Les yeux braqués vers le désert, Arès contempla la calamité qui se jouait à des dizaines de kilomètres de la ville. La stupeur et les exclamations interrogatives laissèrent vite place à la panique et à la peur. Si l'éclipse, synonyme d'échec quant au voyage dans le monde souterrain de Râ, inquiétait déjà la population, les mouvements du désert et l'émergence d'une masse monstrueuse depuis le sable les terrifiait. Tous se mirent à courir, se bousculant, marchant littéralement sur ceux qui n'allaient pas assez vite. On ignora les objets perdus, ne porta pas attention aux charrettes qui se renversèrent, pas plus qu'aux enfants, déboussolés ou sans le sou, qui pleuraient contre les murs sans comprendre la terreur des adultes.
Plutôt que de suivre le mouvement, Arès alla à contre courant. Ce qu'il voyait naître depuis le sable à la couleur d'encre n'était pas humain, et encore moins mortel. Une immense créature au dos tacheté apparaissait, comme sortit de sous les flots du désert. La terre trembla quand sa voix gronda, assourdissante, menaçante. Le monstre, car il s'agissait bien de cela, était énorme. Mais il était loin. Il était apparu du côté Ouest du fleuve sacré. Le Nil était large sur des kilomètres. Il mettrait un peu de temps à arriver jusqu'à la ville.
Un bourdonnement s'en rapprochait néanmoins. Sous l'ombre du jour obscur, Arès chercha de la hauteur. Il escalada une statue protectrice, se fichant bien de l'outrance que cela suscitait. Il plissa les yeux et cru voir, au loin, une myriade de petits points en mouvement. Sa vue, limité par le corps mortel qu'il revêtait, mit un certain temps à voir ce qui était visible.
Et ce n'était pas bon signe.
Des créatures, bien plus petites que le mastodonte qui continuait de sortir du sable, fleurissaient dans le désert en une nuée mouvante se dirigeant droit sur le fleuve. Elles étaient nombreuses et allaient vite. Très vite.
Arès descendit de son perchoir pour courir en direction de la rive. Il dut jouer des coudes pour se frayer un passage. Certains lui crièrent de ne pas aller au fleuve quand d'autres le traitaient de fou. Pied nu, il s'enfonça dans le dédale d'Héliopolis, suivant la très faible pente qui menait au Nil. La tenue qu'il portait était bien plus légère que son apparat. Bouger avec n'était pas un souci et courir ne fatiguait pas. Elle était plus confortable aussi, plus propice aux chaleurs accablantes du pays.
Il s'enfonça dans des ruelles, coupa par des boyaux moins hospitaliers, traversa des rues commerçantes dévastées par le mouvement de foule, sauta au-dessus de caniveaux et traversa des canaux aux eaux claires. Plus il s'approchait du Nil, moins il y avait de personnes. Les arbres y étaient plus haut, verts et bien portant. Les insectes y étaient plus nombreux, tout comme les oiseaux. L'air, à peine plus humide, portait l'odeur du fleuve et de la vie qu'il permettait.
Il était à la périphérie d'Héliopolis. Les bâtisses y étaient moins hautes, les rues plus poussiéreuses. La vie sauvage reprenait le pas. Les agriculteurs avaient la main mise sur les berges cultivables. Arès se stoppa dans sa course en passant devant une esplanade. Ses yeux ne l'y trompèrent pas ; une caserne. Il s'invita sur l'air d'entrainement et se servit en arme. Des arcs et des flèches étaient rangés en grand nombre. Quelques lances étaient disposées contre un mur, abritées par un haut-vent. Arès s'en saisit d'une quand l'éclat d'une lame raffinée attira son attention. Une série de poignards à la lame recourbée était entreposée derrière, cachée par la hampe des lances. Arès n'en avait jamais vu de tels. Certains ressemblaient presque à des outils agricoles, notamment pour le fauchage. Il s'empara de deux d'entre eux et porta son attention sur les armes exposées au mur. D'étranges épées y étaient exhibées, trop propres et parfaites pour avoir servi aux entrainements. Il en détacha une de son socle, la soupesa, puis la glissa dans son fourreau qu'il attacha à sa taille, non loin des poignards qu'il avait passé sous sa ceinture.
VOUS LISEZ
Dark Egypt - Godness : Arès
ParanormalBlessé et humilié par un mortel durant la Guerre de Troie et abjuré par les siens, Arès trouve asile dans un autre panthéon, au-delà de la Méditerranée : l'Ennéade. Mais ce qui ne devait être qu'un temps de repos dans un pays qui ne lui voue pas une...