Six mois plus tard...
— Votre Majesté, je vous présente Ondine, ma fiancée. Elle aimerait faire partie de votre cour, et postuler au poste de cuisinière.
Tillyssia se redressa contre le dossier de son trône, et examina les deux individus. Ladite Ondine était coiffée d'une couronne de nattes blondes, dans lesquelles des fleurs avaient été glissées . Elle portait un tablier, d'où dépassait une cuillère en bois et une spatule.
La reine jeta un œil à sa droite, et Calissa l'encouragea d'un signe de tête à accepter.
— Bien sûr. Nous serions heureux de vous avoir parmi nous, répondit-elle de sa voix douce.
Muette, la jeune femme la remercia d'une main sur le cœur. Son futur époux l'accompagna jusqu'aux cuisines. Il se nommait Terence, et connaissait très bien le palais : sur un coup de tête, Calissa l'avait embauché en tant qu'intendant, pas plus d'un mois après le couronnement.
Tilly n'avait rien trouvé à y redire. Le jeune dragon excellait dans son travail.
La jeune monarque camoufla un baillement contre sa paume. Le clocher sonna.
Déjà, quelle heure était-il ?
Les doléances du peuple se terminaient toujours à la nuit tombée, au moment où l'on priait la reine, la princesse Calissa et ses parents —qui se portaient comme un charme —de se rendre à table pour le souper.
Hagarde, elle prit appui sur les accoudoirs, et se dégagea de ce trône qui jour après jour semblait l'aspirer tels des sables mouvants.
Soudain, les portes s'ouvrirent une dernière fois, et un courtisan s'agenouilla.
— Ma reine, fit-il.
Tilly jeta un regard interrogateur à sa sœur, qui se contenta d'hausser les épaules. Or, il en fallait plus pour tromper la reine : ils étaient de mèche tous les deux.
Edward redressa la tête, et présenta ses mains. Un écrin bleu roi s'y logeait, laissant apparaître le plus bel anneau que la dragonne n'ait jamais vu. Habillé d'or blanc, il accueillait une pierre turquoise. Beaucoup l'auraient associé au topaze bleu, mais la reine, elle, savait qu'il s'agissait d'un tout autre joyau. Le lunaris, une pierre si rare, qu'elle valait mille diadèmes. Quand Tilly confectionnait encore ses propres bijoux, son vœu le plus cher avait été de poser la main sur cette légende rocailleuse, à laquelle on prêtait de nombreux dons de guérison.
— Votre Majesté, acceptez-vous d'épouser le plus heureux des dragon-sorciers de votre cour ?
Tilly ne répondit pas : elle se jeta dans ses bras, et déposa un tendre baiser sur ses lèvres. Feignant l'indignation, Calissa haussa un sourcil, puis se racla la gorge.
— Votre Majesté, plaisanta-t-elle, est ce une façon de répondre à votre prétendant ?
Alors que l'annonce du couronnement de la reine Tillyssia avait éclipsé celle des fiançailles brisées entre Calissa et Edward, un autre couple avait appris à renouer.
Edward avait disparu quelques semaines, sans que la reine n'ait à lui demander quoi que ce soit. Il refusait d'influencer Tilly dans ce choix délicat. Qu'elle affirme ses sentiments pour lui ou non.
Mais il ne lui cachait rien. Il lui envoyait des lettres, des illustrations, des "cartes postales", comme il aimait les appeler, de chaque royaume qu'il visitait. Grâce à lui, la reine se tenait informée de tous les drames politiques qui pullulaient aux quatre coins du monde.
Jusqu'au jour où la dragonne craqua : au beau milieu du printemps, elle l'invita dans son palais.
Il était arrivé dans une tenue de prince, elle avait fait dresser une nappe dans le jardin et ils avaient longuement discuté, sans oublier de s'embrasser, à la vue de tous.
De là, de nouvelles rumeurs avaient fleuri. Certaines accusaient le nobliau de n'être attiré que par la couronne, d'autres s'enthousiasmaient de voir leur favori remonter dans la quête du trône.
Tilly ne les écoutait guère. Sa plus grande préoccupation avait été sa sœur. Risquerait-elle de la froisser en avouant la vérité ?
D' un commun accord, Edward et elle avaient décidé de passer sous silence le début de leur relation. Ils avaient inventé une histoire, une révélation lors du pique nique royal. Calissa n'avait pas besoin de savoir que son ex-fiancé n'avait jamais éprouvé le moindre sentiment pour elle.
Toutefois, ils s'étaient jurés qu'il s'agirait de leur dernier mensonge.
Plus de jeux. Plus de secrets.
— Oui, je veux t'épouser, répondit-elle les larmes aux yeux.
Alors qu'il passait l'anneau à son doigt, elle vit briller un millier d'étoiles dans les yeux de celui qu'elle aimait.
Pour toujours.
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Brun Cannelle (terminée)
FantasyPersonne ne peut oser dire non à la princesse Calissa, première fille du roi des dragons. Personne ne peut envisager lui tenir tête Personne ne peut espérer la rabaisser. Du moins, c'est ce que Calissa croyait. Jusqu'au jour, où une étrange let...