Chapitre 5 - Partie 2

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— Que la fête commence.

Il ne fallut pas bien longtemps pour que les créatures sans tête et noirâtres le prennent pour cible. Sans même prendre d'élan, Arès arma son bras munie de la lance et la jeta de toutes ses forces, tel un javelot. L'arme fendit l'air pour venir empaler quatre ignominies d'un coup. Satisfait, il dégaina les poignards courbés et commença sa danse macabre.

Le seul avantage des acéphales étaient leur nombre. Outre cela, ils n'étaient rien de plus que des fétus de paille mouvant pour Arès. Pied nu dans le sable froid, il se déplaçait avec une aisance qui frôlait la prétention. Il éventrait, mutilait, tailladait les créatures qui tombaient au sol, dévalant parfois une dune, ou finissaient enterrer sous d'autres cadavres. Arès surprit du sang jaillir des blessures qu'il leur infligeait. Il ne savait pas réellement à quoi s'attendre face à ces choses, mais il n'allait pas se plaindre de salir sa tenue égyptienne.

Il massacra à la chaine. Et plus il en éliminait, plus son sourire s'élargissait. Dans un mouvement trop brusque, il en perdit son casque, dévoilant à la lueur du soleil noir, la folie brillant dans son regard.

À mesure que ses lames se teintaient de sang, Arès changeait. Sa peau de mortelle s'éclaircit en même temps que l'encre de ses cheveux coula, laissant place à leur couleur cinabre. Les lames de ses poignards dégoulinaient de liquide vermeil. Leur poignet en devenait moite, presque gluante. Pour autant, Arès en fit fi. Il transperça un énième acéphale, sa main dans l'abdomen de la charogne, alors que sous ses pieds craquaient les os d'un cadavre. Il releva la tête, son visage moucheté de vin, lorsque la Dévoreuse des morts rugit à quelques kilomètres de là. Arès s'en était rapprochée, et la créature, énorme, fit trembler le désert en se mettant en marche.

Le soleil avait continué sa course dans le ciel, bien que toujours voilé. Arès ne pouvait dire depuis combien de temps il jouait avec ces monstres. Assez pour rendre sa tunique, d'origine blanche, méconnaissable. Ses cheveux, bien que courts, tombaient lourdement sur sa tête, imbibés de toutes sortes de fluides. Sa peau était recouverte d'une couche noirâtre et croûtant jusqu'aux coudes, à l'instar de ses pieds, chevilles, et mi-mollet. Dans son dos, le Nil menait ses propres batailles. Héliopolis vacillait sous les flammes des torches, les cris des femmes, les pleurs des enfants, et les grincements du fer. Arès n'avait encore aperçu aucun dieu, si ce n'est Horus, venir en aide à la population. Et encore, le dieu faucon avait disparu. Héliopolis était pourtant le cœur de l'Ennéade. Il était inconcevable pour le grec que ces prétentieux de dieux égyptiens, tiennent leur dogme à ne pas du tout se mêler aux mortels, même lorsque les enfers annexaient leurs terres.

Il se débarrassa des derniers acéphales encore debout dans sa partie du désert et rangea les poignards à sa ceinture. En face, plus rien ne l'empêchait d'atteindre Ammout. Celle-ci avait entamé sa marche vers le Nil. Elle secoua sa tête, hérissant sa crinière d'où en tomba une quantité folle de sable. Ses larges pattes s'enfonçaient dans le désert, mais ne ralentissaient en rien son avancée. Elle avait faim et l'endroit où les cœurs battaient encore était de l'autre côté du fleuve.

Arès posa sa main sur le manche de son épée. Celui-ci, en forme de sablier, s'évasait à l'extrémité pour empêcher la main de glisser. Il la tira de son fourreau lorsque la chimère ne fut qu'à quelques centaines de mètres de lui. La lame était finement décorée. Elle était constellée d'or et d'argent. Le manche était une pure merveille à regarder. Incrusté de bijoux, elle n'en était pas moins confortable en main. Son poids et son équilibre étaient très bon. Il ne s'agissait pas juste d'une épée décorative, mais bien d'une arme de guerre. Arès resserra ses doigts couverts de sang séché autour et tout en s'élançant, revêtit intégralement son corps divin. Courir dans le sable demandait un certain équilibre. Les appuis n'étaient jamais fiables et on ne pouvait prévoir qu'un pan entier d'une dune s'écroule ou que le vent rehausse leur sommet.

Dark Egypt - Godness : ArèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant