J'ai couru jusqu'au lever du jour. Et j'ai continué pendant la journée. Et encore la nuit d'après. Je ne me suis pas arrêtée.
La première nuit était vraiment difficile. Je m'enfonçais dans la neige à chaque pas. Des morceaux de glace s'accumulaient dans mes bottines et éraflaient ma peau. Je ne voyais rien à cause des nuages qui ne laissaient passer aucune lumière. Et je ne pouvais pas m'arrêter de penser à cette image. Celle de l'hôpital en feu.
La seconde nuit, j'avais l'impression d'échapper à l'enfer. Malgré la journée assez calme que j'avais passée, il a suffit que la nuit s'installe pour mettre en valeur la hauteur des flammes. De là où je me trouvais, je pouvais constater l'ampleur de l'incendie dont je me suis échappée. J'avais peur, j'en étais sûre, c'était Beaufort qui était sous ce feu. J'ai couru.
Une nuit de plus. Encore une autre. Je me demande encore comment mon corps peut tenir. Sans manger, sans boire. Sans dormir. Je cours comme je respire.
Au milieu de la cinquième nuit, je me débarasse de mes bottines. Je continue pieds nus mais plus dans la neige cette fois. Je me retrouve dans une prairie, l'herbe gelée craquant sous mes pas.
J'ose regarde derrière moi, je ne l'ai pas fait depuis la deuxième nuit. Ça me rassure de ne plus voir ce ciel en feu. Hors de danger, mon corps me fait comprendre qu'il est temps que je me repose. De toute façon, je n'en peux plus, j'ai sans doute évacué toute l'adrénaline que j'avais.
Je m'affale au sol sans me soucier de quoi que ce soit. Je peux enfin me reposer en paix.
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La lumière de la pleine lune ne m'a pas dérangé. Celle de l'aube ne m'a pas réveillé non plus. C'est un son qui rompt mon sommeil profond.
- Beeeeeh !
J'ouvre les yeux et je me retrouve face à face avec une chèvre. En me redressant, elle recule et trouve un nouveau bout d'herbe à déguster.
D'autres chèvres bêlent autour de moi. Je ne me relève pas pour l'instant. La vue qui s'offre à moi est assez plaisante. Une ferme et un champ, des chèvres qui broutent tranquillement.
Un chevreau s'approche de moi, je le carresse. Il est tellement doux.
- Coucou toi.
- Beh !
J'aimerai rester plus longtemps mais je dois avancer et partir loin. Sans savoir jusqu'où.
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Je me remets en route. Je longe le terrain de la ferme, traverse d'autres champs. L'air est tiède et il n'y a quasiment aucun tas de neige dans ce paysage.
D'un coup, je me demande à quoi je ressemble. Mon pyjama blanc est tâché de vert par l'herbe et de gris par la neige salie. J'imagine que je ne dois pas sentir bon après avoir dormi avec les chèvres. Cette idée me fait sourire. C'est peut-être ça, la liberté.
En milieu d'après-midi, je m'aventure dans une forêt. Je marche jusqu'à ce que je rencontre une rivière. Je joins les mains pour recueillir l'eau, je n'en ressens pas le besoin, mais ça me fait quand même du bien de boire. En trempant les pieds, je trouve que la température est bonne alors je décide de me laver dans cette eau claire.
Une fois séchée, je m'habille et démèle ma crinière comme je peux. Ce n'est pas simple vu le nombre de nœuds qui lient mes cheveux les uns entre les autres. J'arrache le lierre grimpant d'un arbre et l'enroule pour les attacher.
Je continue mon aventure sous les arbres, à proximité du cours d'eau. La soirée s'annonce calme, sans pluie.
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Aeternus et Umquam - Tome 1
General FictionSi vous vous étiez réveillé(e) dans une pièce qui vous est inconnue, sans aucun souvenir et seul(e) : comment réagiriez-vous ? Raphaelle (c'est le prénom qu'ils lui ont donné) est confrontée à cette situation. Aucun indice ne lui est donné. Aucune...