Enlevés par les Disciples

Chapitre 34

La soirée était déjà bien avancée lorsque Robert Moslow parqua sa voiture devant la maison. La bâtisse était moins imposante que notre villa et dégageait une impression de confort. Tous les rideaux avaient été tiré, protégeant ainsi l'intimité des habitants qui serait mise à mal par une cohorte de journalistes et de paparazzi. Nous ne perdîmes pas une seconde avant de sortir de la voiture et de traverser la parcelle de gazon devant la maison. La porte en bois s'ouvrit sans bruit et je me sentis en sécurité dans ce couloir beige.

Pourtant, je n'avais jamais eu ce sentiment de sécurité dans cette maison. Je m'étais toujours senti oppressé, sur le qui-vive, à attendre que quelque chose se passe. Je n'avais pas hésité une seule seconde à fuir cet endroit lorsque j'avais été sélectionné pour DNA. Le lieu n'avait pas changé depuis que j'étais parti. Toujours cette moquette claire, cette peinture beige aux murs, ces meubles d'un autre temps dans le couloir.

Avec lenteur, j'enlevai le manteau qui couvrait mes épaules. Je n'avais pas de chaussures. Encore sous le choc, je ne m'en étais pas rendu compte. La fatigue s'abattit comme une chape de plomb. Je me retins à la rambarde de l'escalier, les jambes tremblantes. Monsieur Moslow vint me soutenir et me guida dans le salon.

Assise sur l'un des canapés en cuir pâle, Marie Moslow regardait un film auquel elle ne prêtait pas toute sa concentration. Elle jouait avec ses doigts manucurés, preuve de la nervosité qui l'habitait. Ses cheveux bruns étaient noués en un chignon lâche dans la nuque, dégageant son visage aux traits fins. Elle était plus jeune que son mari et donnait une impression d'élégance et d'assurance. Lorsqu'elle entendit nos pas, elle se retourna et posa sur nous son regard chocolat. Ses prunelles avaient toujours été très expressives. Elle n'avait pas pris la peine de se changer et portait encore son tailleur beige.

— Daniel !

Elle me rejoignit en quelques enjambées et me serra dans ses bras. Son parfum à la vanille m'enveloppa et me donna à nouveau ce sentiment de sécurité. Qu'est-ce qui avait changé depuis mon départ, il y avait presque huit ans ? J'avais grandi, je n'étais plus un adolescent. Non. Ils s'étaient attachés à moi, ils avaient eu très peur. Je n'en m'étais pas rendu compte.

— Maman...

Ce fut le seul murmure qui m'échappa. Et ce fut la première fois que j'appelais Marie Moslow ainsi. Son étreinte se resserra autour de moi à l'entende de cette appellation. Au fond de moi, je savais que même s'ils s'étaient montrés durs envers moi, ils m'avaient élevé comme leur propre enfant et avaient pris soin de moi jusqu'à ma majorité. Même lorsqu'ils ne furent plus responsables de moi, ils continuèrent à jouer leur rôle de parent. Je ne m'en étais pas rendu compte à l'époque, ne voyant que leur sévérité qui m'étouffait. Cet enlèvement, ces moments de solitude et de peur m'avaient au moins fait réaliser cela. Les Moslow étaient là pour moi, ils avaient répondu à l'appel lorsque j'en avais eu besoin. Et ils seraient là les prochains jours pour m'épauler et me soutenir.

Je mis fin à l'étreinte lorsque Robert s'avança et posa sa main sur mon épaule. Il essaya de m'adresser un sourire chaleureux, mais je sentis le poids de la trahison dans ses yeux gris. Je savais qu'il finirait pas m'en parler, qu'une dispute exploserait inévitablement, mais pour l'instant, il me laissait un sursis.

— Va prendre une douche, je vais t'amener des habits propres, dit-il simplement.

Je hochai la tête, trop fatigué pour répondre verbalement. La maison comportait deux salles de bain, une à l'étage et une au rez-de-chaussée. Marie m'accompagna jusqu'à celle du rez et me donna un linge. Elle me sourit et me laissa seul dans la salle d'eau. Je retirai tous mes vêtements et inspectai scrupuleusement mon corps dans le miroir. La peau était parsemée de petits hématomes, de coupures et de traces de boue. Elle était très pâle. La plaie qu'avait tracé le couteau sur mon avant-bras cicatrisait, elle ne présentait pas de signes d'infection.