Chapitre 10

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Aujourd'hui

LÉO

Ce matin, une femme nommée Louisa m'a appelé. Elle m'a expliqué qu'elle était la tante d'Agathe et qu'elle lui avait parlé de moi. Il se trouve qu'elle a besoin d'un apprenti cuisinier pour lancer sa brasserie qui devrait ouvrir dans plusieurs jours. Elle m'a donné rendez-vous quelques heures après notre appel pour que l'on se rencontre.

Je dois admettre que j'étais encore un peu chamboulé de la veille. La discussion au sujet de Marvel avec Juliette m'a rappelé Léna. Je pense toujours à elle, évidemment. Mais là, c'était différent. C'étaient des souvenirs à deux qui me frappaient le visage. Jusqu'ici, je n'avais rencontré qu'une seule femme aussi passionnée que moi. Et elle s'est envolée.

C'est pourquoi je suis parti précipitamment. Je ne voulais pas m'effondrer devant Juliette, ni la faire culpabiliser de quoi que ce soit. J'ai regretté assez vite d'être parti comme un voleur et donc j'ai demandé à Ethan son numéro alors qu'il me rappelait qu'il s'agissait de son premier jour à la librairie aujourd'hui.

Je regarde le livre que je lui ai emprunté hier qui est posé sur ma table de nuit. Je ne lis jamais mais j'ai pris ça comme un signe. Je feuillette à nouveau ce recueil de poésies jusqu'à m'arrêter sur l'une d'entre elles.

« Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,

Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.

J'irai par la forêt, j'irai par la montagne.

Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.

Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,

Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,

Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,

Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.

Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,

Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,

Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe

Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur. »

Victor Hugo

J'ai toujours mal quand je pense à elle. Je crois que la douleur ne partira jamais. Mais quelque part, j'ai l'impression qu'à travers ce poème, j'ai le droit d'avoir mal. Ces quelques vers si bien écrits rendent son souvenir plus doux, plus supportable.

***

Je me suis rendu à la brasserie quelques heures plus tard. Je pense que je n'ai jamais vécu un entretien d'embauche aussi...original. Quand je suis arrivé, Louisa était occupée à laver les tables.

— Bonjour, ai-je dit.

— Salut Léo. Assieds-toi, je t'en prie.

Je me suis exécuté et je m'attendais à quelques questions ou quelques essais en cuisine pour montrer ce dont j'étais capable.

— Après la natation, la cuisine donc? a-t-elle dit en s'asseyant à son tour.

— Hum...oui, c'est ça, ai-je répondu en me raclant la gorge.

— Je te suivais de près quand tu étais dans le championnat. J'ai toujours trouvé ça dommage que tu arrêtes si brusquement. Tu devais avoir tes raisons.

Je coulerai avec toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant