26. Terreur

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GIAN


— Soixante tonnes de came foutues en l'air. Cinq de nos gars assassinés, dix en état critique. Et ces enculés ont fait sauter le terminal. Ce n'est plus de la provocation, Gian, c'est une véritable déclaration de guerre. Bordel, ils ont détruit un édifice public ; c'est toute la police qu'on va avoir sur le dos cette fois. Et le président ne pourra pas ignorer l'affaire, il va demander des résultats, il va vouloir renforcer les lois anti-mafia... Bordel, je te jure que le premier Cortese que je croise va payer pour tous les autres !

Tandis que je suis du regard Romeo qui fait les cent pas devant moi, mes doigts se mettent à pianoter sur le bord de mon bureau. Autour de nous, nos gars retiennent leurs souffles, oppressés par la tension palpable qui règne dans la pièce. Ils savent parfaitement qu'au moindre faux pas, à la moindre parole de travers, ils se prendront dans la gueule toute la colère accumulée ces derniers jours. Et vu son importance, ils risquent au mieux une mort rapide, au pire une torture interminable.

Contrairement à Romeo dont le visage est affreusement déformé par la colère, je reste impassible. Influence de Lev ? Certainement. Pourtant, la rage me tord les entrailles à moi aussi, elle se répand pernicieusement dans mes membres, elle étrangle ma gorge et m'incite à la vomir sur tous ceux qui m'entourent. Mon aura doit être terrible et le visage blême de mes hommes le confirme : je ne dois pas contrôler mes phéromones aussi bien que ce que je croyais.

— Il est hors de question que la police nous emmerde encore une fois ! vocifère Romeo. Il faut réagir, maintenant, ne pas leur laisser le temps de nous attaquer à nouveau, leur faire regretter de s'être opposés à nous ! Putain de merde, je te jure que je vais faire un carnage.

Il ponctue ses dires d'un violent coup de pied dans sa chaise qu'il envoie valser à l'autre bout de la pièce.

Je m'enfonce un peu plus profondément dans mon siège et fais tourner mon verre de whisky entre mes mains. Oh oui, nous allons répliquer. Oh que oui, notre vengeance sera terrible.

La veille, des gars du clan Cortese, le deuxième plus important de la région, ont fait sauter le terminal portuaire qui réceptionnait nos cargaisons de drogue, nous privant ainsi de bénéfices primordiaux et attirant sur nous l'attention des forces de l'ordre. Plusieurs de nos hommes y ont perdu la vie et tous nos entrepôts ont été détruits. Plus qu'un petit contretemps, c'est un véritable raz-de-marée destructeur qu'ils ont créé. Si nous ne réagissons pas assez vite, nous risquons de perdre du terrain. Et cela m'est intolérable.

— Quel constat a établi la police ? m'enquis-je posément.

Les yeux fous de Roméo croisent les miens et ses phéromones orageuses me claquent le visage.

— Qu'est-ce qu'on s'en branle du rapport de police ? crache-t-il d'un air furibond. Faut qu'on aille trouver ces fils de pute maintenant ! Qu'on se présente nous-même chez eux et qu'on leur colle une putain de balle entre les yeux.

— Et se faire gentiment cueillir parce qu'on aura été assez con pour se jeter dans la gueule du loup ? Reprends le contrôle de toi-même et réfléchis, tu ne me sers à rien dans cet état.

Pendant une seconde, je me demande si mon associé ne va pas m'arracher les yeux avec mon ouvre-lettre, mais il se contente de se passer rageusement les mains sur le visage.

Nous ne pouvons pas répliquer à chaud, sous le coup de la colère, ce serait le meilleur moyen de tout foirer et de faire une énorme connerie. Bien que l'envie de tous les brûler vivants me taraude, je sais que je dois prendre sur moi. Donc si mon putain d'associé pouvait en faire de même, cela m'arrangerait grandement. Ce dernier pousse un grognement animal et se résout à aligner deux neurones.

Les dents longuesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant