Chapitre 24

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Vendredi 16 décembre, 18h30, Le Boucanier

Thibault prit une longue lampée de sa bière, avant de reposer son verre sur le tonneau servant de table entre nous.

-Je te jure que si ça continue ainsi, je vais faire un truc terrible. J'ai pas encore décidé quoi, mais ça va arriver.

-Ça fait combien de temps? Demandai-je.

-Trois semaines. Trois semaines. S'emporta le pourtant toujours calme Thibault. Et toujours aucune réponse. S'il ne voulait pas de doctorant, il fallait pas en prendre un!

-Je suis sûre que tu peux faire remonter ça à quelqu'un, si ton directeur de thèse te néglige à ce point. Fis-je remarquer. Il était pas aussi absent l'an dernier, non?

-Non. Mais c'est comme un couple. Au début, tout va bien, chacun fait des efforts, et puis, les mois passants, l'un des deux se désintéresse, trouve toujours moins de temps à accorder, jusqu'à ce qu'il disparaisse complètement et ne réponde plus à rien pendant trois putain de semaines. Je suis sensé faire quoi au labo, moi?

-Si tu me poses la question à moi, c'est que tu es vraiment au bout. Ricanai-je. Je ne comprends rien à ce que tu fais.

Thibault soupira, et se pinça l'arête du nez.

-Je suis déjà quasiment à la moitié de ma thèse, putain. Qu'est ce que je vais rendre? Ça me bouffe.

-Ecoute... le mieux, c'est d'en parler au directeur de ton labo, je pense. Tu peux pas attendre le comité de suivi pour en parler, ça te ferait perdre 6 mois. Et puis, détends toi. C'est enfin les vacances, et on les attend depuis trop longtemps pour que tu te ronges les sangs à ce sujet pendant deux semaines.

Thibault poussa un nouveau long soupire en se laissant tomber dans sa chaise. Il reprit une longue lampée de bière, avant d'acquiescer.

-Ouais. C'est probablement ce que je devrais faire. Mais ne pas y penser pendant deux semaines, c'est plus facile à dire qu'à faire.

-Eh, tu vas pas bosser pendant tes congés payés quand même. Le raillai-je. On est pas assez payés pour ça.

-Clair. Ricana-t-il. Et je m'appelle pas Matthias. D'ailleurs, il est pas sensé venir?

-En partant, je lui ai dit que si il ne sortait pas immédiatement du bureau, je ne l'inviterai pas au nouvel an.

-Wow. Ça aurait du le motiver. Pourquoi il est pas là, du coup?

-Un truc à finir, soi disant. Grognai-je. Mais bon, si ça le fait sortir avant 19h, c'est déjà un miracle.

-Je ne comprends pas comment il fait pour arriver aussi tôt et rester aussi tard. Il explose ses 35h chaque semaine, et ça lui va.

-Si il pouvait pointer ses heures sup, ça aurait un sens. Soupirai-je. Mais là, il bosse juste gratuitement. C'est le salaire le plus rentable du labo depuis des années. Je comprends pourquoi ils préfèrent engager des doctorants payés une misère plutôt que des chercheurs à poste fixe.

-Il préfère peut être se noyer dans le travail hasarda Thibault. Ça va pas mieux, avec sa crush?

Je fis une grimace éloquente. La fameuse crush que nous avions découvert à Matthias l'été précédent n'était pas... enfin... disons que dire qu'elle n'était pas intéressée était un euphémisme.

-Elle passe la plupart de son temps à lever les yeux au ciel quand il fait des vannes. Et vu que c'est Matthias...

-... il est tout le temps en train de faire des vannes de merde. Finit Thibault. Aïe. Je vois où est le problème.

Allo docteure?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant