Chapitre 5 : Les retrouvailles (2/4)

8 4 2
                                    

Éveillée comme jamais, Mnyahabu se concentrait de tout son être afin de déterminer où pouvait bien se cacher Falco. L'intrus se révélait des plus doués pour couvrir ses traces et disparaître. Après tout, il réalisait ce tour de passe-passe depuis près de vingt ans. Mais sur son territoire, c'était elle qui détenait les clefs et le pouvoir. Ne pas réussir à le localiser l'irritait au plus haut point.

La lionne, dans une grimace de lassitude, sauta de sa branche perchée à trois mètres du sol et se réceptionna avec légèreté. L'ombre du baobab s'étirant sous ses pieds, elle soupira. Elle devait se rendre à l'évidence. Tant qu'il ne souhaiterait pas se montrer, elle serait dans l'incapacité de le retrouver. Pour un être comme lui, disparaître relevait du jeu d'enfant.

— Maudit Falco.

Un pouffement perça le silence alentour. Mnyahabu se retourna, les oreilles dressées, surprise de ne pas être seule. Ses sens lui jouaient-ils des tours ? Elle jurerait avoir entendu quelqu'un rire dans son dos. Le soleil et la chaleur s'amusaient certainement avec son esprit. Non, impossible. Quelqu'un était présent et ce quelqu'un, pour lui échapper, ne pouvait être que...

Un élégant jeune homme à l'épaisse barbe apparut à côté d'elle, un large sourire lui barrant le visage. Sous sa forme de lionne, Mnyahabu le dépassait d'une vingtaine de centimètres. Penchant son museau couleur de blé, elle le regarda fixement.

Falco ne semblait pas avoir pris une ride. Ses yeux, troublants et profonds, reflétaient avec fidélité la noirceur d'une nuit embrumée. Vêtu d'une ample toge tout aussi obscure, il ne payait pas de mine ; cependant, sous cette apparence simple, tapie dans l'ombre, se cachait une puissance incommensurable et destructrice.

— Très bonne introduction Mnya ! s'exclama Falco en tapant dans ses mains.

— Falco.

— En chair et en os.

Falco, toujours aussi enjoué, alla se positionner contre le tronc de l'immense bombacacée, se fendant d'une posture atypique, mais confortable, veillant toutefois à bien rester à l'abri du soleil.

Mnyahabu le regarda faire, sans esquisser le moindre mouvement, analysant son invité surprise. Son apparition prouvait que ses intentions n'étaient pas hostiles et qu'il se présentait en ami. Elle ne put s'empêcher de ressentir du soulagement. La déesse conserva sa forme de lionne. Elle se sentait plus en confiance ainsi.

— Que me vaut le plaisir de ta visite sur mes terres, fils de la nuit ?

— Rien qui ne vaille la peine de s'inquiéter, tu peux me croire, répondit avec flegme Falco, accompagnant ses paroles d'un brassage d'air avec son bras.

— Mais encore ? insista la déesse.

Falco marqua une pause, son beau sourire disparaissant de son visage barbu. Une lueur rouge, pour le moment faible, fit son apparition dans son regard. L'acteur tombait le masque rapidement, et cela ne surprit qu'à moitié l'imposante lionne.

— Je pense que tu as deviné la raison de ma venue en ces lieux.

Mnyahabu s'en doutait, en effet.

— Toutes mes condoléances, Falco. Je ne la connaissais pas comme toi, mais de ce que je sais, elle réalisait un travail merveilleux en Europe.

Falco ne réagit pas. La faible lueur rouge dans ses yeux s'éteignit aussi vite qu'elle était apparue. La tristesse envahissait maintenant chaque parcelle de son visage. Du moins, c'était ainsi que Mnyahabu interprétait les légers tics secouant sa mâchoire et ses joues. Cela la peinait sincèrement.

— Je ne l'ai pas encore annoncé à Quantin. Je pense que cette tâche te revient, fils de la nuit. Après tout, si j'ai vu juste, tu n'es point venu jusqu'ici pour moi, mais bien pour lui. Je me trompe ?

L'Héritage des Ombres : La Fille de la NuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant