LE CARNETJ'avais toujours été ''intelligent'', pas forcément très intelligent, mais sans aucun doute bien plus que les autres. Déjà à l'école primaire, bien qu'à l'époque j'étais plutôt l'enfant bizarre que l'enfant doté d'une vivacité d'esprit hors du commun, je faisais preuve de ce qu'on aurait pu qualifier de prouesses intellectuelles. J'étais par exemple parvenu à déclencher un incendie dans mon école, âgé de seulement 8 ans. Incendie mineur bien entendu, je n'étais pas fou et ne voulais pas d'une classe totalement cramoisie qui sentait le brûlé. Mais ces quelques flammes n'ont suffi à me dispenser de cours durant plus d'une semaine. C'était là qu'était intervenu mon géni incontesté.
J'avais donc mis feu à des cartouches d'encre de feutres à alcool toxique et qui n'étaient absolument pas homologuées par le ministère de la santé et de la sécurité. Le genre de feutre qui rendait stérile si un jour par malheur on se dessinait un pissenlit sur la main. Bref, ces feutres-là.
J'y avais donc mis feu, ce qui avait produits un gaz hautement toxique, les pompiers étaient arrivés et avaient fait évacuer tout le bâtiment. Puis j'étais resté chez moi pendant pas une, ni deux mais bien trois semaines, le temps que l'air soit redevenu respirable. (Les conduits d'aération avaient permis la propagation du gaz dans l'entièreté du bâtiment le rendant totalement impossible d'accès). Les instituteurs qui étaient, certes bien moins intelligents que mini-moi mais pas totalement stupides, étaient remontés jusqu'à moi et en avaient informé mes parents.
D'ailleurs le gaz devait être cancérigène car les deux professeurs qui ont été les plus exposés aux flammes moururent d'un cancer des poumons moins d'une décennie plus tard. (Je l'avais un jour vu aux infos en prenant mon petit déjeuné). Mon premier meurtre était en fait un double meurtre. J'étais vraiment le plus doué de la famille ! "Quel gâchis..." disait ma sœur avec une profonde désolation dans le regard. Mais je m'en fichais. Cette pimbêche était simplement jalouse et la voir agir ainsi me remontait le moral.
Père m'avait lourdement réprimandé. C'était la première fois qu'il le faisait. Il était terriblement fier de moi. D'ordinaire il ordonnait à ma mère de le faire à sa place, au mieux il me giflait puis, retournait travailler. Qu'il daigne me témoigner de l'intérêt prouvait qu'il avait été épaté par mon coup de génie. Ce fut la dernière fois qu'il m'adressa la parole. (Sans compter l'enterrement de ma mère évidemment)
* * * * *
J'avais passé le reste de la journée confiné dans ma chambre. Sans dire un mot, Ash m'avait aidé à remettre ma porte qui à présent ne s'ouvrait que si nous la soulevions légèrement en baissant la poignée. Puis il était parti. Le barman m'apporta de la nourriture à deux reprises mais je n'y touchai presque pas. Je me forçai tout de même à en grignoter deux, trois bouts pour ma conscience personnelle et pour ne pas le vexé. Ash venait de le menacer de mort par ma faute et je lui devais bien ça après tout. D'ailleurs je ne l'avais pas revu depuis. Il n'avait - pour l'instant - tué personne et c'était le principal. Dans l'après-midi, une femme était venue changer mes points de suture. Elle paraissait étonnée de la parfaite cicatrisation de ma plaie. Et déclara qu'elle repasserait une nouvelle fois dans 7 jours pour changer mes points une dernière fois. J'avais parfois l'impression d'être immortel.
J'étais déjà levé depuis plus d'une heure lorsqu'il vint me réveiller et me prévenir au passage d'être prêt pour partir dans une demi-heure. Je me contentai de grogner, il me lança un bref regard puis repartit. Me lever aussi tôt me mis de foutrement mauvaise humeur, manque de chance, Ash semblait l'être lui aussi. Cette journée risquait d'être particulièrement virulente. S'il m'agaçait trop, je n'aurais qu'à foutre le feu à quelques feutres, les cacher sous son lit puis attendre. C'est Jin qui serait ravis. Comme vous avez pu le constater, j'avais le coup de main pour ce genre de choses. Elea disait que je tuais comme une femme, autrement dit, c'était toujours subtil avec peu de violence et tout particulièrement létale. En réalité, elle était terriblement jalouse et était incapable d'exercer le meurtre comme un art. C'était devenu un barème pour savoir si je voulais vous tuer. Plus j'étais brutal, moins vous risquiez votre vie.

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Cats Street [mxm]
RomanceDeux ans seulement après avoir échappé au cartel de son père, Raphaël se fait de nouveau embarquer dans de sombres affaires impliquant gangs, mafia et Ash, le plus jeune chef de gang que New York ait connu mais également le plus impétueux. Une...