L'Héritage des Ombres : La Fille de la Nuit

Chapitre 3 : La colère d'un Dieu

Lorsque Falco arriva sur le champ de bataille, cinq soldats pointaient leurs armes à bout portant sur Fiona, prêts à l'abattre, tandis que Kim gisait un peu plus loin, inerte. À la vue de la scène qui se déroulait sous ses yeux, le dieu sentit une colère incontrôlable brûler dans ses veines et lança l'offensive sans attendre une seconde. Tel un faucon, il fondit sans bruit et avec grâce sur les hommes armés qui, avant même de réaliser ce qu'il leur arrivait, se noyaient dans leur propre sang, un large sourire écarlate se dessinant sur leur cou.

Falco apparut ensuite en un claquement de doigts derrière les deux soldats toujours présents à côté du corps de Kim. Leurs nuques se brisèrent simultanément en un craquement des plus sinistres.

En moins de deux secondes, il venait de tuer sept mercenaires sans la moindre difficulté.

Un rugissement se fit entendre dans les bois tandis que des hurlements de terreurs déchiraient la nuit. Rafa était entré dans la danse et s'occupait à sa manière des soldats restants, ceux encore tapis à l'orée de la forêt. Les bruits d'os craquant sous la pression des canines acérées de la panthère envahirent la clairière, telle une horrifiante mélodie de mort.

L'homme à la capuche décida rapidement qu'il préférait affronter l'ennemi qu'il voyait, éclairé par les constellations, que le monstre invisible qui grondait et découpait ses guerriers dans l'obscurité.

Il regretta aussitôt son choix.

Lorsque Falco tourna son regard vers lui, il fut pris d'une terreur incommensurable. Il se sentit ridicule, minuscule ; mais son envie soudaine et irrépressible de fuir ne lui donnait pas suffisamment de force pour passer à l'acte. Ses jambes étaient comme pétrifiées face à l'intensité de ces yeux rouges. Le visage de l'être en face de lui n'avait rien d'humain. Il était enveloppé d'une âcre fumée noire qui semblait émaner de chaque centimètre carré de son corps, ne laissant entrevoir que ses yeux, si terribles et menaçants.

L'homme sut rapidement qu'il allait mourir et, dans un élan de survie inespéré, réussit à tendre à nouveau son bras droit en direction de l'effrayante apparition divine. Dans un parallélisme presque parfait, Falco lui répondit de la même gestuelle. Son assaillant fut happé par une force d'une puissance irréelle. L'instant d'après, ses pieds flottaient trente centimètres au-dessus du sol, les bras écartés dans une position christique, incapable d'esquisser le moindre geste.

Falco se désintéressa alors complètement de lui et vola à toute allure vers Kim, que Fiona venait de rejoindre avec difficulté. À la vue de son compagnon immobile, la gueule en sang, la louve fut secouée de jappements de détresse. En arrivant sur place, Falco avait compris sur-le-champ que Kim n'était plus. Le visage du loup semblait avoir explosé de l'intérieur, et la divinité devina avec accablement que les soldats avaient visé les yeux, seul endroit où sa peau ne pouvait le sauver. Fiona, inconsolable, essayait de le réanimer en lui sautant à répétition sur le torse avec ses deux pattes avant, comme si ce massage cardiaque désespéré pouvait changer la sentence irrévocable qui s'était abattue sur Kim. Ce spectacle déchirant fit naître chez Falco une tristesse infinie. Un sentiment qui, mélangé à la colère, ne signifiait rien de bon. Le désarroi de Fiona lui brisait encore plus le cœur. Il sentit les larmes lui monter aux yeux face à tant d'injustice.

Pourquoi ? Comment ? Qui était à l'origine de ce massacre ? Les questions commençaient à peine à affluer dans son esprit qu'un besoin avide de réponses le pressait à l'action.

Rafa surgit d'entre les arbres, telle une ombre insaisissable, un liquide âpre et foncé coulant à flot saccadé de sa mâchoire. Il s'arrêta subitement à la vue de Fiona, en proie à la plus grande des souffrances, en train de hurler à la mort du plus profond de son être. Obnubilé par la scène, il ne fit même pas attention à l'homme à la cape noire, toujours immobile et incapable d'esquisser le moindre mouvement. La panthère s'approcha de Falco, qui en retour lui caressa le dessus du crâne dans un geste où se mêlaient étroitement incompréhension, surprise et peine.