Enlevés par les Disciples

Chapitre 43

Ce fut lors de cette journée que notre calvaire se termina.

La nuit avait été courte. Je n'avais pas beaucoup dormir, cauchemardant et me réveillant plusieurs fois. Greg m'avait tenu dans ses bras, mais malgré le réconfort qu'il m'apportait, je ne réussis pas à m'apaiser. Steve avait passé une partie de la soirée au téléphone avec ses parents tandis que Gabriel et Aaron s'étaient isolés dans une chambre. Chacun avait besoin de se réconforter après l'épreuve terrible du commissariat.

Nous nous étions levés aux aurores pour pouvoir déjeuner et rejoindre le practice studio. La matinée se résumerait à tourner les chorégraphies des différentes chansons pour les poster ensuite sur Hit DNA. Dans ses vidéos, nous avions l'autorisation de rester en tenue de sport. Je portais toujours le même t-shirt noir trop large et un jogging gris trop grand. Comme Steve, j'aimais m'entrainer sans chaussures.

Le tournage dura une bonne partie de la matinée. Notre coach se montra satisfait de nous, ce qui était assez rare. Gabriel prit un antalgique avant de performer, puis après.

— N'en reprends pas avant six heures, tu vas être en surdosage, grondai-je lorsque nous rejoignîmes les vestiaires.

— Je crève de douleur, Dan !

— J'entends bien, mais ce n'est pas une raison pour te gaver d'antalgiques. Ça n'aidera pas plus.

— Dan a raison, si tu as tant mal, retourne faire un contrôle. Ton hernie a possiblement évolué, me défendit Greg.

Gabriel haussa les épaules. Il se méfiait désormais des médecins. C'était une réaction normale, le précédent avait laissé son état empirer pour que le loup puisse entrer dans la bergerie.

— Est-ce que tu as ressenti des changements dans tes symptômes ? demandai-je alors que nous entrions dans les vestiaires.

— À part l'augmentation des douleurs ?

Je hochai de la tête.

— Non.

— Tu n'as pas de sensation de paralysie dans le bassin, dans la vessie ou dans les jambes ? Une perte de sensibilité dans les jambes ?

— Non.

— Est-ce que tu as des difficultés à aller aux toilettes ?

— Bon sang non !

Gabriel perdait patience, je cessai mes questions indiscrètes. Pas d'alertes cliniques relevées. Comme l'avait dit Greg, une hernie discale pouvait évoluer. Si elle se rompait, elle pourrait comprimer les nerfs formant la queue de cheval. Je redoutais d'en arriver à cette urgence chirurgicale. C'était un risque réel dans la situation de Gabriel. Le rappeur, malgré nos explications, ne semblait - ne voulait- pas s'en rendre compte. Greg et moi gardions un œil attentif sur lui, vérifiant sa clinique et les potentiels signes d'aggravation. Heureusement pour nous, nous n'en arrivâmes pas à la rupture de l'hernie.

Nous passâmes tous à la douche avant de rejoindre le van. Une séance de presse était organisée cet après-midi pour annoncer nos futurs projets et notamment la sortie de Granit. Elle permettrait aux journalistes de nous poser des questions et de faire la promotion de notre travail. Comme toutes les interviews, je détestais ce genre d'événements. Les journalistes étaient des rapaces et, avec notre disparition et les révélations faites dans l'émission de Jerry, ils n'hésiteraient pas à s'immiscer dans la moindre faille.

Évidemment, Monsieur Karl serait là. Il ne nous lâchait plus depuis l'esclandre chez Jerry. Sa colère n'était pas redescendue. Ses yeux verts nous fusillaient et un tic nerveux agitait le coin de ses lèvres. Il dégageait quelque chose de pernicieux qui nous faisait tous trembler. Derrière son allure impeccable se cachaient ses menaces. Nous avions trop peur pour oser le contredire. Il fallait tenir jusqu'à la fin du contrat. Qui arriva plus vite que je ne l'imaginais.