Chapitre 27 - John Lovelace

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9 Juin, Durleigh

Lottie le faisait attendre, cela n'était pas dans ses habitudes. Il sentit l'odeur familière de sa fille derrière la porte de son bureau avant même que cette dernière ne frappe sur la porte de bois sombre.

Le troisième coup ne fut pas encore porté que le père de famille lui demanda d'entrer. Il observa Lottie passer la tête par l'entrebâillement de la porte en lui adressant un sourire timide. Lorsqu'elle se rendit compte que John l'attendait et n'était pas occupé par autre chose, elle se décida à entrer.

John pouvait sentir l'appréhension qui s'échappait par tous les pores de sa peau. Depuis l'opération dans la demeure des Wentworth, un fossé s'était brutalement creusé entre eux. Le chef de meute l'avait sciemment écarté de ses plans. Il n'était pas dupe et savait pertinemment que sa fille avait malheureusement développé de forts sentiments à l'égard du cadet.

Dans l'idée d'épargner Lottie et de ne pas atteindre le point de non-retour, il avait épargné le jeune homme, conscient également qu'il subissait son destin plus qu'il n'avait réellement envie de s'opposer à la cause de John Lovelace. Seul le temps lui dira si ce choix était le bon. Et puis il y avait toujours eu cette émulsion autour du gamin. Richard était dur avec lui, mais en parlait comme s'il s'agissait de sa poule aux œufs d'or.

Archibald Wentworth était une piste qu'il ne pouvait pas ignorer.

Son épaisse main fourragea dans ses cheveux argentés alors qu'il poussait un long soupir. Il ne savait plus tellement comment dialoguer avec sa propre fille, et cela le déstabilisait. Il finit par lui présenter le siège qu'il y avait face à son bureau et l'invita à s'asseoir :

— Je t'en prie, ma puce, assieds-toi.

Lottie acquiesça brièvement et s'installa sans un bruit en face de lui. Elle aussi poussa un soupir. C'est à peine si elle osait le regarder dans les yeux. Toutefois, la jeune femme finit par lui adresser la parole, sans conviction :

— Tu voulais me voir, papa.

John ne put retenir son sourire. L'entendre l'appeler ainsi le plongeait dans tous ces souvenirs de leur vie à trois. Sa femme lui manquait terriblement. Il sortit de ses songes et se décida à finalement répondre à sa fille qui attendait. Sa jambe droite, croisée sur la gauche, s'agitait nerveusement.

— Je voulais savoir où tu en étais avec le garçon Wentworth. Est-ce que tu as une idée de ce qu'on va pouvoir faire de lui ? Est-ce que tu as plus d'indices sur ce supposé « Héritage » qu'Isaac t'avait mentionné ?

Il sentit sa fille se crisper sur son siège. Malgré lui, la colère s'insinua en lui. Lorsqu'elle cachait ainsi ses mains entre ses cuisses en pinçant les lèvres, c'est qu'elle cherchait un moyen de lui mentir. John détestait devoir faire appel à ce don qui lui avait été fait, mais elle ne lui laissait pas le choix :

— Parle, Lottie.

La voix de l'Alpha. Il n'avait pas levé la voix, cela lui était inutile. Le ton était impérieux, sans échappatoire. Lottie lutta quelques secondes, jusqu'à ce que les phéromones écrasantes de John fassent céder ses défenses. L'éclat de colère dans ses yeux noirs s'estompa, son regard devint vide. John ne se le pardonnait pas. Il espérait pourtant qu'elle le comprendrait, dans quelque temps. Inéluctablement, sa fille finit par lui répondre d'un ton monocorde, sans vie :

— Archibald n'est pas encore complètement guéri. Je n'ai rien repéré d'anormal. Isaac devait être simplement à la recherche d'une raison pour laquelle il aurait été mis de côté.

John passa de nouveau ses doigts dans ses cheveux, tirant un peu dessus de frustration. Si même Lottie tournait en rond, c'était qu'il n'y avait pas grand-chose à en tirer de plus... À moins que... À moins qu'il ne faille bousculer un peu ce jeune homme.

L'Héritage du Chasseur : Le Loup parmi nous.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant