[OLD] Le Jour de Bonheur d'Émilie

XI

— Bien, bien mon chou ! Alors, qu'as-tu trouvé ?

— D'abord, j'aimerais avoir ton avis. Sur lui et sa boutique.

— Ce cher Tavier ? Oh il a tout l'air d'être un de ces « faux-faibles ». Tu vois, ceux qui cachent bien leur jeu. Bien sûr il n'a pas la carrure pour t'opposer la moindre résistance, mais j'ai tout de même l'impression qu'il arriverait à avoir du répondant, et sûrement d'une manière inattendue.

— Et à part ça ?

— A part ça ? Le reste a-t-il vraiment une importance ?

— Je sais que ma mission consiste uniquement à l'assassiner, mais je veux mettre toutes les chances de mon côté. Savoir pourquoi l'Archi-Mage Byrd souhaite sa mort pourrait aider aussi.

— Eh bien, je ne t'ai jamais vu aussi impliquée, du moins pas pendant ce genre de tâche. Mon chou je sais que c'est ton jour de bonheur mais ne risque pas ton avenir pour rien !

— Tu es avec moi, ensemble tout est possible.

— Mon chou ! Ne dis pas ça, tu sais bien que ça me rend tout chose !

— Et pourtant tu n'en penses pas moins, je le sais bien. En fait, c'est plutôt toi qui dirais ce genre de chose.

— Raison de plus pour revenir au sujet initial ! Que dire d'autre à propose de Tavier... C'est quelqu'un de tourmenté, c'est certain. Je veux dire, il n'y a qu'à voir les statuettes de cette femme. Probablement un amour perdu, je doute qu'il ait une compagne, encore moins une comme celle-ci.

— Tu n'as pas vu l'arrière-boutique. Elle en était remplie, c'était presque impossible de la traverser sans en faire renverser une. J'ai passé une bonne partie du temps à avancer sur la pointe des pieds pour les éviter.

— Pourtant quand il est arrivé la première fois j'ai l'impression qu'il venait du fond de cette salle. Alors il aurait réussi à la traverser aussi rapidement, sans en toucher une. Il est si obnubilé par elle qu'il a fini par connaître par cœur le chemin, sans même avoir à y penser.

— Certainement. Et ce que j'ai trouvé confirmait ce fanatisme.

— Ah enfin un nouvel élément ! Dis-moi tout !

— Bien sûr je ne l'ai pas pris pour éviter d'éveiller les soupçons, mais il y avait un article de journal. Plus précisément un morceau qu'on avait découpé.

— Découpé mais pas arraché.

— Oui. Ce n'était qu'une partie d'une liste de noms.

— Une liste de noms dans un article de journal... Les exécutions du jour.

— Exact. La typographie et la présentation correspondaient en tout cas. Et un des noms était entouré en rouge. Aurore Farelle.

— Ah je me souviens. C'était une bourgeoise que l'on a exécutée car elle avait appris des secrets militaires. Ça n'est pas très vieux, moins d'un mois je crois. Je vois vaguement son visage, ça correspond plutôt bien aux statuettes.

— Mais ce n'est pas tout. Tavier avait noté « Mensonge ! » en dessous.

— J'aurais tendance à suggérer le cas typique de l'amoureux rempli de désillusions, qui n'accepte pas la mort de son aimée, mais... Je ne sais pas ce que t'en penses mon chou, mais ça me parait plus complexe que ça.

— Probablement. Et ma deuxième découverte n'arrange pas les choses.

         Émilie sortit l'Amena et la montra à son amie.

— L'Archi-Mage Byrd me l'a offerte. Apparemment ça s'appelle une Amena. Je n'avais jamais vu ce type d'arme avant, et pourtant, Tavier en possédait une. Ou plutôt une version incomplète, comme un prototype.

— Elle est bien étrange ta dague mon chou. A quoi sert ce fil ?

— On peut comme le planter dans quelqu'un, ou quelque chose, puis le faire dérouler, pour continuer de planter des bouts ou je ne sais quoi. Même l'Archi-Mage m'a avoué que cette arme était inutile au possible, le fil apporte plus de problèmes que d'avantages.

— Mon chou, est-ce que... Est-ce que tu pourrais me la donner ?

— Te la donner ? Pourquoi ? Enfin, ce n'est pas comme si je comptais l'utiliser...

— Elle m'intrigue mon chou. Je voudrais l'essayer, pour la comprendre.

— Si ça te chante, tiens. Avec ça, je crois qu'on peut supposer que Tavier est lié à cette arme. Mais pour le vérifier, il faudrait enquêter ailleurs, chez lui par exemple. Alors, vas-y. Ouvre la voie.

— Tu parles comme si je savais où il habitait. Mon chou, je suis Mage, pas magicienne.

— Arrête. Je sais très bien que tu as dû lui soutirer cette information.

— Oh franchement tu commences à un peu trop bien me connaître ! Il est grand temps que je change de phase, histoire d'être un peu plus imprévisible ! Allez, suis-moi donc mon chou !