29 juin

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Dans la nuit du samedi au dimanche 29 juin, j'ai senti mon téléphone vibrer sur mon matelas. Une première fois, puis une deuxième fois, j'ai regardé l'heure s'afficher sur l'écran 3h41, appel d'un numéro inconnu. Je réponds. « bonsoir, vous êtes bien la soeur de Ibrahim ****** » Mon coeur s'est arrêté de battre et mon estomac s'est retourné, ma vue s'est troublé et j'ai perdu mon souffle. La seule chose que j'ai entendu 

« accident- hôpital Saint Anne- au plus vite ».

Je me suis habillé machinalement comme un robot et 5 minutes plus tard j'étais au volant. Je n'ai même pas pensé à contacter qui que ce soit, ma mère étant chez une de mes tantes, j'ai juste couru. Une petite brise qui me caressait le visage mais une nuit noire, tellement noire qu'elle aurait pu m'engloutir. Une boule dans la gorge, je sentais que quelque chose n'allait pas et j'étais persuadé qu'il était déjà parti, je le sentais, je l'ai senti dans ma chaire. J'étais terrifiée, horrifiée, je n'ai jamais autant haïe un trajet en voiture. Jamais je n'ai autant détesté me trouver derrière un volant, sur le chemin vers ma destruction. Et cette nuit là, je suis morte deux fois. Quand on m'a annoncé qu'il était mort et quand on m'a annoncé que mon meilleur ami était dans un état de coma profond.

J'ai été la première à voir son corps, je l'ai vu, le matin qui a suivi, tout propre, il avait l'air endormi, presque apaisé. Je l'ai touché, j'ai touché son visage, et je me suis allongée sur sa poitrine, il était gelé. Frigorifié. J'ai essayé de le réchauffer dans mes bras mais rien. Rien. Plus de souffle. Son coeur ne battait plus, j'ai réajusté mon oreille au niveau de son coeur mais plus de battement cardiaque. Je suis restée là à le serrer, je lui ai parlé mais il ne me répondait pas. Rien. Le vide. Le néant. Mes premières larmes ont coulé et très vite je me suis retrouvé à baigner dans mes larmes. J'ai gardé son corps entre mes bras pendant une trentaine de minutes et puis j'ai séché mes larmes. J'ai caressé son visage, ses joues, et j'ai compris que c'était fini. J'ai déposé un baiser sur chacune de ses joues et un sur son front avant de remettre le drap. En posant ce drap sur son visage, je lui ai dit au revoir pour la dernière fois. Et ça a été la dernière fois que j'ai vu mon frère. Allah y Rahmo.

Je crois que cette nuit restera gravée dans ma mémoire à jamais, la peur que j'ai ressenti sur le chemin, la boule au ventre. Choc post-traumatique. Oui, ça doit être ça. Et depuis je panique à l'idée de prendre le volant de nuit. Je ne sais pas vraiment si c'est la peur de mourir comme lui ou si c'est la peur de ressentir encore ce stress du trajet.

J'allume la radio pour m'empêcher de penser à tout ça, je dois détourner mon attention, pour éviter de faire une crise d'angoisse. Je vérifie mon rétro, la voiture noire d'Amine me suit de près sans me coller trop non plus. Je crois que ça me rassure enfin j'en sais rien en tout cas j'arrive à conduire. Quelques minutes plus tard, je pénètre dans le quartier. Je me gare et Amine fait de même juste à côté de moi. « j'ai réussi » je me dis alors à moi même, je suis rentrée dans le noir et je n'ai pas fait de crise d'angoisse. Je sors de la voiture en même temps que lui. 

« - Arrivée saine et sauve. J'entends Amine me dire en souriant

- Merci, je chuchote simplement, il me sourit juste. 

Je vais aller parler à Samia demain. Je vais lui proposer de manger dehors avec moi.

- C'est vraiment bien comme idée, j'espère qu'elle va accepter. Je lui dit sincèrement.

Tu viens demain ? À la maison ?

- Euh je sais pas, en plus ta mère m'a demandé de passer un peu donc-

- Nan nan, chez moi. Il me coupe rapidement

- Pourquoi ? Je lui demande un peu surprise

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