Pour la plupart des gens, je ne suis qu'un étudiant ordinaire. Bien sous tout rapport, souriant bien qu'un peu trop silencieux et observateur. En somme, quelqu'un qui se fond dans la masse et qui n'attire pas forcément l'attention.
Mais pour d'autres, je suis celui qui exauce les souhaits, celui qui réalise les ambitions, qui met à jour les désirs enfouis et se propose de leur donner corps.
Tout cela, en échange d'une obéissance totale, d'un renoncement au libre-arbitre au profit d'un plaisir unique, addictif que je distribue selon mon bon vouloir.
Pour ceux-là, je suis Mephisto. Celui qui offre des contrats, que l'on va voir quand on est désespéré.
Pourquoi je fais ça ? Tout simplement parce que je le peux et c'est bien là mon vice.
J'aime pervertir ce qui est innocent, j'aime entrainer des inconscientes sur le sentier de la luxure, les guider pas à pas dans ce monde dont elles ignorent tout et dont on les tient à distance par des relations aigres et sans saveurs.
Je jouis de les voir se découvrir en s'abandonnant à moi, qu'elles me remettent les clés de leur plaisir et supplient de les amener jusqu'à ces horizons dont elles ont toujours fantasmé, mais qu'elles n'ont jamais osé explorer.
C'est plus fort que moi, le frisson que cela me procure est pour moi devenu une nécessité.
Mais ce ne fut pas toujours le cas. Il m'a fallu longtemps pour me découvrir moi-même. Jadis, j'allais de déception en déception, incapable de comprendre pourquoi je ne parvenais pas réellement à m'épanouir dans une relation stable. Un déclic a été nécessaire à mon évolution.
Ce déclic s'est présenté comme tout ce qui révolutionne la vie d'un homme. Il s'est présenté sous la forme d'une femme.
J'étais jeune, insouciant et frustré. Elle et moi nous sommes rencontrés à une soirée entre amis, du genre de celles où l'alcool coule à flot et l'on tente de noyer ses soucis d'adolescents dans des litres de bière sans penser au lendemain.
Elle était là, dans son coin, l'air aussi perdu que moi. Nos regards se sont croisés, on avait le même vide en nous, un vide qui ne demandait qu'à être comblé.
Un instant plus tard, nous étions adossés ensemble à une rambarde, une cigarette à la bouche dans l'air froid de la nuit. Sa robe moulante rouge ne semblait pas lui tenir très chaud, alors je l'ai enveloppée de mon manteau sans lui demander son avis. Touchée par tant de sollicitude, elle avait écarté un pan du vêtement pour que je vienne me serrer contre elle.
-Tu t'amuses bien ce soir ? avais-je demandé, plus par politesse que réelle curiosité.
-Super, c'est la soirée de ma vie.
Son ton sarcastique m'avait fait pouffer, manquant de m'étouffer avec la fumée de ma cigarette.
-J'admets que l'ambiance n'est pas folle.
-Ça c'est un putain d'euphémisme.
Je lui tendis ma cigarette, sur laquelle elle tira une longue bouffée qui se dissipa lentement dans l'air devant nos yeux fatigués.
-Et toi ? T'as pas l'air de bien t'éclater non plus.
J'hochai la tête.
-Je n'aime pas les soirées comme ça. Je ne connais pas la moitié de ces gens, la musique est trop forte, il fait trop chaud et il n'y a rien à faire. J'ai l'impression de perdre mon temps.
-Pourquoi être venu alors ? T'es maso ?
Je souris malgré moi.
-Je cherche un peu de compagnie. A rester constamment tout seul on devient fou.
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On l'appelle Mephisto
RomanceEn chacun de nous sommeillent des désirs que l'on fait taire, par peur de ce qu'ils pourraient dire de nous. Des désirs qui nous font frémir mais que l'on n'ose pas assumer, des envies qui nous dévorent et que l'on se résigne à enfouir pour toute un...