Armand ne s'était pas encore relevé. Il aurait voulu rester quelques minutes supplémentaires près du corps sans vie de Séverine Deflandre. La promesse silencieuse qu'il venait de faire à celle-ci et à lui-même consistait sans surprise à lui rendre justice en arrêtant son agresseur. Après quoi il suivit son collègue à l'arrière de la pharmacie. Raphael, marqua une pause dans son élan, puis il se tourna légèrement pour voir si Armand le suivait. Celui-ci se tenait juste derrière. Il entrouvrit la bouche, et interrogea Vitlain sur un ton monocorde. Vidé de ses principales énergies physiques et corporelles.
« — Raphael ? Tu ne trouves pas ça étrange ? Je veux dire... Qu'il n'y ait aucune trace de pas, ni d'éclaboussures de sang aux murs ? »
L'équipe médicale avait déjà presque terminé d'emporter le corps, et Armand attendait une réponse, ou à minima une réaction de son coéquipier. Mais Raphael continuait de s'avancer dans les profondeurs de la boutique. L'inspecteur Vitlain avait fait mine de ne pas avoir entendu l'interrogative et indiqua simplement que pour le moment il fallait concentrer leur attention sur les détails matériels. Armand, frustré, admit toute fois qu'ils reviendraient ensemble sur tous les points plus tard et les deux inspecteurs disparurent dans les tréfonds de l'officine qui étaient plongés dans des ténèbres inquiétantes.
Raphael cherchait à tâtons un interrupteur sur les coins du mur, en vain. Il fut devancé par Armand qui saisit à deux doigts un petit fil suspendu au-dessus de leurs têtes. Les néons blancs prirent vie en saccade, chacun leur tour, leurs lueurs clignotaient et faisaient entendre de petits grésillements irréguliers avant de se stabiliser. Il fallut attendre quelques secondes afin d'apercevoir la totalité de l'arrière-boutique. Armand avait une fois de plus confirmé à son coéquipier qu'il connaissait bien les lieux, puis les deux hommes commencèrent à ouvrir plusieurs grands tiroirs au hasard, cherchant d' éventuels éléments douteux qui pourraient les amener à une première piste.
De prime abord, tout semblait normal. Les médicaments étaient rangés par maux, comme c'était le cas dans toutes les officines. Tous les tiroirs étaient annotés de petites étiquettes révélant leur contenu. Maux de tête, maux de gorge, médication infantile, articulations et muscles, toutes les solutions aux maux humains étaient visibles sous leurs yeux. Ils fouinaient de bas en haut, chacun de leur côté, puis Raphael aperçut un tiroir mal aligné et sans étiquetage. Non peu satisfait d'avoir enfin trouvé un élément bancal au milieu de ce lieu où tout semblait à sa bonne place, l'inspecteur Vitlain attira l'attention d'Armand. Il était en train de farfouiller inutilement dans les tiroirs d'à côté quand il entendit son collègue. Il se retourna d'une traite, excité.
« — Armand ! Regarde par là. Tu as déjà vu ce tiroir ? Il est un peu cassé et pas étiqueté... Armand avait déjà saisi le petit tabouret à sa droite puis se rapprocha en installant l'objet boisé à ses pieds.
— Non, je n'y avais jamais fait attention... À vrai dire... Séverine, enfin... Madame Deflandre ne me laissait pas vraiment l'accès à l'arrière-boutique. Elle prétextait la dangerosité de l'endroit pour un gamin de mon âge. »
Raphael écouta attentivement la douce voix d'Armand, quasi enfantine, qui n'allait pas vraiment de pair avec le physique de celui-ci. Il se hissa sur l'escabeau de fortune afin de pouvoir atteindre le tiroir asymétrique. Vitlain ouvra avec une lenteur déconcertante le tiroir qui manqua presque de tomber.
« — Des livres, avait-il bougonné, déçu. »
Il prit néanmoins le temps de déloger chaque ouvrage de sa cachette, et les donnait, un par un à Armand. Au fur et à mesure de la découverte du contenu de ce tiroir, les deux hommes se rendirent compte que les manuscrits, de toutes tailles, étaient en indien. Vitlain, surprit, afficha une mine perplexe vers son collègue, il souhaitait manifestement un éclaircissement de sa part.
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Nos cœurs meurtris
Mystery / ThrillerArmand Tellier, brillant fils d'intellectuels parisiens, tout juste diplômé de l'école de police, touche enfin son rêve du bout des doigts. En 1996, alors âgé de 21 ans, il intègre les bureaux de la Police Judiciaire du 8ème arrondissement de Paris...