Il fut un temps où la Grèce n'était pas unie, que ce soit chez les hommes, comme chez les dieux. Alors, quand la belle Hélène, fille de Zeus et de l'humaine Léta, fut arrachée des bras de son époux Ménélas, roi de Sparte, la guerre contre Troie fut déclarée. Là où les hommes se préparaient pour la bataille de toute une vie, les dieux, eux, regardaient d'en haut tout en choisissant leur camp. Athéna prit le parti des Grecs, tout comme Héra et Poséidon. Les Troyens eurent le soutien d'Apollon, d'Aphrodite et d'Arès.
Ce qui ne se disait pas, ce qui distinguait cette guerre des autres, était la participation directe de ces dieux sur le front. Ils se mêlèrent aux hommes pour autant de raisons obscures. Ignorant du stratagème des dieux, les hommes firent appels à leurs meilleurs héros. Hector et Énée du côté des Troyens, et Ulysse, Diomède, plus tard Achilles, dans le camp grec.
Athéna, déesse de la guerre et de la sagesse, prit sous son aile le jeune Diomède. Guerrier invaincu dont seul Achille dépassait les exploits, il poussa l'audace jusqu'à provoquer le dieu Arès, incarnation de la guerre et de la destruction, en duel sur le champ de batail. Et parce que les dieux n'avaient pas à se mêler des affaires des hommes, parce qu'Athéna veillait sur le jeune guerrier, parce qu'il suffisait d'un rien pour faire basculer une guerre, Diomède triompha sur la divinité dont l'immortalité n'épargnait en rien la souffrance et les blessures.
Un cri de rage fit trembler l'Olympe tout entier. Pourtant, affalé sur son trône, le dieu des dieux ne trouva rien de plus intéressant que de regarder ses ongles. Face à lui, à quelques pas de là, son fils hurlait son mécontentement, déchirant l'air d'une voix semblable aux vacarmes d'une armée à cheval lancée au galop.
Il fit un pas de plus vers le trône, désintéressé de savoir qu'il souillait le marbre de l'Olympe de sang humain. Son corps entier frissonnait d'une colère sans limite, agrémenté d'un soupçon de déshonneur et de trahison. Son propre père ne pardonnait ses actes et lui tournait le dos. Il avait conscience depuis des siècles que leur lien de sang était la seule chose qui les unissait, la seule qui le rendait légitime à se trouver là, l'unique qui faisait de cette scène une félonie impardonnable et encore moins partiale.
— Vous me demandez d'arrêter d'être ce que je suis ?!
— Ce n'est pas ce que j'ai dit, répondit lacement Zeus.
— Peut-être, mais c'est précisément ce que ça veut dire !
À côté de Zeus, Héra fit son apparition. Elle fixait son fils d'un regard indéchiffrable. Ce dont il était sûr, c'était qu'il n'y avait aucun remord, aucun pardon, aucune pitié dans ses yeux. Elle, bien avant Zeus, ne pouvait cautionner ce que son fils faisait, ce pour quoi il était né, qu'importait qu'il soit la deuxième partie d'une balance qui se devait équilibrée.
— Arès, commença-t-elle avant d'être interrompu.
— Vous, fermez-là ! cria-t-il en la pointant du doigt.
Il fit un nouveau pas en avant et des taches carmin s'écrasèrent sur le marbre blanc. Héra écarquilla les yeux, stupéfaite par l'odeur qui s'en dégageait.
— Tu es blessé ?
— Oh, ne faites pas comme si vous étiez étonnée. C'est une guerre. Le sang doit forcément couler, qu'importe à qui il appartient.
Il ouvrit les bras, laissant à vue la blessure béante qui traversait de part en part son abdomen. C'était en partie pour ça qu'il avait quitté le front. Non pas par défaite ou peur – de quoi avait bien peur le dieu de la guerre alors qu'il était immortel ? – mais bien pour prouver ce que sa demi-sœur était prête à faire pour que son camp gagne.
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Dark Egypt - Godness : Arès
ParanormalBlessé et humilié par un mortel durant la Guerre de Troie et abjuré par les siens, Arès trouve asile dans un autre panthéon, au-delà de la Méditerranée : l'Ennéade. Mais ce qui ne devait être qu'un temps de repos dans un pays qui ne lui voue pas une...