13 - LAGO

176 16 23
                                    

Mai 2022, Monterrey Mexique



Le vent frais sur mon visage pénètre lentement ma peau et fait glisser mes cheveux vers l'arrière. Ma robe ne cesse de remonter et je peine à la maintenir baissée. Je passe une main sur mon visage pour enlever les mèches qui me gâchent la vue. Il fait nuit noire mais les spots lumineux le long de l'allée me permettent de me repérer. Le domaine de la propriété est vraiment immense, on se croirait dans un labyrinthe moderne.

J'essaye de reprendre mon souffle, la bouche encore haletante. J'ai couru sans savoir où j'allais. J'aspire une nouvelle bouffée d'oxygène.

Mon regard se met lentement à détailler les alentours. Un petit chemin en contre-bas, mal éclairé, aiguisa ma curiosité. L'endroit sur lequel débouchait le chemin était à l'arrière de la maison, totalement isolé du reste du monde. Il faisait sombre et c'était difficile d'apercevoir quelque chose de cohérent. Il n'y avait presque plus d'éclairage. C'est comme si, les spots s'éteignaient sur mon passage.

L'air devient soudainement pesant et sinistre.

Je m'enfonce à l'aveugle, déterminée à connaître tous les recoins de cette magnificence. Plusieurs petites dalles en pierre rondes étaient superposées dans l'herbe grasse.

J'actionne mes muscles refroidis et m'élance dans cette direction, intriguée. Le chemin débouche sur une sublime arche faite de feuilles d'olivier, délimitée par deux torches enflammées. Sans savoir si j'ai le droit de continuer, je poursuis ma lancée à travers ce somptueux endroit. Au bout de quelques pas, une brève lueur blanche m'interpelle. Je me dirige automatiquement vers celle-ci, comme absorbée par cette soudaine lumière.

Peut-être est-ce un ange ?

Deux petits spots lumineux sont enfoncés dans le sol et délimitent une stèle droite. Mon cœur rate un battement et s'accélère brutalement. Ma respiration devient erratique. J'avais cessé tout mouvement. Mon regard était figé sur cette pierre tombale aux aspects grisâtres.

C'était un cimetière...

Et sans un bruit, je me suis rapprochée de cette pierre, posée sagement sur le sol humide. Mes doigts se posèrent sur celle-ci et son contact me fit frissonner. Un souffle m'échappe. Du bout des doigts, je me mets à tracer le contour des initiales gravées dessus.

R.V

Rosalia. Velasco.

Ma mère.

Mon rythme cardiaque s'accélère en une fraction de seconde. Les larmes me montent aux yeux. Je n'arrive plus à respirer correctement.

La réalité venait de me frapper avec une telle
brutalité que j'avais l'impression d'avoir reçu une boule de pétanque en plein visage. Une affreuse douleur vient me déchirer les entrailles.

Je savais qu'elle était morte. Je me rappellerai toute ma vie ce que j'ai vu ce soir là. Ses yeux amarrés aux miens tandis que la balle traversait sa boîte crânienne et lui arrachait sauvagement la vie.

Mais malgré ça, j'avais encore un brin d'espoir qu'elle soit encore en vie.

Je n'avais jamais réalisé qu'elle pouvait être enterrée quelque part. Loin de moi depuis tout ce temps.

CASA SILVAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant