Tormented soul

Chapitre 13

Furya

C'est une course contre la montre. Je déploie tous mes efforts pour faire la meilleure publicité possible autour de l'histoire de Dark Rayne. Nous sommes mardi, et je prends l'initiative de demander des retours à certains de mes contacts chez différents éditeurs. Il est quinze heures lorsque je reçois un message de Béa, de chez Elation. Elle souhaite discuter des liens que j'ai partagés et clarifier si j'agis en tant qu'agent pour le roman.

Agent ?

Je tique, naturellement, parce que ce n'était pas mon intention, mais surtout parce que si elle me le demande c'est qu'elle est intéressée. Elle me donne ses coordonnées professionnelles.

Oh bordel !

Je l'appelle aussitôt.

« Salut Béa, c'est... Furya.

— Hey ! Tu veux garder ton anonymat, pas de problème. Alors, dis-moi est-ce que tu représentes... Dark Rayne ? » dit-elle en cherchant son nom. « Parce que je vais te le dire honnêtement, "En fuite" est vraiment, vraiment pas mal, il a un très bon potentiel.

— Merci Béa, mais non, c'est une amie. La version précédente de "En fuite" que j'avais lue était bien, mais sans plus, sans âme. Je lui ai suggéré de modifier deux ou trois trucs, de rajouter un côté romance et voilà. J'ai fait la même chose pour son autre histoire, "Traquée".

— Donc, rien ne vous lie ?

— Non.

— Je suis désolée, je ne vais pas pouvoir t'en parler plus longuement. Sache que je vais la contacter et lui proposer un contrat. Si elle accepte, elle sera publiée et ce sera grâce à toi.

— Merci, Béa, c'est tout ce qui m'intéresse.

— Furya ? Merci. J'aime toujours te lire et ton aide.

— De rien. C'est ma mission sur cette terre, dénicher de nouveaux auteurs.

— À bientôt et bravo ! »

J'ai à peine raccroché que je texte la bonne nouvelle à ma copine, pour la prévenir de s'attendre à un appel d'un éditeur, avec un contrat à la clé. Je la félicite avec de nombreux emojis avant de m'asseoir, satisfaite.

« Une bonne chose de faite ! » dis-je à voix haute en allant me servir une boisson digne de l'événement.

J'ouvre mon réfrigérateur et en sors une bouteille de Sauternes que je débouche avec assurance, comme une sommelière chevronnée. Je prends mon verre ballon surdimensionné que j'affectionne particulièrement et que j'ai surnommé "le vase". Il ne reste qu'un quart de la bouteille quand je la repose délicatement sur le comptoir. Je savoure une gorgée pour me rafraîchir avant de goûter ce délicieux nectar. D'un geste expert, je rafraîchis mon verre en vidant le reste de la bouteille, puis je retourne m'asseoir avec ma tablette.

Je me connecte sur le site de Mon petit bouquin, à la recherche des nouveautés postées, de nouveaux talents qui se sont inscrits sur le site. Mon objectif : dénicher un nouvel auteur prometteur. Un message privé de Dark Rayne m'attend, posté hier soir.

« Merde ! » lâché-je spontanément.

J'ouvre le message, qui ne contient qu'un lien portant le nom de "Romance de Noël". Mon cœur s'emballe de joie. Je me cale confortablement, repliant mes jambes sous moi, et j'entame la lecture. Selon la page de garde, il n'y a que deux chapitres et la moitié d'un troisième. Ce sera vite lu.

« Non, mais quelle pute, celle-là ! » m'exclamé-je d'une voix forte. « Merde alors ! »

Plus je suis vulgaire, plus je suis contente, c'est étrange non ? Ça surprend, mais c'est positif.

Je reprends mon téléphone, pour lui envoyer un message, puis je contacte à nouveau Béa.

« Salut Béa, c'est Furya.

— Tu as déjà trouvé un nouvel auteur ? » rit-elle.

» As-tu réussi à joindre ma copine ?

— Je lui ai laissé un message.

— Quand tu l'auras, demande-lui de t'envoyer ce qu'elle a commencé avec sa romance de Noël. Je viens de lire le début, tu vas être sur le cul.

— Merci, Furya, vraiment. Tu es une bonne amie.

— Hey. Je t'aide, tu me supportes depuis si longtemps, c'est bien comme entente. Bisous.

— Bisou, Furya. Un jour, tu me diras comment tu t'appelles ?

— Qui sait ? Peut-être lors de la séance de signature de ma copine.

— Et ta copine, tu connais son vrai nom ?

— Est-ce que tu t'appelles réellement Béa ? » dis-je en l'entendant rire avant de raccrocher.

Je souris, réalisant que je suis prête à révéler mon identité secrète à quelqu'un. Une amie virtuelle de longue date, rencontrée sur un site similaire à "Mon petit bouquin", qui a malheureusement perdu en affluence et en auteurs au fil du temps.

Je réponds à Dark Rayne.

De : Furya

À : Dark Rayne

16/08/21 16:21

Y a-t-il un mot pour décrire toute la haine que j'éprouve à ton endroit ?

Non seulement un éditeur ME contacte, moi, pour parler de toi, afin de te proposer un contrat (vérifie tes messages et charge ton téléphone), mais en plus tu oses jouer avec mes nerfs avec ta romance de Noël ?! C'est quoi ce plan ? Qu'est-ce que tu me fais ? Je vais être directe et honnête avec toi ! Si tu m'agaces avec deux chapitres comme ça, et que tu ne m'alimentes pas derrière, je vais faire un carnage. Tu connais Braveheart ? Pareil !

Ce que je vais écrire ici ne le sera qu'une fois. Finis ce bouquin au plus vite, si tu veux qu'il soit publié à temps pour Noël. J'adore le début. Et le nouveau personnage à la fin du chapitre 2, alors là tu fais fort. Je l'aime déjà. Reste dans le même ton. Ce dernier personnage doit rester secondaire tout en étant capital, il ira chercher tes lecteurs dans leurs émotions. Bien joué. Je suis fière de toi. Je te souhaite bonne chance et une belle carrière. J'ai hâte de te lire, un vrai livre en papier. Si le succès ne te monte pas à la tête ;), j'espère que tu n'oublieras pas ta copine, et que tu m'écriras de temps en temps, pour me parler de toi, me demander un conseil (même si tu seras prise en main par des professionnels).

Je t'embrasse.

P.S. : Je te déteste, tu le sais, hein ?

F.

Mouais, ça sent la lettre d'adieu, mais trop tard, c'est envoyé. Je pose ma tablette, je récupère mon verre, mais il est vide. Je me retourne par réflexe, pour voir qui m'a fait la blague. Je me lève et je comprends que je suis complètement déchirée.

« Ah ben... » murmurai-je à moi-même, en me traînant sous la douche. L'eau tiède tirant sur le froid me réveille, mais je me sens encore engourdie, j'ai les joues rouges. Il y a longtemps que je ne m'étais pas mise dans cet état. Je m'assois sur le bord des toilettes et procède à une vidange bienvenue. Je suis euphorique, au moins je n'ai pas l'alcool mauvais. Je ne me drogue pas, ne fume pas, alors une bouteille de temps en temps, juste entre moi et... moi.

« Ça en fait plus pour moi, » rigolai-je en allant me faire un truc à manger.

Je me prépare un plat rapide, juste histoire de ne pas mourir de faim dans la nuit. Et, après quelques bouchées, je range mes affaires, j'éteins tout et je vais me coucher. Je ris, pensant que la dernière fois que je me suis couchée aussitôt, je devais avoir six ans.

« Mais j'étais pas fracassée ! » murmurai-je en me glissant entre les draps. Le sommeil me gagne, ça tangue un peu. Je ne souhaite qu'une chose, ne pas vomir.