Chapitre 2

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Je me souviens, la nuit du mercredi au jeudi, il y avait beaucoup de vent. J'avais eu beaucoup de mal à m'endormir. Je me suis souvent réveillée, trempée de sueur. Je faisais plein de cauchemars différents, tous plus effrayants les uns que les autres. Quand le matin est arrivé, je ne me sentais vraiment pas bien. J'avais très envie d'aller à l'école, mais je manquais de force. Pourtant, Anne m'a tirée du lit, avec force.

- À quoi bon te laisser une chance de rattraper ton existence, si c'est pour que tu fasses la marmotte ? m'avait-elle demandé.

J'ai enfilé un débardeur blanc, avec un t-shirt à manches longues vert, et un jean bleu troué par mon frère en jouant avec ses copains. Je pris le chemin de l'école avec mes vieilles baskets toutes abîmées en compagnie de Joseph. Je ne me sentais vraiment pas bien, mais je faisais de mon mieux pour le cacher. Je ne pouvais pas être malade. Je ne devais pas. Je n'avais pas le droit. J'avais du mal à respirer, comme à chaque fois que je m'inquiétais.

- Avance Camille ! Si je suis en retard à cause de toi, papa te punira.

Je couru après Joseph. Nous arrivâmes à temps à l'école. Je peinais vraiment à trouver l'air. J'essayais encore de reprendre mon souffle quand j'arrivai devant la classe.

- Ça ne va pas, Camille ? demanda la maîtresse.

Ma vision devint légèrement trouble.

- Camille ?

Je ne répondis pas.

- Les enfants, installez-vous à vos places. Liam, tu as la charge de surveiller la classe, ordonna-t-elle.

Elle m'emmena à l'infirmerie. À peine arrivées, je rejetai le maigre contenu de mon estomac. Cela me brûlait les poumons. La maîtresse alla chercher un agent de nettoyage. Pendant ce temps, l'infirmière me donna un verre d'eau fraîche, et pris ma température. Elle décida d'appeler mon père, afin qu'il vienne me chercher. Je n'avais pas assez de force pour l'en empêcher, mais je pleurais en silence ma faiblesse.

- Tout va bien se passer, Camille. Ton papa arrive, et il va s'occuper de toi. Ne t'inquiète pas, me rassura l'infirmière.

Cela fit l'effet inverse.

Quand mon père arriva enfin, il semblait sobre et calme. Ce n'était qu'en apparence. Il signa les papiers, promis de m'emmener voir un médecin, et me ramena à la maison. La première chose qu'il fît, étant donné que j'empestais le vomi, fût de me faire prendre une douche glacée. Je restai nue et frigorifiée, dans le noir de ma chambre aux volets éternellement clos.

Quand ma mère rentra du travail, quelques heures plus tard, j'avais vomi sur mon lit. Elle se déchaîna à coup de poing dans mon ventre avant de me jeter à terre.

- Pourquoi tu existes ? répétait-elle.

Ce à quoi mon père répondait :

- Pour nous pourrir la vie, c'est tout ce qu'elle sait faire. Tout est sa faute.

Je n'avais même plus la force de hurler. Je ne pouvais que subir.

Elle frappa fort mon visage. Il tordit brusquement mon bras. De ces deux endroits on entendit des craquements sonores. Ils me ruèrent de coups de pieds dans les côtes. Finalement, elle me prit par le cou, et serra fort.

Anne, qui était rentrée plus tôt du collège, appela nos parents qui répondirent aussitôt à sa demande. Ils me laissèrent là, seule dans le noir, saignant du nez, avec ma douleur et ma culpabilité. J'essayai de m'endormir, mais impossible. Mon cerveau me refusait ce droit. J'en avais assez d'exister et de causer du malheur aux autres.

Coupable d'existerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant