Destin

boudeuse

POV AMINE

On monte dans ma voiture directement. J'aime bien mon nouveau quartier, les jeunes sont tranquilles. Et puis je connais quelques gars d'ici donc ça va je suis pas si seul que ça. Je regarde Alyah s'installer très calmement, même trop calmement. Je n'ai jamais eu l'habitude de la voir silencieuse. Depuis qu'on est descendu de l'appartement je la trouve bizarre, je l'observe juste, pour être sur de ce que j'avance. Je démarre doucement et prudemment, mais je reste toujours attentif à elle côté passager. Après quelques minutes durant lesquelles je la trouve totalement ailleurs elle commence à gesticuler et à se frotter les mains inconsciemment. Ce tic, je ne l'avais plus vu le faire depuis au moins 5 ou 6 ans. Je pensais qu'elle avait arrêté. Quelque chose l'agace, je sais qu'elle se fait du mal à réfléchir autant. Et je me sens coupable de l'avoir délaissé, qu'est ce que je croyais ? Que j'allais revenir et que tout serait normal. Comme avant. La voir comme ça me fait revenir des années en arrière, elle est complètement absorbée par ses pensées. Elle bouge les mains de plus en plus énergiquement, depuis quand elle a repris ça ?!

Je lui prends la main comme j'avais l'habitude de lui faire pour qu'elle arrête de bouger et de s'acharner sur ses mains. Même sa jambe qui bouge et tape le sol s'est stoppé. Depuis qu'on est tout petit, elle fait ça, avec Ibrahim on a pu lui faire perdre le tic des mains mais celui de la jambe n'est jamais parti. Et je constate que même avec le temps il a persisté. Elle fait ça quand elle est stressée ou anxieuse. 

- Alyah ?

Je la fixe pour obtenir une réponse de sa part, elle m'accorde simplement son attention sans répondre.

- Tu as repris ton tic ? Le truc avec tes mains ?

Elle hoche la tête pour dire oui, rien de plus.

- Depuis quand ?

- La mort de...elle se trémousse sur son siège, je sens qu'elle a du mal à continuer la phrase et j'ai du mal à l'entendre aussi donc je répond pour la soulager. De Brahim, elle finit par chuchoter

- Ok. Je lui dis tout simplement.

- Donc, c'est quoi le problème ? Je demande finalement

- Rien, rien répond Alyah un peu plus doucement.

- T'es devenu toute calme, et t'es jamais aussi calme, qu'est ce qu'il se passe ? Je me pose vraiment la question, qu'est ce qui a pu se passer en l'espace de même pas 30 minutes.

Elle baisse les yeux sur nos mains et finis par relever la tête en souriant tout doucement « ça va, arrêtes de t'inquiéter pour rien. Je réfléchis juste à mon plan de déco ». Je la regarde une dernière fois, je sais qu'elle me ment, mais elle ne me diras rien. Je préfère laisser couler. Je soupire avant de répondre « si tu veux ». On reste quelques temps dans ce calme olympien. Plus aucun son ne sort de ma bouche, je préfère la laisser réfléchir seule. Elle me le dira surement si elle en ressent le besoin mais je me sens impuissant face à cette situation. Au bout d'un certain temps je la sens retirer ma main de la sienne. J'avais même oublié que je lavais posé comme ça. Je me retourne furtivement pour comprendre son geste. Elle me sourit timidement en se penchant pour mettre de la musique. Les paroles de la musique nous bercent dans notre silence. Je commence à me décontracter et dessert un peu ma prise sur le volant.

En arrivant devant le magasin, j'observe Alyah, elle a l'air beaucoup mieux. Moins préoccupée enfin de ce qu'elle laisse paraitre. Je la suis, elle a l'air de savoir ce qu'elle fait. C'est vrai qu'elle a toujours aimé la mode, la déco tous ces trucs de filles malgré son attitude de garçon manqué.