Retrouvailles

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- Merci. Je chuchote avec une certaine honte dans la voix. 


J'ai honte d'être aussi faible face à cette femme, j'ai honte d'être tombé aussi bas. Et j'ai honte d'avoir autant besoin d'elle après l'avoir repoussée comme une malpropre. J'essaye d'effacer ce sentiment quand je sens une masse s'affaler sur mon torse, elle entoure mon dos de ses bras et repose sa tête sur mon coeur. La chaleur de son corps réchauffe le mien, je prends quelques secondes avant d'entourer sa taille de mes mains. Je la sert, je la sert à tel point que j'ai peur qu'elle s'étouffe. La tête au dessus de ses cheveux je m'enivre de son parfum. Pendant que je tapote son dos avec la paume de ma main mon coeur se calme et se cale sur la cadence de son coeur.

A vrai dire je ne m'attendais pas à cette réaction, elle ne me tient pas responsable de la mort de son frère et je ne comprends pas pourquoi. Mais je n'ai pas la force de me poser la question, mais tout ce que je sais c'est que je ne mérite pas son pardon et quand elle connaitra toute l'histoire elle me haïra. Elle me détestera. Mais je veux profiter un peu de cet instant. Je la sens se détacher lentement et égoïstement je veux qu'elle revienne se caler dans mes bras, j'ai tout d'un coup plus froid.

Elle me dépasse pour aller se poser sur le capot et observer la vue, je la suis pour m'adosser à ses cotés dans le calme de la nuit. Cette ville de nuit, la mer qui borde les falaises, le calme, loin de nos quartiers, de nos banlieues, de nos problèmes. L'accalmie. Seuls le bruit de nos respirations, le bruit de nos pensées berce la nuit noire. 

- Tu sais que je t'en aurais jamais voulu hein ? Me dit-elle en tournant son visage dans ma direction. 

Je ne sais pas quoi répondre à ça, je me contente de la fixer à mon tour parce qu'en vérité j'en sais rien. Je sais pas. Parce qu'à sa place je me serais détesté aussi. Mais d'un côté je savais qu'elle ne m'aurait jamais renié, elle est comme ça, elle nous a toujours tout pardonné, elle nous a toujours accepté tel que nous étions. La plus posée et la plus réfléchit de nous cinq.

- J'ai toujours pensé qu'on était invincibles ensemble, tu te rappelle quand Samia et moi on s'est battue avec les soeurs Sanchez parce qu'on les avait critiqué et que vous êtes venus avec Ibrahim et Mourad pour "parler" à leurs frères. Elle rit à ce souvenir et je peux pas m'empêcher de sourire. Mais attend, le pire c'est que nous on cru que c'était fini et à la maison vous nous avez défoncé avant de nous ramener au Quick pour vous faire pardonner. Le pire c'est que vous nous avez tapé parce qu'on a perdu...

Et j'explose de rire parce que cette journée était vraiment comique. Elles aimaient bien aller s'attirer des problèmes pour rien à l'époque. 

- Tu vois c'est de ça dont je parlais Amine on se supporte en publique et on règle nos comptes en privé. Je t'aurais pas abandonné moi. Ajoute-t-elle d'un ton plus sérieux.

C'est là que je réalise qu'elle a raison.

- Je sais. Je décide de répondre simplement

Nous restons posés là des heures sans que je ne vois le temps passer. Des heures à parler de Brahim, des heures à rire de nos bêtises, des heures à ressasser nos souvenir avant de retourner à nos vies, à notre quotidien. La route se fait au son de l'album de PNL « le monde Chico ». Les deux frères nous accompagnent sur cette route sombre. Je la sens bouger dans son siège, elle semble beaucoup plus agitée mais elle ne dit rien. 

DestinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant