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Warning :
Ce chapitre contient de la violence et des traumatismes.

Mais je n'étais pas prête.

Physiquement et mentalement.

Je pense même que je serai morte avant d'avoir révéler ce qu'il m'était arrivé cette soirée-là.

- Si je te raconte comment j'ai eu ses brûlures, tu parleras à ton tour ?

Ou alors j'allais finir par tout raconter à quelqu'un.

- Peut-être...

Et que cette personne serait une fille que je connaissais à peine et qui la plupart du temps me tapait sur le système.

- Bah assis-toi Lisa parce que ça risque d'être très long.
Elle se décala et se mit en position tailleur pour me faire une place dans son lit, et je m'assis en face d'elle.
- Et bah c'est parti. Il faut remonter à l'âge où j'avais dix ans, quand ma vie allait. Je n'avais jamais appris l'existence de l'espionnage et je pensais clairement que ça se passait que dans les films ce genre de trucs. J'habitais à l'époque avec ma mère et ma sœur à Berlin.

D'où son accent.

- Mais un jour, un mec qui se faisait passer pour un recruteur a voulu faire absolument passer des tests d'aptitude à ma sœur. Elle était unique, c'est ce qu'il avait dit. Ma mère l'avait laissé faire, sans rien dire. Depuis ce jour, ma sœur passait ses journées je ne sais où, et revenait avec des énormes bleus partout sur le corps, tard dans la nuit. Chaque soir, j'attendais qu'elle rentre avant de dormir, sûrement par peur qu'elle finisse par ne pas revenir et nous abandonner.

Elle fit une petite pause avant de reprendre. Changeant de position.
- Ce qui m'étonnait était que ma mère ne disait rien à propos de ses allers-retours. Un jour elle est revenue presque morte, elle saignait à la tête et avait trois fractures. Alors cette nuit-là j'ai décidé de la suivre, pour voir ce qu'il se passait. J'ai traversé toute la ville pour découvrir qu'elle se battait dans une usine abandonnée. Elle a fini par se faire battre, et tomber à la renverse alors je suis sortie de ma cachette et je suis partie l'aider. Mais au lieu de ça, tout ce que j'ai réussi a été de la gêner quand des crétins ont mis feu à la baraque.

Je commençais à me douter de la fin de l'histoire. Elle allait perdre sa sœur dans l'incendie, et en essayant encore une fois de l'aider, elle allait se brûler.

- Trop faible pour sortir, elle a été rattrapée par les flammes, j'ai voulu l'aider, mais j'ai échoué. Et elle est morte. Par ma faute.

Je n'arrivais pas à comprendre comment elle pouvait raconter cette histoire sans verser une larme, sans éprouver le moindre remords. Je n'arrivais pas à savoir d'où venait la force qui lui permettait de tenir jusqu'ici.

Mais je savais une chose.

Je n'étais plus seule.

Plus la seule à avoir un passé.

Plus la seule à avoir échoué.

- Tu as voulu l'aider...
- Nan. En voulant l'aider alors que j'étais incompétente, je n'ai servi que de poids en plus. Elle m'a sortie du bâtiment. Mais pour que je m'en sorte elle a dû y rester.
- Dans cette usine, elle s'entrainait à devenir agent ?
- C'est ce que le recruteur m'a dit. Après sa mort, j'ai voulu honorer sa mémoire, et j'ai repris son poste. Je suis restée quelques années là-bas, quand ma mère et moi avons déménagé, j'ai changé d'agence, laissant à Berlin tout ce qui restait de ma sœur.
- C'était elle sur les dossiers que j'avais aperçus dans ta chambre ?
- Ouais. Quand elle était plus jeune.
- Tu as dit qu'elle était morte ? Pourquoi essayait d'en apprendre plus ?
- Parce que j'ai jamais pu mettre la main sur ses salops. Et que je ne crois pas que c'était juste un accident.
- Tu n'as pas peur de faire revenir des souvenirs douloureux en te remettant dans cette affaire ?
Je ne pense plus à moi. Je pense à ma sœur. Toute la douleur en vaudra la peine si je peux rendre justice à Flora.

Elle n'avait pas tort. Ce n'était plus le moment de s'apitoyer sur son sort, c'était le moment de se venger.

- Et toi alors, quel est ce passé si honteux que tu ne peux même plus faire confiance aux gens ?
- Je...

Respire Elisabeth, ce n'est qu'une histoire. Ce n'est pas en la racontant qu'elle se reproduira. Il ne peut rien t'arriver.

- J'étais en mission... Je devais arrêter une bande de trafiquants, du côté d'un port, en France. On m'avait envoyé quelques jours là-bas pour régler ce problème une bonne fois pour toute. Apparemment, les autres agents n'ont jamais réussi à les arrêter. Alors on a fait appel à mes services. Ça ne devait être qu'une simple opération comme les autres.
- Mais elle a tourné au drame.
- Ouais. Ce n'étaient pas les gens que l'on m'avait décrit, ils étaient plus forts, plus expérimentés. Je n'ai pas fait le poids contre eux. Je me suis retrouvée droguée et attachée. Ils me jetaient des insultes au visage que je comprenais pas. Ils avaient dû me prendre pour quelqu'un d'autre. Enfin bref, ils ont déversé toute leur colère sur moi, alors que
je n'avais rien fait. Et on finit par m'enfermer et me jeter dans la mer.

Je n'avais pas voulu m'étaler, parce qu'une partie de moi pensait toujours qu'Ash allait finir par réutiliser ses informations à mes dépends. Alors pour une fois j'avais été honnête, mais j'avais omis des passages, trop personnels.

- Ils t'ont torturé, conclus-t-elle.
- Quoi ?
- Je sais analyser. J'ai tout de suite vu que tu avais peur des espaces clos, que tu avais aussi peur de l'eau et que tu ne laissais personne t'approcher de trop près.
- Ouais, ils m'ont torturé.
- Maintenant ce que je demande c'est comment as-tu fait pour t'en sortir ?

C'était là qu'ils se trompaient tous.

Je ne m'en étais pas sortie.

- Oh non, laisse moi deviner, tu vas me refaire le coup de tu es morte ce jour là, c'est ça ?

Elle était facile à comprendre quand elle combattait.
J'étais facile à comprendre par ma façon de penser.

- Tu ne peux pas penser comme ça. Parce que ce n'est pas comme ça qu'on avance dans la vie.
- Et si je n'ai pas envie d'avancer ? Si je n'ai qu'une envie c'est que la douleur s'arrête ?
- Tu n'as pas le droit Elisabeth. Parce que tu es en vie, tu as eu ce que ma sœur n'a pas pu avoir. Alors tu n'as pas le droit de te plaindre. Tu dois te montrer digne de la chance que tu as eu.

- J'aurai préféré que ce soit elle qui soit vivante plutôt que moi. Crois moi.
- Nan. Ce n'est pas vrai. Personne ne préfère être mort.

Note de l'auteur :
Et on continueeee
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byyyyeeeeee

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