Edward... Parti ?
— Vous... Vous devez faire erreur. Il doit être avec sa famille, dans leurs appartements.
Le garde secoua la tête, peiné.
— Non, votre Altesse. Sa famille affirme ne pas l'avoir vu de la soirée. Nous l'avons cherché partout, personne ne l'a aperçu depuis qu'il vous a quittée. Peut-être a-t-il pris peur... et s'est... téléporté dans un autre royaume ? La forêt des elfes par exemple ne connaît pas l'hiver, elle non plus.
Il continua à envisager des hypothèses, mais Tilly ne l'écoutait déjà plus.
— Ouvrez grand les rideaux, ordonna-t-elle soudain d'une voix étouffée.
— Pardon, votre Majesté ? s'enquit le garde.
Elle se racla la gorge, hésitante.
— Ouvrez les rideaux, répéta-t-elle avec plus d'aplomb. Le plus délicatement possible.
Elle avait allumé les bougies qui les encerclaient, constatant avec effroi qu'une fissure accaparait un coin de la vitre. Fine, presque invisible sous le givre qui l'encerclait, mais alarmante.
Elle gagnait du terrain, piquait la couche de verre. Remontait, le long des rideaux de velours si bien que la princesse n'osât pas les toucher.
Elle déglutit, tremblante.D'ici une heure, la neige entrera dans le palais, estima-t-elle en se mordillant les lèvres.
Si la tempête ne s'intensifiait pas...
Elle ne put s'empêcher de songer à Edward. Il n'aurait jamais eu l'idée de l'abandonner. Ni de partir sans prévenir.
Était-il parti jusqu'au palais des fées ? Ce serait suicidaire ! Les tours du château étaient enchantées, pour éviter que quiconque n'y entre par effraction. Sans téléporteur adapté, ni ouverture des grilles, tout voleur pouvait déjà renoncer à ses plans.
Edward aussi.
S'il affrontait le froid, Tilly ignorait qui de son côté sorcier ou dragon gagnerait la bataille. Surtout si les bourrasques empiétaient sur les autres royaumes.
On cogna à la vitre. Des grêlons, gros comme des pions de brumes et épées, fusaient, désordonnés, et ricochaient contre les murs du palais.
— Vos ordres, votre Altesse ? fit le garde, peu courageux.
Tilly et lui reculèrent de concert. De peur que la fenêtre ne se brise en mille éclats, et n'écorche sa peau cannelle, elle renonça à tirer les longs rideaux.
Un frisson la saisit : un projectile de gel avait frappé le centre de la vitre, où une brèche s'était créée. Longue comme le corps d'une araignée, elle se divisait en huit pattes. Toutes rampantes, grésillantes.
— Regroupez le plus de monde dans les sous sols, exigea-t-elle.
Il ne se fit pas prier. Elle partit d'un côté, il s'engagea de l'autre.
Plus malin qu'elle, il avait emprunté un chemin long mais prudent vers les caves royales. Il cheminerait de salon en salon, de clochette en clochette pour sonner le désastre qui les attendait .
À chercher le trajet le plus rapide, Tilly tomba droit dans le piège que lui tendait le givre destructeur.
Et à sa gauche, un premier pan de verre, craquelé de toutes parts, crissa
... avant de céder.Horrifiée, la princesse se couvrit la tête de ses bras, et ferma les yeux. Réflexes inutiles pour parer les débris de verre, mais terriblement rassurants. Au lieu du froid mortel d'un giboulée d'hiver, la chaleur d'un feu de bois lui caressa les joues.
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Brun Cannelle (terminée)
FantasyPersonne ne peut oser dire non à la princesse Calissa, première fille du roi des dragons. Personne ne peut envisager lui tenir tête Personne ne peut espérer la rabaisser. Du moins, c'est ce que Calissa croyait. Jusqu'au jour, où une étrange let...