7. Orgueil

1.9K 175 46
                                    


 LEV


Assis nonchalamment sur le dos du gars que je viens de buter, je porte une clope à mes lèvres et l'allume d'un geste las. Le briquet manque de me glisser des mains tant le sang que j'ai fait couler a rendu ces dernières poisseuses. Je ramène mes cheveux en arrière et pose mon regard sur Gian qui, appuyé contre le mur près de la porte, fait tourner son flingue entre ses doigts d'un air ennuyé.

— On peut pas les rejoindre ? demandé-je en baillant.

Il tourne son regard vers moi et hausse un sourcil moqueur face à ma question. Juste à l'étage au-dessus, nos gars sont en train d'anéantir les derniers sbires de Petrucci et franchement, j'aurais bien planter la lame de mon couteau dans certains d'entre eux.

— Laisse-les s'amuser un peu, m'intime-t-il avec un petit sourire goguenard.

— Pourquoi je pourrais pas m'amuser, moi aussi ?

— T'as tué une dizaine de gars. T'en as pas eu assez ?

Je hausse les épaules. Je ne suis pas particulièrement sanguinaire, mais la haine que je ressens envers tout ce qui se rattache de près ou de loin à Petrucci crée de terribles pulsions meurtrières en moi.

Gian croise les bras sur sa poitrine et m'adresse un petit sourire en coin.

— Tu veux toujours pas me dire comment tu as tué cet enculé de Petrucci ?

Sa question m'amuse autant qu'elle m'agace. Cela fait un mois qu'il ne lâche pas l'affaire et ça commence à me gonfler.

— Je te l'ai dit : je l'ai suivi, j'ai attendu qu'il soit seul, mes gars se sont occupés des siens et j'ai planté mon couteau dans sa gorge en le regardant droit dans les yeux jusqu'à ce qu'il ait fini de vomir tout son sang pourri par terre, asséné-jé en tirant sur ma clope d'un air ennuyé.

Gian ricane.

— Tu aurais dû m'envoyer une vidéo.

— Tu étais vraiment la dernière personne à laquelle j'avais envie de penser, rétorqué-je en fixant longuement.

— Je te rappelle pour la énième fois que je n'avais pas le choix.

Je lui lance un regard menaçant, mais il ne se départit pas de son sourire narquois.

En dépit des combats au corps à corps qu'il a eu avec plusieurs des hommes de Petrucci, son apparence reste parfaitement lisse : sa chemise est à peine froissée, ses cheveux bien plaqués en arrière et sa barbe taillée au millimètre près n'a reçu aucune gerbe de sang. Tout le contraire de moi avec mes doigts ensanglantés, mes cheveux emmêlés et mon t-shirt déchiré.

Je l'ai observé se battre : il est méthodique et appliqué, chaque coup est mesuré et porté avec une redoutable précision. Il anticipe chaque mouvement de son adversaire et sait parfaitement se placer pour ne recevoir aucun coup. Il n'a pas cette folie furieuse qui m'envahit au combat, ce besoin de me jeter dans la masse et de donner autant que recevoir, de sentir l'odeur de la sueur et du sang, de m'enivrer de ce plaisir grisant d'entendre les os se briser, de voir la peur dans les yeux de mon adversaire, de me délecter de ses cris de souffrance.

Son attitude face au combat est d'une froideur rationnelle quand la mienne et d'une exaltation brûlante. Deux parfaits opposés qui pourtant se complètent divinement bien. Du moins au travail. Parce qu'en dehors de ça, son attitude fière et arrogante, cette façon qu'il a de toujours me regarder avec une lueur railleuse dans les yeux, tout cela m'horripile au plus haut point. Surtout lorsqu'il aborde le sujet de cette nuit chez Petrucci.

Les dents longuesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant