le baiser mais gardant sa tête très près de la sienne. Ses lumineux yeux verts étaient devenus quasi-phosphorescent. Draco vit ses lèvres épeler quelque chose avec lenteur, mais il ne put comprendre de quoi il s'agissait.

« Comment ? » demanda-t-il.

Les yeux de Harry s'obombrèrent puis luisirent à nouveau.

Cette fois, il chuchota plus intelligiblement :

Au Putois Hirsute, salon de coiffureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant