Chapitre VII

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L'eau qui stagnait dans l'évier lui renvoyait un reflet trouble, un lui distordu qui mouvait au rythme des ondes. Son visage, d'une pâleur troublante, ses cheveux qui se confondaient dans la pénombre de la pièce, à peine éclairée par un soleil encore timide. Et ses yeux, l'un d'un noir profond, une obsidienne reflétant le vide sombre de son âme, et l'autre, pâle comme s'il voulait se fondre dans la sclérotique de son oeil. Il était horrible, il le détestait de tout son être, et plus encore. Cette surface claire, qui reflétait comme un miroir les horreurs de sa naissance, encore et encore. Cette pupille qui semblait ressasser le sang, les larmes, la douleur, la peur... Tout ce qu'il voulait enterrer. Tout ce qu'il voulait oublier. Car comment pouvait-on vivre en se rappelant à chaque seconde de l'éclat de la lame qui l'avait défiguré ? En se rappelant les litres de sang que buvait goulûment le parquet, les coups de feu ? Bien sûr, il avait menti, parce qu'admettre que ce n'était pas naturel revenait à devoir expliquer comment il s'était retrouvé ainsi, avec un œil de neige et une fine cicatrice partant du coin extérieur de l'œil à sa tempe. Sa peau avait ravalé la blessure avec le temps, ne laissant qu'une ligne encore plus blanche que son épiderme. Incapable de supporter ce reflet plus longtemps, il finit de se brosser les dents et se lava les mains pour remettre sa lentille en place. Si on observait de près, on remarquait bien sûr une iris un peu plus pâle que l'autre, mais ça n'avait que peu d'importance. C'était après l'avoir perdu qu'il avait réalisé la beauté de son regard noir, ses pupilles sombres qu'il tenait de l'héritage familial. Sa famille... C'était le genre de choses dont il ne parlait pas, jamais, même Kabuto en savait très peu sur cela, bien qu'il connaisse les grandes lignes de l'histoire...

Il se redressa et se peigna rapidement, essayant tant bien que mal de dompter ses mèches, qui s'obstinaient à former une forêt de piques à l'arrière. Puis, il retourna dans sa chambre pour s'habiller. Aujourd'hui, il n'enfilerait pas sa robe comme tous les jours, parce qu'aujourd'hui était une première : Naruto avait décidé de l'inviter au restaurant, sûrement pour le remercier de l'avoir sauvé lors de sa mésaventure d'avant-hier... Sérieusement, quel genre de mec appelait son domestique à une heure pareille pour lui demander si, tiens, ça pourrait lui faire plaisir de venir le chercher dans une de ses voitures de luxe. Enfin, comment aurait-il refusé ? Il n'allait quand même pas lui dire de se démerder et d'aller dormir sur un banc... Surtout que leur relation avait déjà dépassé depuis un moment le stade employé-salarié... Alors, il l'avait fait (prenant la voiture la moins chère, au cas où), avait traversé la moitié de la ville pour le trouver en train de pioncer sur le fauteuil de sa salle d'attente, glissant peu à peu vers le sol dans l'idée d'obéir à la gravité et de s'y effondrer. Ce n'était pas un modèle de beauté quand il dormait : la bouche toujours ouverte, souvent en train de baver, pourtant, quelque chose dans son visage endormi était apaisant, rassurant. Alors qu'il s'habillait, il eut un rapide questionnement sur la suite, son futur, leurs futurs. Au début, il pensait simplement travailler jusqu'à avoir assez de côté, et pouvoir enfin repartir de zéro, ou du moins essayer. Un bon début pour cela était déjà de pouvoir arrêter de vivre chez son putain de psychiatre, qui certes, avait proposé de l'accueillir quand il était dans la merde, mais avait surtout dû avoir pitié de ce gamin perdu, qui n'avait rien ni personne... Mais à présent, il commençait à douter, à se demander s'il avait vraiment envie de retourner vivre seul, et disons-le, à aller vivre loin de l'Uzumaki. Vivre avec quelqu'un était agréable, il n'avait jamais le temps de s'ennuyer à ses côtés, le blond était toujours en train de faire quelque chose, de lui raconter tout ce qui lui passait par la tête, de discuter, de le divertir. C'était parfois un peu épuisant, c'est vrai, pour quelqu'un de calme comme lui, le silence était agréable, hors il était denrée rare avec lui. Mais bon, il trouvait ça mignon, au fond : il agissait de plus en plus spontanément, lui donnant l'impression qu'il agissait vraiment en tant que lui-même plutôt que ce que les autres voulaient voir. Il égayait sa vie, c'était vrai, même si le blond avait lui aussi ses moments de moue, comme en ce moment. C'était aussi pour cela qu'il avait accepté d'aller manger avec lui au restaurant, lui qui n'aimait pas vraiment le monde et le bruit...

My lovely maid ( 1e version )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant