Chapitre 4

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Et moi qui devait être perdu, déboussolé. Je mis un moment pour me rendre compte que je n'assume pas la réalité.

Le cours de sport dura deux bonnes heures. La moitié des garçons avaient fait croire à monsieur Monpieux qu'ils ne se sentaient pas bien ou qu'ils avaient trop de mal à réaliser telle ou telle figure. Le prof leur a expliqué qu'il n'en avait absolument rien à faire et qu'il avait d'autres chats à fouetter.

Quant à moi, je devais tant bien que mal enchaîner pas chassés, roulades et équilibres – je n'avais pas voulu essayer de mentir, j'étais trop nul à ça.

Cerise sur le gâteau, j'allais devoir produire une chorégraphie avec Louisa, Maud et Fabienne. Sur adore.

Elles étaient toutes très douées, et en particulier Maud, car elle avait fait six années de gymnastique d'affilée. J'étais assez impressionné mais découragé, car je savais très bien que je n'arriverai jamais à produire des roues, des grands écarts ou des ponts.

Louisa et Fabienne étaient apparemment les meilleures amies du monde ; elles n'arrêteraient pas de rire et de discuter entre elles, ce qui ne les empêcherait pas de travailler comme des malades. J'aurais voulu en faire autant.

Finalement, nous prônons de présenter notre danse dans deux semaines, ce qui s'annonce extrêmement mal vu ma nullité dans le domaine de la gymnastique. Mais j'allais travailler dur pour y parvenir. Enfin, j'allais essayer. Essayeur, hein.

Quelques minutes plus tard, nous entendons la sonnerie et ce fut l'heure de la récréation. J'allais sûrement devoir rester seul, mais cela ne me dérangerait pas car même dans mon ancien collège, je traînais soit avec Samy, soit je demeurais seul près de mon arbre préféré et lisais une BD ou un manga. J'ai toujours aimé le calme et la sérénité.

Il y avait un CDI près de la salle de maths, mais je n'avais pas envie de m'y rendre, car j'avais déjà emporté un roman avec moi. Il s'agissait d'Underground de Laurence Goriveau. Après, je pouvais toujours aller à la vie scolaire pour mon rendez-vous, mais j'avais tellement la flemme... Mais j'allais peut-être revoir Alexandra ! Soudain, l'espoir remonta en moi et je courus voir si elle y était déjà. Jackpot ! Elle était en train de gronder un élève ( sûrement en 6e ) qui avait frappé un de ses camarades. Ça me fit penser à moi. Je n'arrivais même pas à imaginer qu'avant, je frappais des costauds. Lorsque Alexandra tourna la tête vers moi, elle me sourit et me fit signe d'attendre deux petites secondes. Quelques instants plus tard, elle se libéra enfin et se dirigea dans ma direction.

— Salut ! Alors, ton premier cours, ça s'est bien passé ? me demanda-t-elle.

— Ouais, bon, je suis un peu nul en gym... mais ça va, répondis-je en haussant les épaules.

— Ah bah t'inquiète, j'avoue que la gym c'est pas facile.

— Ouais, on est d'accord !...

Il y eu cinq secondes pendant lesquelles personne ne dit pas un mot. C'était le moment le plus gênant de toute ma vie mais je poursuivais :

— Bref. En fait je voulais un conseil. En mode j'ai un rendez-vous à la vie scolaire mais j'ai la flemme d'y aller et je suis trop timide. Je sais pas si ça en vaut la peine, même si ça a l'air assez urgent...

Alexandra bailla et se frotta les yeux.

— Perso, je te conseille d'y aller, surtout si ça a l'air urgent. Ils ont appelé ton père ou ta mère ?

— Oui, ma mère. Mon père, ils n'auraient jamais réussi à le joindre, vu qu'il est...

Mort. Même si je ne voulais pas l'admettre, il était mort. Décédé. Parti. Envolé. À jamais et pour toujours. Jamais je ne pourrais le rejoindre. À moins, bien sûr, que je ne me tue. Et c'était bien sûr ce que j'allais faire, vu que c'était la seule solution.

Celui qui n'y croyait pasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant